« Le double langage, ça suffit ! » : Arnaud Bazin, sénateur LR du Val-d’Oise, n’a pas de mots assez forts envers le gouvernement à la suite des 300 millions d’euros de coupes budgétaires, décrétées par Bercy mi-février dernier, sur la mission « Solidarité, insertion, égalité des chances », dont il est corapporteur spécial au Sénat. Une annulation de crédits « qui ressemble fort à un double jeu » selon la lettre qu’il a rédigée avec son collègue corapporteur de la mission et sénateur communiste du Nord, Éric Bocquet.
Une vive séance d’explications a opposé la commission des finances du Sénat à Bruno Le Maire et Thomas Cazenave ce 6 mars. Les deux hommes de Bercy se sont défendus de toute austérité ou insincérité budgétaire. Un débat sur des premières idées sur le budget 2025, où 20 milliards d’euros d’économies doivent désormais être dégagées, ont par ailleurs marqué la séance.
L’exécutif va agir par voie réglementaire pour mettre en œuvre ses 10 milliards d’euros d’économies annoncées en urgence sur le budget de l’Etat. La loi organique, qui encadre la procédure budgétaire, autorise ce coup de rabot, tout en fixant des limites.
Auditionné au Sénat devant la commission des affaires européennes et la commission des finances, Bruno Le Maire a souligné « l’état d’esprit très coopératif » avec l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne pour faire évoluer les règles du pacte de stabilité budgétaire. Reste désormais à convaincre les États du nord, et le temps presse.
Les perspectives de développement de l’économie française associées au budget 2024, en cours d’examen à l’Assemblée nationale, s’appuient sur des prévisions économiques relativement hautes au regard de l’inflation et du ralentissement du commerce mondial. Auditionnés mardi au Sénat, des économistes ont mis en lumière des éléments d’incertitude qui pourraient, selon eux, ne pas avoir été suffisamment pris en compte par l’exécutif.
Les sénateurs de la commission des finances restent fidèles à leur version du projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027. Dans cette nouvelle lecture qui fait suite au 49.3 à l’Assemblée nationale, la majorité sénatoriale veut rétablir son objectif d’un retour du déficit à moins de 3 % du PIB dès 2025.
Au même moment, Bruno Le Maire présentait le budget pour 2024 en Conseil des ministres et Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes et du Haut conseil des finances publiques, présentait aux sénateurs de la commission des finances son avis sur ledit budget et sur la loi de programmation des finances publiques. Au Sénat, le Haut-fonctionnaire a pointé l’optimisme des prévisions macroéconomiques du gouvernement sur ces deux textes, et a alerté sur l’augmentation « spectaculaire » de la charge de la dette.
Lors de son interview à Nouméa dans les JT de 13h de TF1 et France 2, le président Emmanuel Macron a confirmé vouloir inscrire la baisse d’impôts des classes moyennes, promise en mai dernier, dans la prochaine loi de programmation des finances publiques. Si la réitération de son engagement visait à rassurer, l’annonce laisse les sénateurs dubitatifs. Ils s’interrogent sur le financement d’une telle mesure, alors que le gouvernement fait dans le même temps le serment d’un retour à la maîtrise des dépenses publiques.
Face à la commission des finances du Sénat, le président de la Cour des comptes a considéré que l’année 2023 serait « une année blanche » en termes de redressement des finances publiques. Il a encouragé les parlementaires à se pencher sur la qualité de la dépense, mais aussi sur le niveau des niches fiscales.
La stratégie dessinée ce lundi par le gouvernement pour réduire le déficit public est accueillie avec scepticisme dans les rangs de la majorité sénatoriale. Le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (LR), se dit « très dubitatif ». Au PS, Rémi Féraud juge « affligeant » les choix proposés, notamment en matière de santé.
Le gouvernement a commencé à poser les bases de la nouvelle mouture du projet de loi de programmation des finances publiques. Si la modération dans les dépenses proposées aux collectivités locales est inférieure à l’objectif retenu pour celles de l’État, le signal provoque déjà des crispations dans les associations d’élus.