Patrick Zylberman : « La deuxième vague est souvent beaucoup plus méchante que la première »

Patrick Zylberman : « La deuxième vague est souvent beaucoup plus méchante que la première »

Un jour, un regard sur la crise du Covid-19. Public Sénat vous propose le regard, l’analyse, la mise en perspective de grands experts sur une crise déjà entrée dans l’Histoire. Aujourd’hui, le regard de… Patrick Zylberman, Professeur émérite à l’Ecole des hautes études en santé publique.
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Par Rebecca Fitoussi

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L’historien de la santé nous aide à comparer les différentes épidémies qui ont frappé la planète ces dernières décennies et la façon dont elles ont été gérées au niveau national et international. Pour lui, pas de doute, il faudra réformer l’OMS qui a « courbé l’échine devant la Chine » et dont le prestige s’est totalement effondré. Entretien.

Ça y est ! Nous sommes a priori dans la dernière semaine de confinement, ce qui ne veut pas dire que le pire est derrière nous, mais essayons tout de même d’avancer et de nous projeter. Cette crise fera date, on l’a tous compris. Elle entrera dans les livres d’histoire. Qu’est-ce qu’on retiendra le plus selon vous ?

On retiendra notre choc profond à tous devant l’intensité et l’amplitude de cette crise. C’est là sa principale ou même peut-être sa seule originalité. C’est véritablement la magnitude de cette crise sur tous les plans, et c’est cela aussi qui est très important, c’est qu’on s’aperçoit qu’une crise sanitaire, c’est aussi une crise économique et c’est aussi une crise politique et géopolitique. Il y a ces quatre étages qui sont inséparables.

A-t-on tiré des leçons des crises sanitaires passées ? Avez-vous le sentiment qu’on gère mieux ce type de crise aujourd’hui qu’il y a un siècle ?

Un siècle c’est trop loin en arrière. On peut comparer avec la grippe pandémique de 2009 et le SRAS de 2003. On pourrait aussi établir une comparaison avec la pandémie grippale de 1968-1970. Ce qui me frappe, c’est que la communication publique de la gestion à la fois technique et politique est bien meilleure cette fois-ci qu’elle ne l’était en 2009 par exemple. Les deux éléments, la gestion technique d’une part et politique d’autre part, sont clairement identifiés et clairement personnalisés. Vous avez Jérôme Salomon, directeur général de la santé, et le ministre de la santé voire le Premier ministre et le Président de la République. On a donc une représentation de la gestion de la crise qui est très claire, ce qui ne veut pas dire qu’on ne fait pas d’erreur ou qu’il n’y a pas de raté, mais cela veut dire qu’il n’y a pas cette espèce de confusion de la gestion d’une pandémie et de la politisation de cette gestion, comme cela a eu lieu en 2009 avec les déboires que l’on connaît pour Roselyne Bachelot.

Le confinement semble avoir été efficace : moins de morts, hôpitaux moins engorgés, moins d’entrées en réanimation… Peut-on dire que cette stratégie a été la bonne ? Quel bilan en tirez-vous ?

Le problème ne se pose pas comme cela. Le problème, c’est qu’il n’y avait aucune autre solution, absolument aucune autre solution ! Il y a eu un effet relatif du confinement sur la circulation du virus et donc un effet sur la possibilité pour le système de soin d’être relativement moins sous pression qu’il ne l’aurait été sans le confinement. Maintenant, dire que le confinement est la panacée est une grave erreur. 80% de la contamination est familiale. Le confinement est aussi un bon moyen de tenir dans la couveuse le virus et de le faire circuler au sein de la famille. Ce n’est pas une arme absolue, loin de là.

L’opinion française a le sentiment que le politique l’a manipulée pour dissimuler ses propres défaillances (manque de masques). C’est un classique d’une période épidémique ? Dans l’histoire des épidémies, les populations se méfient toujours du pouvoir en place ou c’est nouveau ?

Ce n’est pas très nouveau mais aujourd’hui la défiance a atteint des hauteurs incroyables en France. L’opinion s’exempte facilement de ses propres responsabilités. C’est quelque chose qui a pratiquement toujours existé dans les périodes épidémiques. Simplement, dans le passé, ce n’étaient pas les politiques qui étaient visés, ils étaient protégés par leur éloignement de la population, les princes ne se mêlaient pas directement de la gestion des épidémies. En revanche, c’étaient les médecins qui étaient sous le feu de l’opinion, parce qu’ils étaient accusés de répandre eux-mêmes la mort, parce que leurs préconisations n’étaient pas efficaces, etc… Bref ! Les médecins servaient de boucs émissaires.

