Total va renoncer au pétrole russe d’ici fin 2022, mais poursuit ses activités dans le gaz
TotalEnergies a annoncé mardi soir arrêter d’acheter du pétrole russe « au plus tard à la fin de l’année 2022. » Un changement d’attitude pour un groupe qui avait jusqu’ici simplement gelé ses investissements, mais qui ne concerne pas le gaz, qui constitue l’immense majorité des activités de TotalEnergies en Russie.

Total va renoncer au pétrole russe d’ici fin 2022, mais poursuit ses activités dans le gaz

TotalEnergies a annoncé mardi soir arrêter d’acheter du pétrole russe « au plus tard à la fin de l’année 2022. » Un changement d’attitude pour un groupe qui avait jusqu’ici simplement gelé ses investissements, mais qui ne concerne pas le gaz, qui constitue l’immense majorité des activités de TotalEnergies en Russie.
Louis Mollier-Sabet

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Il y a 3 semaines, au début de l’invasion russe en Ukraine, TotalEnergies restait ferme sur ses positions, alors que de nombreux grands groupes énergétiques, comme BP ou Shell, avaient annoncé retirer la majeure partie de leurs activités de Russie. Le groupe avait promis de ne plus apporter de capital à des nouveaux projets en Russie, sans pour autant envisager de « cesser ses engagements. » Face à la pression médiatique et politique, la position du groupe a cependant évolué avec ce communiqué datant de mardi soir, où TotalEnergies annonce arrêter ses « achats de pétrole ou de produits pétroliers russes, dans les meilleurs délais et au plus tard à la fin de l’année 2022. » Le groupe mise sur un approvisionnement en pétrole via la Pologne et en gazole via la raffinerie saoudienne de Satorp pour compenser ce choix.

« La Russie c’était 5 % de notre cash flow, ce n’est pas nul, c’était 10 % de notre résultat, c’est des réserves importantes mais il se trouve qu’elles ne rapportent pas beaucoup d’argent », a précisé Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies, sur RTL ce mercredi matin. « C’est une décision raisonnable face à un conflit d’une gravité exceptionnelle » juge Jean-François Husson, rapporteur général LR du budget. « Certains pensent que quand il y a une guerre tout doit s’arrêter, mais je crois que Total a eu des échanges étroits avec l’Etat et avec d’autres pays européens pour développer une véritable vision politique, qui procède étape par étape », a ajouté ce spécialiste des questions énergétiques au Sénat.

» Lire aussi : La (co) dépendance énergétique de l’Europe et de la Russie en chiffres

Se retirer du gaz russe ? « Il faut être stratège et regarder à qui cela peut profiter »

La Russie, c’est aussi 16-17 % de la production d’hydrocarbures du groupe, une proportion qui a doublé en 8 ans, loin devant le Nigeria qui représente à peine 10 % de cette production. Alors comment Total pourrait-il s’en passer aussi facilement selon les mots de son PDG ? En réalité, TotalEnergies ne va pas vraiment s’en passer, puisque 80 % de la production d’hydrocarbures du groupe en Russie est en fait du gaz, et pas du pétrole. Le groupe ne renonce donc qu’à une minorité de ses activités en Russie. Et pour cause, le groupe a consenti à d’énormes investissements en Russie et a beaucoup misé sur le gaz russe dans sa stratégie de développement et de transition énergétique. Les Echos a retracé l’histoire de l’implantation du groupe dans la Russie de Poutine, sous l’impulsion du PDG de l’époque Christophe de Margerie, même après les sanctions imposées suite à l’invasion de la Crimée.

Cette invasion de l’Ukraine intervient donc au pire moment pour Total, qui a investi des milliards de dollars dans Novatek, une entreprise russe spécialisée dans le gaz naturel liquéfié, et dans le projet Arctic LNG2, avec très peu de retours sur investissement pour le moment. TotalEnergies ne touche donc pour le moment pas à ses activités gazières, et reste sur sa position de ne pas réaliser de nouveaux investissements en Russie. Patrick Pouyanné a défendu cette décision ce matin sur RTL, en expliquant d’une part que l’Europe ne pourrait se passer du gaz russe – « on ne sait pas faire » - et d’autre part qu’en renonçant au gaz, Total enrichirait en fait le régime de Vladimir Poutine. « Sur le gaz on a des contrats de long terme et on ne sait pas arrêter les contrats long terme, sauf si les gouvernements décident des sanctions […] Si j’arrête le contrat de gaz russe, vous savez ce qu’il se passe ? Je paye des milliards immédiatement aux Russes », a ainsi expliqué Patrick Pouyanné. Le groupe explique notamment qu’un retrait éventuel de Total bénéficierait soit à des oligarques russes qui récolteraient les fruits des investissements du groupe français, soit à des grands groupes chinois. « Il faut procéder étape par étape », tempère Jean-François Husson. « Si c’est pour permettre aux oligarques russes de faire fructifier leurs intérêts financiers, il faut aussi savoir être stratège et regarder à qui cela peut profiter. »

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