Jour de carence : les syndicats dénoncent l’ « offensive » contre les fonctionnaires

Jour de carence : les syndicats dénoncent l’ « offensive » contre les fonctionnaires

Ce vendredi, le ministre de l’Action et des Comptes publics a confirmé la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires pendant le quinquennat et le rétablissement du jour de carence dans la fonction publique. Des mesures qui s’ajoutent à l’annonce, fin juin, du gel du point d’indice. 
Public Sénat

Par Alice Bardo

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« Il s’agit de redresser les comptes publics sans aucun alourdissement de la pression fiscale », a tenu à rappeler Gérald Darmanin pour justifier tant le rétablissement du jour de carence que la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires. Des annonces faites hier soir et confirmées ce vendredi, à l’occasion des Etats généraux des comptes de la nation, qui réunissent parlementaires, élus locaux et représentants syndicaux à Bercy.

Soucieux de se conformer à l’objectif des 3% de PIB de déficit à la fin de l’année, alors même que la Cour des comptes table sur 3,2%, l’exécutif doit économiser « environ 5 millions d’euros » d’ici fin décembre, a précisé Gérald Darmanin. Et comme toute augmentation des recettes de l’Etat par l’impôt a d’ores et déjà été exclue par l’exécutif, c’est sur les dépenses publiques qu’il compte agir.  

Fin juin, le ministre avait déjà acté le gel du point d’indice, qui sert à calculer le traitement des fonctionnaires. Un premier coup dur pour les agents de la fonction publique, qui avaient vu leur rémunération revalorisée en mars 2016, après six ans de gel.

« Une deuxième mesure qui vise à stigmatiser les fonctionnaires »

Echaudés par cette annonce, les syndicats le sont d’autant plus après avoir appris, ce matin, que le jour de carence allait être rétabli dès 2018. Une mesure qui consiste à supprimer la paie du premier jour d’absence pour maladie et qui, d’après le ministre de l’Action et des comptes publics, « permet de lutter contre le micro-abstentésime qui désorganise les services, alourdit la charge de travail des collègues en poste et coûte environ 170 millions d’euros par an ».

« L’offensive annoncée contre les fonctionnaires a commencé par l’annonce du gel du point d’indice se poursuit aujourd’hui par le rétablissement du jour de carence, et demain ce sera remise en cause du statut national des fonctionnaires », prédit François Livartowski, de la Fédération CGT des services publics. Il dit pourtant ne pas être surpris : « C’est ce que Macron avait plus ou mois annoncé. Les fonctionnaires sont dans le collimateur du gouvernement. ».

« J’ai remarqué, après le gel du point d’indice, que le gouvernement prend une deuxième mesure qui vise à stigmatiser les fonctionnaires, en nous expliquant qu’ils sont trop nombreux et trop faignants », estimait ce matin sur Public Sénat la député LFI Clémentine Autain. Elle déplore une « logique néolibérale archiconnue : opposer les fonctionnaires des salariés du privé. Une position partagée par  Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. « Arrêtons de culpabiliser les salariés ! », implore le syndicaliste.

Clémentine Autain dénonce « logique néolibérale archi connue : opposer les fonctionnaires des salariés du privé »
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« Rétablir l’équité entre le public et le privé »

L’autre argument avancé par le Gérald Darmanin est en effet de « rétablir l’équité entre le public et le privé ». Dans le privé, un salarié en arrêt maladie n’est indemnisé qu’après trois jours de carence. Sauf que cette perte de salaire est la plupart du temps compensée par son employeur, à l’exception des petites et moyennes entreprises et de certains artisans. Ce qui n’est pas le cas dans le public.

L’ancienne ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, avait d’ailleurs supprimé le jour de carence dans la fonction publique au motif que cette mesure, instaurée sous Nicolas Sarkozy en 2012, était « injuste ». Un argument diamétralement opposé à celui avancé par Gérald Darmanin.

« On devrait s’interroger sur la souffrance au travail »

« Il y a toujours des abus, mais à partir des abus, on ne peut pas expliquer aujourd’hui qu’il y ait autant d’arrêts maladies dans certaines administrations », a réagit Benoît Hamon sur RTL. Selon lui, « la réalité c’est qu’on devrait s’interroger sur la souffrance au travail ». Le candidat socialiste à la présidentielle, qui avait milité pour la reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle, estime que « l’Etat va faire des économies sur les arrêts maladies de ses fonctionnaires ». « Ils sont les boucs émissaires », déplore pour sa part Eric Coquerel, député de La France Insoumise.

François Livartowski s’accorde avec Benoît Hamon pour reconnaitre qu’ « il y a une souffrance au travail, qui s’aggrave ». Mais pour lui, « c’est la résultante de la démolition des services publics, qui a commencé quand M. Hamon était au pouvoir ». Le syndicaliste considère en effet que le démantèlement des services publics est l’objectif ultime de l’exécutif : « On commence à s’attaquer aux agents qui sont chargés de les mettre en œuvre avant de les démanteler. L’heure est à l’ouverture généralisée à la concurrence, les services rentables ont tendance à être privatisés. » Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre, Edouard Philippe, a d’ailleurs évoqué sa volonté de « remettre en cause certaines missions de services publics ». « L’objectif est de passer de la notion de service public, fondé sur la satisfaction de besoins généraux, aux services au public qui, eux, peuvent être rendus par un opérateur privé et dont la nature est totalement différente », conclut François Livartowski.

La sénatrice socialiste Marie-Noelle Lienemann considère qu’il s’agit là d’un retour à la politique de Sarkozy ». « #EnMarcheArrière », ironise-t-elle sur Twitter.

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