Donc l’opinion cherche toujours un bouc émissaire à une pandémie qui la frappe…

Absolument ! L’opinion ne cherche qu’une chose, c’est à s’exempter de ses propres responsabilités. Pourtant elle en a. Souvenez-vous du début du confinement, souvenez-vous des divers incidents, voyez aujourd’hui comment cela se passe à quelques jours du déconfinement, il y a déjà beaucoup de monde dehors. Il y a aussi cette fameuse défiance qui n’est pas circonscrite au problème de santé publique et dont il faudra chercher l’origine.

Vous avez compris, vous, ce qui avait pu se passer avec ce stock de masques disparu ? L’historien de la santé que vous êtes dispose-t-il d’éléments de compréhension ?

Là aussi, on nage dans l’hypocrisie. Les mêmes qui crient aujourd’hui « des masques ! On veut des masques ! » sont ceux qui ont injurié et insulté Roselyne Bachelot parce qu’elle aurait, paraît-il, jeté l’argent public par les fenêtres. Que s’est-il passé ? Il s’est passé que les diverses administrations ou divers gouvernements, ayant vu la façon dont Roselyne Bachelot était traitée, se sont dit qu’ils ne voulaient pas vivre la même chose et que puisque l’opinion ne veut pas que l’Etat stocke du matériel médical (masques, vaccins…) parce que cela coûte prétendument trop cher, et bien on va cesser de le stocker et les gens iront acheter leur vaccin ou leur masque à la pharmacie.

Donc si je vous comprends bien, cette pénurie de masques serait un peu la faute de l’opinion là aussi ?

Oui, il y a une responsabilité partagée bien sûr ! Dans l’autre sens également. En 2006, il y a eu une série d’études lancée par des gens tout à fait qualifiés dont l’Académie des Sciences des Etats-Unis par exemple, sur l’efficacité du masque chirurgical. Ces diverses études, j’en connais au moins une trentaine, ont toutes conclu à l’efficacité extrêmement relative de ce masque chirurgical qui pouvait protéger les autres de vos propres postillons si vous étiez malade, mais en sens inverse, cela ne marchait pas aussi bien. Donc l’idée, c’était que les masques dans la rue et à bonne distance du voisin étaient totalement inutiles. C’est cette doctrine-là qui a été reprise au début de l’actuelle pandémie. Jusqu’au moment où d’autres études sont sorties et qui ont conclu à exactement l’inverse, elles ont conclu à la nécessité du masque. Alors quel est le problème ? Le problème c’est celui des asymptomatiques. On s’est aperçu au cours de cette pandémie que les asymptomatiques avaient un rôle disproportionné dans la circulation du virus et la contamination. On s’est donc dit qu’il fallait conseiller à tout le monde de porter un masque parce que les asymptomatiques, vous ne pouvez pas les repérer. C’est véritablement un gros problème qui revient en vagues lors des épidémies respiratoires au moins depuis la fin du XXème siècle. C’est ce que j’appellerais la « police des asymptomatiques », c’est-à-dire l’idée de réduire leur capacité de contamination.

Le politique et le corps médical ont semble-t-il été des partenaires. Est-ce que cela a toujours été le cas lors des crises sanitaires passées ?

En 2009, l’organisation consistait à créer une cellule interministérielle de crise qui était sous la présidence du ministre de l’Intérieur ou du Premier ministre. Le ministère de la Santé n’avait qu’un rôle effacé dans cette affaire. Aujourd’hui, c’est tout à fait différent, on a une gestion technique qui est là, bien présente, présente comme elle doit l’être. Et je vous signale quand même que cette fameuse « République des experts » dont on se plaint n’est pas tout à fait une réalité. Le Président de la République n’a par exemple, pas suivi les avis de son Conseil scientifique en ce qui concerne le confinement des personnes de plus de 65 ans. Il y a un moment où le politique et l’expert se séparent. Si vous écoutez les experts et notamment les épidémiologistes, l’idée c’est : confinement jusqu’au vaccin. Cela peut durer 18 mois, 20 mois ou plus. C’est évidemment impraticable, c’est impossible !

