Albert Camus, le sens de la nuance

Albert Camus, le sens de la nuance

60 ans après sa mort, il demeure l’un des auteurs français les plus lus, dans l’hexagone et à l’étranger. Albert Camus est une figure de l’engagement, voire « l’icône de la révolte », selon le titre du dernier documentaire de Fabrice Gardel. Pourquoi, malgré certains positionnements controversés ou mal compris de l’écrivain, sa pensée reste-t-elle une source d’inspiration ?
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Par Mariétou Bâ

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Son visage est brandi sur des pancartes. Son regard intelligent et son charme côtoient, sur un morceau de carton, des slogans justes et intemporels. Traduits en plusieurs langues, les mots inspirants d’Albert Camus trouvent toujours leur place dans les mouvements de défense des libertés en France, mais aussi au-delà des frontières, à Honk-Kong par exemple.

« C’est en Espagne que ma génération a appris que l’on peut avoir raison et être vaincu », Albert Camus

Aujourd’hui référence littéraire et philosophique, Albert Camus, dont l’instituteur a détecté très tôt une maturité et une intelligence, ne vient pas d’une famille d’intellectuels. Sa mère ne sait pas lire. Il forge sa personnalité et sa manière d’appréhender la vie par des évènements concrets. Adolescent, il joue au foot et se met à cracher du sang. Il est atteint d’une tuberculose. Proche de la mort, il embrasse naturellement la vie. Il s’éprend de plusieurs femmes, et vit des passions amoureuses, comme il vit son engagement, intensément. Il intègre le parti communiste algérien en 1935 et avant de lui tourner le dos. Il soutient les républicains espagnols contre Franco et dira : « c’est en Espagne que ma génération a appris que l’on peut avoir raison et être vaincu ». Albert Camus s’essaiera au journalisme et deviendra une plume acérée. Il écrira une série d’articles sur la misère en Kabylie et l’exploitation coloniale. Pendant l’occupation, il défend la liberté, une plume à la main, dans les pages du journal clandestin Combat.

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Quel héritage de la pensée Camusienne ?

En publiant L’Homme révolté en 1951, Albert Camus suscite l’intérêt de Hannah Arendt, ou de dissidents politiques comme Alexandre Soljenitsyne, mais devient l’objet de nombreuses critiques à Paris, notamment celles de Sartre avec lequel il s’oppose au nom de la vérité. Pour celui qui n’est pas encore prix Nobel de littérature, la violence du régime communiste n’est pas acceptable. D’où qu’elle vienne il la refuse, mais si elle est parfois inévitable. Une posture, une nuance, qui le projette pour Sartre dans le camp des bourgeois. Une facilité de penser diront certains, au nom de laquelle, cherchant en tout le point d’équilibre il s’empêche de prendre fait et cause pour l’indépendance de l’Algérie.

S’il dénonce les inégalités subies par les Algériens, ajoutées aux violences et à l’exploitation, l’homme ne cache pas son attachement au pays qui l’a vu grandir. Il prône la liberté des opprimés, mais n’accepte pas l’indépendance. « Chaque mort sépare un peu plus les deux populations », dira-t-il alors. Une absence de position claire toujours critiquée aujourd’hui.

Mais l’incapacité de Camus, à choisir un camp plutôt qu’un autre, rend la lecture de ses écrits peut-être encore plus nécessaire aujourd’hui qu’hier dans une époque où chacun est sommé de choisir un camp et de nommer ses ennemis.

 

Retrouvez le débat d'Un monde en docs consacré à Camus sur notre site;

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