« Je n’ai pas voulu faire une biographie mais une sorte de récit impressionniste ». Ariane Chemin est partie sur les traces du parcours de Milan Kundera, qui vit en France et s’est retiré de la vie médiatique depuis plus de 35 ans. Un écrivain mystérieux donc, dont l’œuvre est intimement liée à l’Histoire de son pays d’origine. Milan Kundera est né en Tchécoslovaquie à l’époque où la région faisait partie de l’URSS. Son roman « La Plaisanterie », qui raconte l’enfermement d’un jeune étudiant ayant fait une blague qui a déplu au pouvoir étatique du pays, a été célébré lors du Printemps de Prague, moment de la libéralisation du pays.
Un auteur adulé en France mais oublié dans son pays ?
Si la renommée mondiale de l’auteur s’est développée dans les années 1980, en revenant dans le pays de naissance de Milan Kundera, Ariane Chemin a constaté qu’« à Prague, il ne restait plus rien de l’auteur, pas une plaque, il a été effacé ».
Mais pour quelle raison ? Selon Ariane Chemin, « il y a 10 ans une polémique à son sujet a éclaté. Il a été accusé d’avoir été un informateur de la police. Adulé en France, une série d’intellectuels français est alors venue à son secours, mais ces accusations ont beaucoup marqué les habitants de Prague ».
Pour son livre, la journaliste n’a pas rencontré directement l’auteur franco tchèque. « J’ai beaucoup échangé avec sa femme, Vera Kundera, mais je n’ai jamais osé demander à rencontrer Milan car je pensais que ça serait impossible », livre-t-elle.
« Il ne faut pas penser Kundera comme quelqu’un d’austère, enfermé dans sa bulle »
Christian Salmon, lui, connaît bien l’œuvre de Kundera mais aussi l’homme. Il a été son assistant dans les années 1980 après avoir fait sa connaissance à la faveur d’un entretien réalisé pour le journal Libération.
Il explique ainsi son refus d’apparaître médiatiquement : « A l’époque il était déjà un écrivain connu, estimé. Lors de la parution de son livre « L’insoutenable légèreté de l’être », il a été assailli par les journalistes qui voulaient l’interviewer et il était paniqué par cette vague ». Mais il ajoute : « Il ne faut pas penser Kundera comme quelqu’un d’austère, enfermé dans sa bulle. C’est quelqu’un d’extrêmement drôle, lors des années que j’ai passées avec lui, on se faisait continuellement des blagues. Tout comme il ne faut pas réduire l’œuvre de Kundera à sa dimension politique. C’est aussi un écrivain de l’intime, capable de faire des intrigues à partir d’une crise de jalousie. L’amour, chez Kundera, est ainsi abordé d’une manière spécifique, c’est quelqu’un qui ridiculise tous les grands thèmes ».
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