La justice avait pourtant tranché. Le favori à l’élection interne des Républicains, Laurent Wauquiez, et le maire de Béziers, Robert Ménard, ont décidé de contourner cette interdiction. En organisant une exposition sur les santons – petites figurines en argile représentants la scène de la nativité – dans l’hôtel de région d’Auvergne-Rhônes-Alpes, Laurent Wauquiez est passé outre la décision du tribunal administratif rendue le 6 octobre. Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, a lui aussi souhaité défendre les « traditions et notre identité grâce au talent de nos Santonniers de Provence » en installant une crèche au siège régional (voir son tweet).
Robert Ménard a décidé de maintenir l'installation d'une crèche de Noël dans la mairie de Béziers, sans s'embarasser d'organiser une exposition. Lundi soir, il a inauguré cette crèche en grande pompe. « On ne touchera pas à notre crèche de Béziers. Nous la défendrons » clamait-il devant les habitants de sa ville. La plus haute juridiction administrative de France avait pourtant confirmé cette interdiction le 9 novembre dernier.
Le rédacteur de la loi de 1905, Aristide Briand, avait à cœur de ne pas « déchaîner les passions religieuses », rappelle Nicolas Cadène.
Pourquoi interdire les crèches de Noël dans les lieux publics ?
Contacté par Public Sénat, le rapporteur général de l’Observatoire de la Laïcité, Nicolas Cadène, rappelle que les administrations publiques « ne doivent pas marquer leur adhésion à un culte en particulier. » L’article 28 de la loi de séparation des l’Églises et de l’État stipule en effet qu’il est interdit « d’élever » un « emblème religieux (…) en quelque emplacement public que ce soit. » Interrogé sur l’initiative de Laurent Wauquiez, Nicolas Cadène nous explique « qu’il appartiendra à la justice d’évaluer si l’installation de cette crèche respecte le principe de neutralité. » Toutefois, il précise que le juge « analysera aussi la présentation publique » qui a entouré la mise en place de cette exposition. « Si la crèche renvoie à un caractère festif, artistique ou culturelle », il n’y a pas de raison que la justice demande qu’elle soit retirée, explique Nicolas Cadène.
En ce qui concerne les élus qui ne respecteraient tout simplement pas ces décisions de justice, le rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité souligne que « dans un État de droit, on se doit de respecter les décisions prises par une justice indépendante » et de rappeler que « les élus doivent être exemplaires. » À toutes fins utiles, Nicolas Cadène mentionne que le rédacteur de la loi de 1905, Aristide Briand, avait à cœur de ne pas « déchaîner les passions religieuses. »
La Laïcité, sujet sensible s’il en est, est au cœur de nombreuses polémiques. Ordonné par le Conseil d’État, le retrait d’une croix surplombant la statue de Jean-Paul II à Ploërmel (Morbihan) a récemment suscité la colère de certains responsables politiques. Membres des Républicains, Nadine Morano ou Valérie Boyer avaient également proposé d’inscrire les « racines chrétiennes » de la France dans la constitution. Si le chef de l’État reste discret sur cette question, un grand discours sur la laïcité est prévu en janvier prochain.