Gaz hilarant: le Sénat siffle la fin de la «party»
Adoptée à l’unanimité par la commission des affaires sociales, une proposition de loi du Sénat s’attaque à l’usage récréatif du protoxyde d’azote. Disponibles pour quelques euros sur internet ou en supermarché, ces cartouches de gaz dit « hilarant » séduisent de plus en plus de jeunes avec des effets extrêmement graves pour leur santé.

Gaz hilarant: le Sénat siffle la fin de la «party»

Adoptée à l’unanimité par la commission des affaires sociales, une proposition de loi du Sénat s’attaque à l’usage récréatif du protoxyde d’azote. Disponibles pour quelques euros sur internet ou en supermarché, ces cartouches de gaz dit « hilarant » séduisent de plus en plus de jeunes avec des effets extrêmement graves pour leur santé.
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« Sclérose combinée de la moelle et neuropathie sensitive », « paraplégie flasque », « syndrome de Brown-Séquard… » Voilà quelques exemples des pathologies dues à l’usage récréatif du protoxyde d’azote recensées par l’Agence régionale de santé des Hauts-de-France, cette année. « Les jeunes sont euphoriques. On pourrait croire que ce n’est pas négatif mais ça va beaucoup plus loin avec des dégénérescences du cerveau, moelle épinière attaquée, paralysies… » explique Jocelyne Guidez, rapporteure centriste de la proposition de loi « tendant à protéger les mineurs des usages dangereux du protoxyde d’azote ». Le texte a été adopté à l’unanimité à de la commission des affaires sociales, ce matin.

« On a la possibilité d’agir avant que n’arrivent des situations trop catastrophiques »

Depuis quelques années, l’usage détourné de ce composé chimique, disponible en toute légalité pour quelques euros, est en train de se développer chez les jeunes. Dans ces « soirées proto », le principe est simple. Il suffit de vider les cartouches de gaz, destinées à l’origine pour les siphons à chantilly, dans un ballon de baudruche. L’effet est immédiat mais court. Quelques minutes seulement d’euphorie et de crise de fou rire conduisent à bien mal nommer le protoxyde d’azote : « gaz hilarant »… « Il y a huit morts par an en Grande Bretagne liés à l’usage du protoxyde d’azote (…) En France, le problème arrive petit à petit et même sérieusement dans certaines régions. On a la possibilité d’agir avant que n’arrivent des situations trop catastrophiques » souligne Valérie Létard, sénatrice centriste du Nord et auteure de la proposition de loi.

Gaz hilarant: "On a la possiblité d'agir avant que n'arrivent des situations trop catastrophiques" Valérie Létard
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« Certains en consomment 100 ou 200 capsules dans la journée »

En effet, la région des Hauts-de-France est particulièrement touchée par ce phénomène. « Dans la commune de Loos, on ramasse 100 kg de capsules chaque mois (…) Certains en consomment 100 ou 200 dans la journée » révèle Jocelyne Guidez. « Ce sont les maires du Nord qui m’ont alerté sur ce sujet. Ils ont dû prendre des arrêtés municipaux. Mais un arrêté municipal ne peut pas être mis en œuvre sur la totalité de la commune. Donc on déplace le problème » indique Valérie Létard. Jusqu’à présent, 23 communes du Nord et 4 dans le Pas-de-Calais, ont pris des arrêtés municipaux afin d’interdire l’usage détourné du protoxyde d’azote. Dans l’Hérault, le Gard, la Seine-Saint-Denis, l’Oise ou l’Essonne, des élus ont fait de même.

« Des petits commerces vendent ces capsules avec des ballons pour inciter les jeunes à consommer »

C’est pour venir en aide aux élus locaux, en leur donnant « l’arsenal juridique nécessaire pour limiter les usages détournés du protoxyde d’azote » que Valérie Létard a déposé sa proposition de loi. Ce texte de 4 articles vise à en interdire la vente aux mineurs. L’incitation faite à un mineur d’inhaler ce gaz devient un délit puni d’un an d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende. Le texte préconise la dispense d’une information sur les risques de cet usage détourné du protoxyde d’azote dans les établissements scolaires. Enfin, Une mention indiquant la dangerosité du protoxyde d'azote sera également apposée sur chaque contenant incluant ce produit, qui ne pourra être vendu sans. « On s’est aperçu que des petits commerces vendent ces capsules avec des ballons pour inciter les jeunes à consommer ces produits » s’alarme Jocelyne Guidez.

gaz hilarant: "on veut que la vente soit interdite aux mineurs" Jocelyne Guidez
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À noter que parmi les amendements adoptés en commission ce matin, celui du sénateur Jean-Pierre Grand oblige les hébergeurs et fournisseurs d'accès à internet à informer leurs abonnés de telles interdictions de vente aux mineurs. Effectivement, une rapide recherche sur un site de vente en ligne, vous permet d’acheter pour moins de 40 euros une bonbonne de gaz présenté comme « hilarant » avec les « ballons offerts ».

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Au vu du consensus qui règne à la chambre haute autour de cet enjeu, le texte sera probablement adopté le 11 décembre en séance publique. Les sénateurs souhaitent d’ores et déjà attirer l’attention de l’exécutif et de la majorité LREM à l’Assemblée nationale sur ce phénomène. « Faisons-en sorte de prendre ces dispositions le plus vite possible (…) Ce serait une belle coopération entre le Parlement et le gouvernement autour d’un travail qui vient du terrain. Ce serait un beau geste » insiste Valérie Létard.

 

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