Bloqué par le Sénat, l’amendement gouvernemental qui étend le délit d’entrave à l’IVG aux sites Internet revoit le jour à l’Assemblée. Les sénateurs de droite avaient dit non à l’amendement de la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des Femmes, Laurence Rossignol, a déposé dans le cadre du projet de loi Egalité et citoyenneté. Mais les députés socialistes reviennent à la charge par une proposition de loi (PPL) visant à pénaliser les sites Internet diffusant de « fausses informations » sur l'avortement.
Interrogé par le sénateur PS Jérôme Durain, lors des questions d’actualité au gouvernement au Sénat, ce jeudi, Laurence Rossignol a sans surprise donné son soutien au texte des députés PS, dénonçant au passage à nouveau l’attitude du Sénat.
Rossignol : « Je souhaite vivement que le débat ait lieu au Sénat »
« Je regrette que le Sénat ait utilisé une procédure inédite, celle de l’irrecevabilité d’un amendement du gouvernement en commission, pour ne pas débattre de cet amendement. Je n’aurais pas été choquée que le Sénat décide de refuser cet amendement mais il eut fallu encore que le Sénat accepte d’en débattre. C’est la raison pour laquelle je soutiens la PPL déposée par les parlementaires socialistes à l’Assemblée nationale. Et je souhaite vivement que le débat ait lieu ici. Chacun pourra dire quelle est sa positon non pas sur la procédure mais sur le fond » a lancé Laurence Rossignol (voir la vidéo).
Ce à quoi le président Les Républicains du Sénat, Gérard Larcher, lui a répondu : « Et chacun pourra respecter l’article 45 de la Constitution ». Cet article dit que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». C’est ce qu’avait fait valoir la rapporteure du projet de loi Égalité et citoyenneté, l’UDI Françoise Gatel, pour rejeter l’amendement gouvernemental en commission. Il s’agissait, selon la sénatrice, d’un cavalier législatif, c'est-à-dire d’un amendement qui n’a rien à voir avec le texte d’origine. Sur le plateau de Public Sénat, Laurence Rossignol y avait plutôt vu l’influence du lobby anti-IVG sur une partie des sénateurs (voir la vidéo).
« Sites Internet manipulateurs »
Créé par une loi de 1993, le délit d'entrave sanctionnant le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher une IVG en perturbant l'accès aux établissements ou en exerçant des menaces sur le personnel ou les femmes concernées a été étendu en 2001, puis 2014. Il s’agit aujourd’hui de viser certains sites qui avancent masqués. « C’est bien de mensonge dont il s’agit quand des femmes sont attirées sur des sites Internet où elles pensent qu’elles vont trouver des informations fiables sur l’IVG (…) et là, elles vont trouver des pressions, des intimidations, des culpabilisations à leur encontre pour leur faire renoncer à l’IVG. Et il y a pour moi une différence très claire entre la liberté d’opinion et la désinformation à l’encontre des femmes » a souligné Laurence Rossignol au micro du Sénat. « C’est pour ça que j’avais déposé avec le gouvernement (…) un amendement pour étendre le délit d’entrave à ces sites Internet manipulateurs ».
La session parlementaire se termine plus tôt, en février, du fait de la campagne présidentielle. Pour être adoptée, la PPL devra être inscrite à l’ordre du jour puis examinée dans ce laps de temps.