« Les plateformes ne peuvent pas que nous abreuver d’oeuvres américaines », estime Radu Mihaileanu

« Les plateformes ne peuvent pas que nous abreuver d’oeuvres américaines », estime Radu Mihaileanu

Et si la fermeture des salles obscures avait durablement fragilisé l’industrie cinématographique européenne ? Bouleversement des modes de consommation, hausse du nombre des abonnements aux plateformes de vidéos à la demande américaines, aides européennes ouvertes aux géants du numérique. Dans ce nouvel équilibre concurrentiel, quel avenir pour le cinéma européen ? Cette semaine, Ici l’Europe ouvre le débat. 
Public Sénat

Par Marie Brémeau et Pierre Bonte-Joseph

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Et si elles avaient gagné la bataille ? Pour Ivo Hristov, député européen socialiste et ancien critique de films il est loin le temps où « on se rendait dans des salles de cinéma et dans un silence quasi-religieux ». Aujourd’hui « on préfère le confort de sa télé à la maison » et la consommation du cinéma sur les plateformes. En 2020 Netflix a dépassé les 200 millions d’abonnés, et Disney plus lancé avant le confinement, en revendique déjà près de 100 millions. Un coup dur pour le cinéma pour cet ancien critique « c’est le respect pour l’art qui en a pris un coup. Les petits formats prennent le dessus sur les longs formats, les formats classiques […] c’est l’habitude même d’aller au cinéma qui est contestée et qui avec le temps devient un peu une habitude d’élite, comme d’aller à un concert par exemple. »

Les plateformes qui rient, le cinéma qui pleure

Pour le réalisateur franco roumain Radu Mihaileanu, si le cinéma a « un genou à terre », l’audiovisuel est sorti gagnant de cette période. Pour autant, « les nouvelles ne sont pas si mauvaises que ça » pour le cinéma et les gens reprennent le chemin des salles. Mais avec en France près de 450 films en « stock », les films vont rester peu de temps à l’affiche et le cinéaste craint que les maisons de production ne soient fragilisées limitant leurs capacités à prendre des risques à l’avenir.

Netflix, et Amazon devront mettre la main à la poche

Consciente du poids de plus en plus important des plateformes, l’UE a adopté une directive sur les services de média audiovisuel. Les obligations varient d’un pays à l’autre. La France a décidé de taper fort en forçant les plateformes de vidéos à la demande à injecter 20 à 25 % de leur chiffre d’affaires dans les productions européennes.

Vous voulez nos abonnés, Netflix a 8 millions d’abonnés en France ? Y’a pas de problème, mais en échange, vous ne pouvez pas nous abreuver que d’œuvres américaines, Radu Mihaileanu.

Une contrainte nécessaire pour le réalisateur franco roumain de films à succès tel « le Concert » ou « Va vis et deviens », Radu Mihaileanu : « Avec les plateformes, c’est du donnant-donnant. Vous voulez nos abonnés, Netflix a 8 millions d’abonnés en France, y’a pas de problème, le marché est ouvert mais en échange, vous ne pouvez pas nous abreuver que d’œuvres américaines et éduquer nos publics qu’aux œuvres américaines. En échange, il y a une obligation de 30 % dans le catalogue d’œuvres européennes, il y a aussi les obligations d’investissement, à hauteur de 20 %. Et c’est important. »

Faire vivre la diversité

Avec cette directive, le cinéaste estime aussi que l’UE défend l’exception culturelle française. « Je rappelle qu’avant l’existence des plateformes, la France était traditionnellement, le 3e pays au monde comme force cinématographique, et 1er pays au monde à produire et coproduire les meilleurs cinéastes du monde et d’Europe, à faire vivre la diversité. Donc si on perd cette capacité de la France, les cinéastes du monde vont en pâtir, et donc la diversité de la pensée à travers le cinéma, et donc la démocratie, va s’en ressentir. »

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