Macron suspend le vaccin AstraZeneca : « Les gens vont devenir de plus en plus méfiants »

Macron suspend le vaccin AstraZeneca : « Les gens vont devenir de plus en plus méfiants »

Le chef de l’Etat a annoncé la suspension du vaccin AstraZeneca jusqu’à « demain après-midi », dans l’attente de l’avis l’agence européenne du médicament. Emmanuel Macron espère « reprendre vite » la vaccination avec AstraZeneca « si l’avis le permet ».
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« Nous suspendons jusqu’à demain après-midi ». La décision du chef de l’Etat est tombée vers 16 heures, ce lundi. Elle devrait être commentée. La France suspend l’utilisation du vaccin contre le covid-19 AstraZeneca. « L’autorité européenne, l’EMA (l’agence européenne du médicament, ndlr), rendra demain après-midi un avis sur le recours à ce vaccin. Et donc, sur la recommandation du ministre de la Santé, en lien avec les autorités sanitaires françaises, […] la décision qui a été prise, en conformité avec notre politique européenne, c’est de suspendre par précaution la vaccination avec AstraZeneca, en espérant la reprendre vite si l’avis de l’EMA le permet », a annoncé Emmanuel Macron, soulignant que « plusieurs partenaires européens (avaient) décidé de suspendre l’usage du vaccin », dont « les autorités sanitaires allemandes ».

Berlin a en effet annoncé sa décision, un peu plus tôt dans la journée. Dimanche, c’est l’Irlande et les Pays-Bas qui ont annoncé leur décision de suspendre le vaccin par précaution, après que des effets secondaires possibles ont été rapportés au Danemark et en Norvège, qui a aussi suspendu le vaccin. Quelques cas de formation de thrombose, c’est-à-dire de caillots sanguins, ont été signalés parmi des personnes vaccinées, sans que le lien avec le vaccin n’ait été démontré. L’Italie a suspendu à son tour ce lundi, à titre de précaution et, elle aussi, dans l’attente de la décision de l’EMA, l’administration du vaccin AstraZeneca.

De son côté, l’Agence européenne des médicaments a annoncé aujourd’hui qu’elle tiendrait une « réunion extraordinaire » jeudi, ajoutant que les avantages du vaccin l’emportent toujours sur les risques. « Le comité de sécurité de l’EMA examinera plus en détail les informations demain (mardi) et a convoqué une réunion extraordinaire le jeudi 18 mars pour conclure sur les informations recueillies et sur toute autre mesure qui pourrait être nécessaire », déclare l’agence dans un communiqué, qui laisse donc entendre que la décision pourrait venir jeudi et non mardi.

« Précaution pour ne pas compromettre la confiance » ou « arme à double tranchant » ?

« Si c’est une précaution pour ne pas compromettre la confiance dans la vaccination, pourquoi pas. Un jour, ça ne change pas fondamentalement les choses », réagit le sénateur PS Bernard Jomier, ex-rapporteur de la commission d’enquête du Sénat sur la crise du covid-19. Ce médecin de profession souligne cependant que « les éléments évoqués par les Norvégiens ne paraissaient pas très inquiétants ».

« Au contraire, ça peut créer un doute. Il y a déjà eu beaucoup de doutes sur ce vaccin. Les gens vont devenir de plus en plus méfiants. C’est une arme à double tranchant de surprendre » pense à l’inverse le sénateur LR René-Paul Savary, qui était vice-président de la commission d’enquête. « Et c’est encore un coup dur de plus pour la vaccination ». Le sénateur de la Marne ajoute :

Pensez aux gens qui ont été vaccinés, qui vont se faire du souci. Et ceux qui devaient être vaccinés, qui vont être annulés.

René-Paul Savary s’étonne du timing de cette décision, valable pour le moment pour une seule journée. « J’aurais attendu mardi quand même. On aurait pu attendre 24 heures et l’avis de l’EMA. C’est un excès de précaution, me semble-t-il. A moins qu’ils aient des éléments nouveaux sur le rapport bénéfice/risque » ajoute le sénateur LR, lui aussi médecin de profession. Reste qu’il voit « encore la désorganisation que ça va engendrer dans les vaccinations. Quand vous avez organisé toute votre journée, car vous êtes obligés de prendre les personnes par dizaine, car le flacon a dix doses, puis qu’il faut déprogrammer… C’est au détriment des soins des autres patients encore ».

Castex disait dimanche soir avoir « confiance dans ce vaccin »

La décision du chef de l’Etat peut en partie surprendre. Car dimanche soir, le premier ministre Jean Castex tenait encore un autre discours. « À ce stade, il faut avoir confiance dans ce vaccin et se faire vacciner. Je le dis de la façon la plus solennelle, sinon on aura des retards dans la vaccination, les Françaises et Français seront moins protégés et la crise sanitaire durera longtemps », a déclaré Jean Castex à l’occasion d’un entretien sur la plateforme Twitch avec le journaliste Samuel Etienne. « On n’a pas suspendu parce que nous ne disposons pas, au contraire, d’éléments qui nous conduisent en France à suspendre cette vaccination », a même ajouté le premier ministre. Vendredi, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a assuré qu’il n’y avait « pas de raison de ne pas utiliser » le vaccin AstraZeneca. Mais ce lundi, l’organisation a annoncé réunir mardi son groupe d’experts sur la vaccination pour étudier, « en contact étroit avec l’Agence européenne des médicaments », la sécurité du vaccin AstraZeneca.

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