Retraites : que font nos voisins européens ?

Retraites : que font nos voisins européens ?

La France n’est pas la seule à faire face au vieillissement de sa population, et les systèmes de retraite de ses voisins européens évoluent eux aussi, au fur et à mesure des années. Alors que le gouvernement va présenter une nouvelle réforme des retraites qui pourrait reculer l’âge légal de départ à 65 ans. Tour d’horizon des différents systèmes et réformes adoptées ces dernières années.
Public Sénat

Par Clara Robert-Motta

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62 ans, 65 ans et trois mois, ou même 69 ans… L’âge de départ à la retraite fluctue selon les pays européens, parfois même selon le sexe, le nombre d’enfants élevés ou bien sûr la durée du travail. A l’aune d’une réforme annoncée par le gouvernement qui pourrait faire reculer l’âge de départ à la retraite à 65 ans, jetons un œil aux réformes prises ces derniers temps chez nos plus proches voisins.

 

En Europe, une personne sur cinq est âgée de plus de 65 ans et la part du nombre de retraités ne cesse d’augmenter. Dans l’optique d’équilibrer le nombre de pensionnés à soutenir et le nombre de cotisants, plusieurs pays ont fait le choix de retarder l’âge de départ à la retraite et d’engager des réformes.

« Les pays européens ont pris des réformes plus ou moins tardives pour résoudre un déficit budgétaire, retrace Monika Queisser, cheffe de la division des politiques sociales à l’OCDE. Trois solutions s’offrent à eux : soit augmenter les recettes - par les cotisations ou les impôts -, soit baisser les prestations, soit faire des réformes afin que les gens travaillent plus longtemps. »

 

  • Allemagne, le niveau de vie des retraités pose problème

En Allemagne, une réforme a légalement repoussé l’âge de départ à la retraite à 67 ans depuis 2012 et jusqu’en 2031. Mais si le chancelier Olaf Schulz a promis de ne pas toucher à cet âge, les économistes de la Banque centrale allemande ont, eux, recommandé de le porter à 69 ans pour les actifs nés après 2001. Un dossier qui pourrait être explosif en cet automne alors que l’inflation échauffe déjà les esprits. D’autant qu’en Allemagne, les pensions de retraite ne sont pas indexées sur l’inflation, ce qui rend les retraités plus sensibles à l’augmentation du coût de la vie.

 

  • Un report progressif en Angleterre

Chez les Anglais, il existe une pension d’Etat minimum d’environ 8 750 livres (10 500 euros) par an à laquelle s’ajoutent des fonds de pension privés. En 2020, l’allongement du départ légal à taux plein a été reculé à 66 ans, et il pourrait atteindre 68 ans en 2044 selon le niveau d’espérance de vie.

 

  • Rétropédalage italien sur l’âge de départ

Du côté de l’Italie, la question des retraites fait des allers-retours. Après avoir repoussé l’âge de la retraite à 67 ans pour les hommes et 66 ans et 7 mois pour les femmes en 2011, l’Italie a tenté d’assouplir cette règle. En 2019, les Italiens ont instauré un « quota 100 » : si l’addition de votre âge et du nombre d’années travaillées équivaut à 100, vous pouvez prendre une retraite anticipée (par exemple une personne de 65 ans ayant cotisé 35 années pourra prendre sa retraite anticipée). Pour autant, l’ancien président du Conseil des ministres, Mario Draghi, a mis fin à cette expérimentation en raison d’un coût trop important, et l’âge légal reste donc à 67 ans.

 

  • Dix années de négociations aux Pays-Bas

Si le système de retraites aux Pays-Bas est considéré comme l’un des plus généreux en Europe, l’âge légal a été reculé à 67 ans depuis une réforme de 2019 sur laquelle ont planché entreprises et partenaires sociaux pendant près de 10 ans. Le principe de solidarité entre générations qui prévalait s’efface au profit des fonds de pension. Un salaire de base est assuré pour les retraités, auquel s’ajoute une retraite qui correspond à 70 % de leur dernier salaire. Le montant des retraites versées par les fonds de pension pourra fluctuer selon la conjoncture économique et monétaire.

 

  • Les Espagnols devront-ils cotiser plus ?

Pour renflouer sa caisse de réserve des retraites, l’Espagne avait décidé l’année dernière une hausse temporaire des cotisations. Ce qui avait été jugé insuffisant par certains experts, reste l’objet de discussions intenses avec les partenaires sociaux. Il est notamment question d’inciter financièrement les Espagnols à moins prendre de retraites anticipées. En 2021, l’âge de départ à la retraite a également été revu à la hausse, il augmentera ainsi régulièrement chaque année jusqu’à atteindre 67 ans en 2027.

 

  • Belgique : report de l’âge légal et nouveaux critères pour une pension minimale

Nos voisins belges ont aussi connu leur propre réforme des retraites, dont le deuxième acte a eu lieu cet été. Dans leur système par répartition, l’âge légal pour être pensionné à temps plein a été avancé de 65 ans (à partir de 45 années de cotisation) à 66 ans en 2025 et 67 ans en 2030.

Les règles pour prendre une retraite anticipée ont été durcies. S’il n’est pas interdit de s’arrêter avant, la pension ne sera versée qu’à partir du moment où le retraité atteint l’âge légal de départ et son montant sera impacté. Une autre nouveauté de la réforme : l’accès à la pension minimum est désormais soumis à 20 ans de carrière effective. Afin que le travail à temps partiel soit mieux pris en compte, les Belges ont décidé qu’il fallait travailler au moins quatre cinquième du temps sur un an pour que cela compte comme une année de cotisation.
 

  • Les Suisses ont dit « oui » à la réforme des retraites !

Après deux « non » en 2004 et en 2017, c’est avec une courte majorité (51 %) que les Suisses ont approuvé, par référendum, un projet qui veut rééquilibrer les finances des retraites, en septembre 2022. L’âge de départ à la retraite des femmes sera aligné sur celui des hommes : 65 ans. Cette réforme doit aussi relever la TVA pour augmenter les recettes.

 

  • Un système suédois basé sur les comptes notionnels

La Suède a fait une réforme spectaculaire en 1994 en repensant toute l’organisation. Le système par répartition d’alors, où le niveau des pensions est indexé sur les quinze meilleures années, est considéré comme trop généreux. Jugé insoutenable, il a été abandonné au profit d’un régime universel où chaque couronne cotisée ouvre les mêmes droits. Souvent cité comme modèle à suivre, il est aujourd’hui sous le feu des critiques, car le niveau général des pensions baisse.

Selon le Conseil d’orientation des retraites, « le coût total des dépenses liées à l’âge, qui représentait 24 % du PIB en 2019, devrait augmenter de 1,9 point de PIB dans l’UE d’ici 2070 ». Mais tous les pays ne seront pas logés à la même enseigne : la France (avec l’Espagne et l’Italie) fait partie des pays dans lesquels ces dépenses devraient baisser, à la différence de l’Allemagne, de la Belgique et des Pays-Bas pour lesquels la croissance des dépenses serait supérieure à 3 points de PIB.

La France, dont l’âge de départ à la retraite est effectivement le plus bas des pays européens, continue donc de plancher sur sa propre réforme. Sa présentation initialement prévue le 15 décembre a été reportée au 10 janvier pour un passage en conseil des ministres le 23 janvier, et devant le Parlement à l’été.

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