Emmanuel Macron n’a pas non plus écouté l’avis du Conseil scientifique pour la date d’un déconfinement le 11 mai. Il a bel et bien fait un choix politique, il a tenté de trouver un équilibre entre nécessités économiques et sanitaires…

Vous avez parfaitement raison. Je pense qu’il y a eu une première période où le politique a suivi de très près les avis des experts et notamment du Conseil scientifique. Mais depuis ce choix du 11 mai et de ne pas obliger les personnes de plus de 65 ans à rester confinées, on est dans une autre période où l’on a un chemin parallèle entre experts d’un côté et politiques de l’autre mais où les politiques ne se sentent plus obligés de se conformer aux recommandations des experts.

Est-ce que ce n’est pas aussi parce que le politique a constaté, voire découvert, les dissensions au sein de ce corps scientifique ? Le grand public le découvre peut-être un peu mais le monde médical est plein de débats et de désaccords ?

Cela s’appelle la science ! Ça marche à coups de controverses. Le débat et les dissensions sont vitaux pour le progrès scientifique. Alors évidemment, lorsqu’on a une pandémie à gérer, cela peut être gênant. Mais celui qui décide en dernière instance, c’est le politique, c’est justement son rôle, ce n’est pas le scientifique. Les scientifiques ont comme obligation de recommander au pouvoir politique des mesures qui leur semblent importantes, ensuite le politique suit ou ne suit pas.

Mais si les recommandations diffèrent selon les scientifiques ou les écoles, comment prendre la bonne décision ? Pour gérer une telle crise, on a besoin de clarté…

Absolument ! C’est pour cela qu’on a besoin de politiques de qualité et c’est peut-être là où est problème aujourd’hui…

C’est-à-dire ?

Le politique de bonne qualité, c’est celui qui sait prendre l’avis des experts mais qui n’est pas inféodé à leurs recommandations, c’est celui qui est capable de prendre lui-même des décisions sur une base de réflexion qui tient compte de l’expertise et de la technique mais qui n’en est pas totalement esclave.

Beaucoup de reproches ont aussi été faits à l’OMS. L’organisation mondiale de la santé vous a-t-elle semblé à la hauteur ? Dans l’histoire avait-elle été autant critiquée ?

Dans l’histoire récente de l’OMS, il y a trois étapes. La première étape, c’est 2003 avec le SRAS. La direction chinoise a caché pendant plusieurs mois l’importance de l’épidémie en Chine à l’OMS comme au reste du monde. Et ce qui s’est passé, c’est qu’il y a eu une petite équipe d’épidémiologistes, emmenée par David Heymann, qui a décidé de passer par-dessus les procédures habituelles de l’OMS, qui doit normalement passer pour tout ce qu’elle fait par les gouvernements. Je rappelle que l’OMS n’est pas une organisation internationale, c’est une organisation inter-gouvernementale, ce sont les Etats qui ont la main. Et bien cette équipe de jeunes épidémiologistes, soutenue par la directrice d’alors, Madame Brundtland, s’est gaiement exemptée des procédures habituelles et est arrivée à faire en sorte que la direction chinoise avoue l’ampleur des dégâts causés par le SARS-Cov-1. A ce moment-là, l’OMS sort avec un capital de prestige absolument incroyable. Ce prestige a ensuite été remis en jeu et un peu écorné en 2009, au moment de la grippe H1N1, avec Madame Chan (à la tête de l’OMS) qui n’a pas géré la crise de manière brillante. Ce capital de prestige s’est ensuite totalement effondré avec Ebola en Afrique de l’Ouest en 2014-2015 et l’absence totale de réactivité de l’OMS.

Donc avant cette crise, l’OMS partait déjà mal si je comprends bien…

Elle partait déjà mal, en effet. Aujourd’hui qu’est-ce qui s’est passé ? L’OMS a donné l’impression, mais ce n’est pas qu’une impression, de courber l’échine devant la Chine. C’est quelque chose qu’on peut lui reprocher et qui vient de deux choses : d’une part les Etats-Unis ont démissionné, Trump est une véritable calamité à lui tout seul, les Américains ont perdu le leadership mondial en matière de santé publique internationale, et la Chine a pris leur place ou en tous cas, fait tout pour la prendre. L’OMS, qui est quand même assez faible face à un géant comme la Chine, a été obligée de courber la tête en distribuant des récompenses symboliques à la Chine absolument inutiles et en retardant au départ le processus de mobilisation. On est passé par une phase où la direction chinoise a de nouveau tenté de minimiser les choses et l’OMS n’a pas réagi ou pas assez vite. La conclusion de tout cela, c’est qu’une réforme de l’OMS me semble absolument indispensable. On doit passer d’une organisation intergouvernementale à une organisation internationale.

