Tirage au sort, agenda, méthodologie… les contours de la convention citoyenne sur la fin de vie se précisent

Tirage au sort, agenda, méthodologie… les contours de la convention citoyenne sur la fin de vie se précisent

150 Français seront tirés au sort cet automne pour plancher sur une éventuelle transformation de la législation sur l’accompagnement de la fin de vie. Leurs conclusions sont attendues pour la mi-mars, elles pourraient aboutir à un texte de loi, voire à un référendum.
Romain David

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« C’est un sujet qui nous concerne tous, qui touche à la fois à l’intime et à l’ultime ». Thierry Beaudet, le président du Conseil économique, sociale et écologique (Cese) a présenté jeudi en conférence de presse le Comité de gouvernance de la future convention citoyenne sur la fin de vie. C’est le Cese, conformément à son rôle d’intermédiaire entre les pouvoirs publics et la société civile, qui a été chargé de mettre en place cette assemblée de citoyens voulue par Emmanuel Macron pour réfléchir à une éventuelle évolution de la législation sur la fin de vie. « Je suis convaincu que les citoyens tirés au sort sauront faire émerger les questions sensibles et tirer les conclusions nécessaires », a encore estimé Thierry Beaudet. Leurs travaux vont s’étaler sur un peu plus de trois mois. Plusieurs précisions ont été apportées ce jeudi sur leur déroulé.

  • De quelle manière les participants sont-ils sélectionnés ?

La convention citoyenne sera composée de 150 citoyens tirés au sort à partir des listes d’abonnés téléphoniques. Des numéros de portable seront également générés de manière aléatoire. Ce tirage au sort doit débuter à partir de la mi-octobre. Toute personne majeure résident en France est susceptible d’être contactée.

Des critères de pondération, fondés sur le genre, l’âge, le lieu d’habitation et la catégorie socioprofessionnelle restent encore à déterminer. En revanche, les membres du comité de gouvernance se sont d’ores et déjà accordés pour ne pas retenir de critère excluant, après s’être interrogés sur la pertinence de laisser certains profils, par exemple des soignants ou des militants, intégrer le panel. « Faut-il exclure certaines personnes au motif de leur religion, de leur métier ou d’une expérience personnelle récente ? Nous aurons un panel qui offre une diversité de points de vue. Tant qu’il n’y a pas de personnalité écrasante ou qui exerce une autorité sur les autres… Mais on ne peut pas demander aux gens de mettre leur personnalité de côté en arrivant », explique Claire Thoury, la présidente du comité de gouvernance.

  • Quand se réunira la convention ?

La convention citoyenne sur la fin de vie se réunira à partir du 9 décembre prochain et clôturera ses travaux le 19 mars 2023. Les citoyens sélectionnés se rassembleront trois jours par semaine ou toutes les deux semaines, le vendredi, le samedi et le dimanche, avec une probable césure pendant les vacances de Noël.

Ils bénéficieront d’une prise en charge pour le logement et leurs déplacements, mais aussi d’une indemnité de participation. Le Cese mettra à leur disposition des justificatifs à destination des employeurs. « Nous n’avons pas de pouvoir de convocation. C’est à nous de parler avec eux, de garder le lien pour les convaincre de venir », explique Kenza Occansey, vice-président du Cese et membre du comité de gouvernance de la convention citoyenne.

  • Quel est le rôle du comité de gouvernance ?

Le comité de gouvernance est chargé d’organiser les travaux, de veiller au bon déroulé et à la transparence de la convention en garantissant l’expression des avis et en apportant une méthodologie. En revanche, « nous ne participerons pas aux débats ni à l’élaboration de la réponse. Nous n’avons pas vocation à intervenir dans les discussions de fond », souligne Claire Thoury.

Il se compose de 14 membres, parmi lesquels 6 membres du Cese, plusieurs personnalités reconnues comme Jean-François Delfraissy, le président du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), et la philosophe Cynthia Fleury, ou encore deux enseignantes-chercheuses, Hélène Landemore et Sandrine Rui, spécialistes de la démocratie participative.

Notons également la présence de deux anciens membres de la convention citoyenne sur le climat, chargés d’apporter un retour d’expérience sur les bonnes pratiques et les écueils de l’exercice.

>> Lire notre article - Fin de vie : « Cette idée de convention citoyenne, c’est du temps perdu », regrette Jonathan Denis, président de l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité

  • Comment les citoyens vont-ils travailler ?

Les citoyens devront répondre à la question suivante : « Le cadre de l’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations individuelles rencontrées, ou d’éventuels changements doivent-ils être introduits ? »

L’agenda de la Convention est divisé en trois temps. Les deux premières sessions seront l’occasion pour les participants d’un premier contact et d’une appropriation de leur mission. Suivront six séquences de « délibération », vraisemblablement étalées de janvier à février, avec la mise en place de sous-groupes thématiques. Enfin, les dernières réunions seront consacrées à la « restitution « des travaux.

Le Cese prévoit d’organiser une série d’auditions : professionnels de la santé ou personnalités scientifiques, personnes déjà confrontées à la fin de vie d’un proche ou encore associatifs. « On ne part pas de zéro. Il y a plein d’études sur le sujet. La montée en compétences des citoyens de la convention passera par ces rencontres et ces moments d’information », fait valoir Giovanna Marsico, directrice du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), également membre du comité de gouvernance.  « Nous allons mettre les citoyens en position de débattre sur ce sujet. Il s’agit d’un exercice démocratique extrêmement exigeant, dont l’objectif est de faire en sorte que les travaux qui en sortent ne soient pas délégitimés », abonde Kenza Occansey.

  • Quelles suites seront données aux travaux de la convention ?

En parallèle de la convention citoyenne, Emmanuel Macron a chargé Agnès Firmin Le Bodo, la ministre de l’organisation territoriale et des professions de santé, de mener une grande concertation des parties prenantes : professionnels, associations et parlementaires. « Idéalement, il faudrait que ces travaux aient lieu avant le début de la convention, afin qu’ils puissent être versés à la réflexion des citoyens », glisse Claire Thoury. La présence au sein du comité de gouvernance de certaines personnalités reçues par l’exécutif, comme Giovanna Marsico et Jean-François Delfraissy, devrait permettre d’installer des « ponts » entre la convention et le gouvernement.

La déception suscitée par la convention citoyenne sur le climat reste dans les mémoires, alors que certaines de ses propositions ont été écartées d’emblée par le président de la République, d’autres retoquées par le Parlement. « Une parole a été donnée, et n’a pas été tenue », regrette Jean-Pierre Cabrol, l’un de ses membres. « Mais il en est quand même sorti une loi Climat et Résilience. » Cette fois, l’exécutif a préparé le terrain : le texte sur la fin de vie produit par ces 150 citoyens sera examiné par le Parlement, ou bien soumis à référendum. « Nous ne sommes pas garants de ce qui se passera derrière », conclut Claire Thoury.

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