Quartier multiculturel et cosmopolite de Belleville, au Nord Est de Paris. Sur ces terres traditionnellement acquises au Parti Socialiste, François Hollande est arrivé en tête en 2012 avec plus de 40% des suffrages. Cinq ans plus tard, les choses ont changé, Jean-Luc Mélenchon a détrôné le candidat PS. Avec plus de 30% des voix, il est arrivé premier dans les 19e et 20e arrondissements, et second dans les 10e et 11e, derrière Emmanuel Macron.
A quelques pas du métro Belleville, en bas de la rue Sainte-Marthe, la terrasse de « la Sardine » est bondée. Cette jeunesse, en majorité convaincue par le candidat de la « France insoumise» est venue attendre les résultats au soleil. Tables et chaises en fer sont disposés un peu partout. A 18h30, il devient même difficile de trouver encore une petite place de libre. Les commentaires vont bon train autour des tables, la soirée électorale est suivie de près, la radio associative « Radio Campus Paris » a même investi les lieux.
La Sardine, dans le 10e arrondissement de Paris
Comme un tiers des 18-24ans, Louanne, a voté Jean Luc Mélenchon. A quelques heures des résultats, cette étudiante en 2e année à l’école du Louvre croit encore en la "remontada" de son candidat et n’imagine pas un second tour avec Marine Le Pen. Elle qui, au départ, voulait voter pour le candidat socialiste s’est finalement reportée sur Jean-Luc Mélenchon, influencée par les derniers sondages. Un « vote utile » pour faire gagner la gauche.
Louanne, 20 ans, étudiante en 2e année à l'Ecole du Louvre
Sur la terrasse, Farah, 21 ans, elle aussi, nous raconte aussi sa première campagne présidentielle. Cette étudiante en droit public revient d’un stage de six mois à Londres et elle ne s’est intéressée à la campagne que tardivement. Dans la presse britannique, « le suivi de la campagne tourne beaucoup autour des scandales » témoigne t-elle, « pas beaucoup de fond, pas beaucoup de représentativité. Beaucoup d’Anglais ne savaient même pas qu’il y avait 11 candidats ». Résultat, après avoir lu tous les programmes ces derniers jours – « oui, c’est long » nous confirme-t-elle en souriant -, elle a pris sa décision. Finalement c’est Jean-Luc Mélenchon qui l’a convaincu. « Un bon tribun, un bon programme, surtout sur l’écologie et les universités publiques » explique-t-elle, mais ce sont surtout ses positions sur l’Europe qui l’ont séduite. Pour elle, « le traité de Maastricht est fondé sur des critères économiques obsolètes qui rendent aberrante la gestion de la dette ». Les renégociations des traités européens promises par le candidat semblent donc avoir trouvé ici un écho, lui qui en était pourtant l’un des défenseurs en 1992.
Farah, 21 ans, étudiante en droit public
Contrairement à Farah, Ugolin a « très mal vécu cette campagne » avant de découvrir les vidéos de Jean-Luc Mélenchon sur Internet. Le candidat, très présent sur cette plateforme avec 300 000 abonnés sur sa chaine Youtube, a réussi par ce biais à redorer son image auprès du jeune homme. « Je le connaissais en 2012 et le voyais encore comme un gros braillard, un vieux grand père qui t’engeule dès que tu ne penses pas comme il faut ! » se souvient Ugolin. A quelques mois près il n’avait pas pu participer à l’élection de 2012, « je m’en mords les doigts depuis, même si j’aurais fait alors partie des déçus de Hollande. Primo-votant cette année, il a donc glissé un bulletin de la «France Insoumise » dimanche après-midi.
Erwan, 22 ans, étudiant en Communication
La campagne numérique de Jean-Luc Mélenchon a beaucoup participé à son succès auprès des jeunes nous confirme Erwan, 22 ans, venu animer l’émission de Radio Campus Paris. Pour lui, cette campagne signe « l’échec des médias traditionnels et de la télé en particulier ». Pourtant, « le débat d’idées a bien eu lieu » estime t il, « mais pas forcément là où on l’attendait ». Il s’est lui aussi politisé sur Internet, après avoir regardé sa première vidéo de Jean Luc Mélenchon l’été dernier. Issu d’une famille « plutôt à gauche », il a senti la déception de son père après les 5 années du quinquennat de François Hollande. Il s’est lui détourné de la gauche traditionnelle. Par conviction, il aurait voté Nathalie Arthaud ou Philippe Poutou, mais « le vote utile de la gauche c’est Jean Luc Mélenchon » analyse Erwan, écartant d’emblée l’option Emmanuel Macron.
Après les résultats, la déception se lit sur tous les visages. Laissés sans consigne de vote par leur candidat, ces primo-votants sont divisés pour le second tour. Certains, comme Louanne se résignent, à contre-cœur, à voter Emmanuel Macron au second tour, pour faire barrage au FN. Une option rejetée par Ugolin « le vote utile n’existe pas » assène t-il « pas question de reproduire le même scénario qu’en 2002, mieux vaut Marine le Pen au pouvoir et une révolte contre le sytème dans la rue ».
Ugolin, 22 ans, technicien ingénieur du son