Combien faudra-t-il de mois ou d’années pour retrouver une vie sans gestes-barrières et sans masques ? Ou peut-être faudra-t-il tirer un trait sur cette vie d’avant ?

C’est impossible à dire pour une raison bien simple, c’est qu’il faudrait pour répondre à votre question, connaître l’évolution du virus. On ne la connaît pas. Est-ce que cela va faire comme les grippes par exemple ? Est-ce que ce virus a donné une pandémie parce qu’on ne le connaît pas et qu’ensuite il s’endémise, il revient tous les ans mais sous des formes beaucoup moins paroxystiques ? Est-ce que le SARS-Cov-2 va suivre ce chemin ou totalement disparaître comme le SARS-Cov-1 de 2003 ? On n’en sait strictement rien !

Mais est-ce qu’il ne faudrait pas par exemple que les sociétés occidentales imitent certaines sociétés asiatiques en portant des masques beaucoup plus fréquemment ? 

Ce n’est pas une question de masques. Le masque n’a qu’une utilité très relative, je l’ai dit. Le problème est dans les gestes-barrières et c’est extrêmement délicat à appliquer (transports, écoles…), c’est très difficile de conserver une discipline prophylactique (qui prévient la maladie, ndlr) dans nos conditions de vie et ce n’est pas une question de suivre des règles ou pas, d’obéir ou de ne pas obéir, c’est vraiment un problème pratique. Il va falloir innover dans les façons dont nous bougeons, dont nous nous croisons. Ce n’est pas demain la veille qu’on va retrouver une complète sérénité.

L’histoire est jalonnée de crises sanitaires. Certains disent qu’elles seront plus fréquentes encore à l’avenir. Vous le pensez aussi ? 

Je n’en sais strictement rien, je ne suis pas prophète mais effectivement les crises sanitaires, ce n’est pas ce qui manque dans l’histoire. Simplement, des crises sanitaires avec toutes ces conséquences économiques et géopolitiques, de l’ampleur et de la magnitude de celle d’aujourd’hui, il n’y en a pas souvent !

On craint tous une deuxième vague. Dans le passé, les épidémies ont-elles toujours eu plusieurs vagues ? Plusieurs répliques ?

Non pas toujours mais souvent, et en général la deuxième vague est beaucoup plus méchante que la première. On a plusieurs exemples dans l’histoire, la grippe espagnole notamment. Première vague au printemps 1918 avec beaucoup de cas mais très peu de morts. Et puis tout d’un coup, fin août jusqu’à fin novembre, une autre vague létale avec énormément de victimes et de décès. On ne sait pas l’expliquer. On ne sait pas si c’est parce que le virus du printemps aurait muté ou bien si c’est parce qu’il y a eu deux virus. On ne le sait pas et on ne le saura jamais parce qu’on a des échantillons du virus de l’automne, de la vague létale, conservé dans des musées de biologie aux Etats-Unis notamment, mais on n’a pas le virus de la première vague, celle qui faisait des malades plutôt que des morts. Donc on ne peut pas comparer.

Le SRAS a aussi donné ce genre de surprises. A Toronto, entre mi-mars et mi-avril 2003, une première vague avec une épidémie essentiellement nosocomiale, c’est-à-dire hospitalière, fait énormément de victimes, puis le pic est passé et on est revenu à une situation plus ou moins normale. Les habitants de Toronto se croyaient définitivement à l’abri, et puis tout d’un coup, entre mi-juin et mi-juillet, il y a eu une seconde vague. Tous les cas de figure sont envisageables.

Avez-vous des exemples où il n’y a pas eu de seconde vague ?

[Temps de réflexion] Il y en a certainement mais je n’en vois pas. Les grippes pandémiques de 1957-1959 et de 1968-1970, il y a eu aussi deux vagues. C’est assez courant, c’est vrai, mais ce n’est pas obligatoire.

 

Relire notre entretien avec : Jérôme Fourquet : « Les fractures françaises n’ont pas disparu avec le Covid »

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