Situation étudiante : « Emmanuel Macron ne répond pas aux enjeux à venir », alerte Laurent Lafon

Situation étudiante : « Emmanuel Macron ne répond pas aux enjeux à venir », alerte Laurent Lafon

Tandis que le président de la République a annoncé la mise en place de mesures supplémentaires pour faire face à la détresse des étudiants, les sénateurs réclament une vision sur le long terme et une prise en compte des enjeux à venir.
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Le sujet montait depuis plusieurs semaines dans les rangs des deux assemblées. Ce mercredi, à l’occasion de la séance hebdomadaire des questions d’actualité au gouvernement, Jean Castex a d’ailleurs supplanté la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, interpellée sur cette question. « La cause des étudiants et de la jeunesse préoccupe le gouvernement, nous agissons, nous allons continuer à agir mais nous devons le faire de manière extrêmement responsable et raisonnable », a-t-il assuré, indiquant que les mesures d’accompagnement des étudiants seraient renforcées. C’est chose faite, ce jeudi. En visite à l’université Paris-Saclay, Emmanuel Macron, face au malaise étudiant grandissant, s’est saisi de la question.

Au cours d’un échange avec les étudiants de l’établissement, le chef de l’Etat a tenu à rappeler, prenant le contrepied des propos de sa ministre de l’Enseignement supérieur, que les étudiants avaient « les mêmes droits que les salariés ». « S’il en a besoin, il doit pouvoir revenir à l’université un jour par semaine » dans des amphis avec une jauge maximum de 20 %. « Un étudiant ou une étudiante a le droit d’avoir 20 % de son temps en présentiel - c’est-à-dire un jour sur cinq - et on doit essayer de tenir aussi pour que les jauges ne soient jamais plus de 20 %, ce qui permet d’avoir des distances, et aussi de ne pas avoir trop de monde sur un site », a détaillé le chef de l’Etat. Jusqu’alors n’était prévu que le retour en présentiel, à compter du 25 janvier et sous certaines conditions, des étudiants de première année.

Des repas à 1€ pour tous les étudiants

« C’est un désaveu clair des propos de sa ministre », réagit le sénateur communiste Pierre Ouzoulias. « Il était temps que l’exécutif s’empare du sujet. La crise est devenue trop sérieuse pour laisser Mme Vidal la gérer comme elle le fait, avec un niveau d’impréparation, d’improvisation et de rupture totale par rapport au mal-être des étudiants qui devient un scandale d’état. » Pour autant, Emmanuel Macron a prévenu : « Il n’y aura pas de retour à la normale au deuxième semestre ». Les étudiants ne retourneront donc pas sur les bancs de la fac dans des conditions normales cette année. « Le président de la République donne de la visibilité, et c’est plutôt courageux de sa part », réagit le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat Laurent Lafon. « Mais c’est aussi très inquiétant. Le fait qu’il n’y ait pas de retour à la normale signifie qu’une année entière de la vie des étudiants sera mise à mal. C’est une situation inédite qui va nécessiter une mobilisation très forte pour accompagner ces étudiants. »

Et pour répondre à la détresse économique et psychologique des étudiants mise à jour par de nombreux parlementaires, Emmanuel Macron a annoncé deux mesures principales. La possibilité, d’abord, pour l’ensemble des étudiants d’accéder à deux repas par jour pour le prix d’un euro dans les restaurants universitaires, alors que ce dispositif était jusqu’alors réservé aux boursiers. « C’est un très beau symbole d’avoir obtenu ces repas à un euro pour l’ensemble des étudiants », commente la sénatrice Les Républicains Laure Darcos. « C’est une bonne chose quand on sait que la plupart des étudiants, privés de petit boulot, se retrouvent actuellement sans ressources. »

Les éléments de réponse dont dispose le gouvernement ne sont pas adaptés à l’ampleur de la crise universitaire

Le chef de l’Etat a par ailleurs annoncé la création d’un « chèque psy » pour permettre aux étudiants en situation de détresse psychologique de pouvoir consulter un psychologue et de suivre des soins. « C’est une mesure qui va dans le bon sens », assure la sénatrice LR. « Le problème, cependant, va être de trouver des psychologues disponibles, car on sait qu’il y a actuellement une vraie pénurie. » « Les annonces du président sont très fortes », réagit pour sa part le sénateur de la majorité Julien Bargeton. « Ce sont des gestes attendus. Et au-delà de ces mesures puissantes, Emmanuel Macron a montré qu’il avait saisi l’ampleur de la situation que vivaient les étudiants de notre pays. »

Un constat que tous les membres de la Haute chambre ne partagent pas. « Je regrette qu’on ne nous ait pas écoutés, depuis le temps que nous alertons sur le sujet », tacle Pierre Ouzoulias. « Quand le Parlement aborde des questions essentielles, le gouvernement ne l’écoute pas et attend que la situation empire pour commencer à agir. Ici il a tardé de façon coupable, car un niveau de douleur psychique aurait pu être évité. » Et si les mesures annoncées par le président sont plutôt bien accueillies, les sénateurs posent la question de la suite. « Emmanuel Macron ne répond pas aux enjeux qui vont se poser », alerte Laurent Lafon. « Comment faire en sorte qu’il y ait une acquisition des savoirs pendant cette année ? Comment éviter les décrochages ? Pour l’instant on voit que les éléments de réponse dont dispose le gouvernement ne sont pas adaptés à l’ampleur de la crise universitaire », déplore le sénateur.

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