Déconfinement : comment fonctionne le pass sanitaire ?

Déconfinement : comment fonctionne le pass sanitaire ?

Le 9 juin, la troisième étape du calendrier de déconfinement, marque l’arrivée du pass sanitaire, qui sera nécessaire pour assister à tout événement réunissant plus de 1 000 personnes. Soulevant au passage des interrogations quant à la protection des données des usagers.
Public Sénat

Par Jules Fresard

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Publié le

Avec ces « clusters », « cas contacts » et « quarantaine », la pandémie s’est invitée de manière pérenne dans le vocabulaire des Français. Avec son pass sanitaire, elle s’apprête à s’immiscer un peu plus dans leur smartphone et leur vie sociale.

Ce dispositif, qui doit officiellement entrer en vigueur mercredi 9 juin, entend accompagner la troisième étape du calendrier de déconfinement, dessiné par l’exécutif. L’objectif est simple, s’assurer que le retour annoncé de grands événements comme les foires ou les festivals ne riment pas avec contamination massive des participants, à l’image de ce qui s’était déroulé à Mulhouse, quand un rassemblement évangélique en février 2020 s’était transformé en super-propagateur du virus, considéré comme un point de bascule de l’épidémie en France.

Qu’est-ce que c’est, un « pass sanitaire » ?

Le « pass sanitaire » français s’apparente à un laissez-passer. Nominal, il permettra à son détenteur de prouver aux autorités qu’il a été immunisé, vacciné, ou testé négatif au covid-19, et que donc sa présence dans un endroit rassemblant du public n’est pas dangereuse d’un point de vue épidémique. Ceux qui ne le possèdent pas se verront de fait refuser l’accès aux lieux où il sera nécessaire.

Sous quelles formes sera-t-il disponible ?

Ce précieux sésame prendra la forme d’une attestation, papier ou numérique, comportant un QR code qui une fois scanné permettra de connaître si son détenteur est bien immunisé, vacciné, ou testé négatif. Quand la personne en charge de la vérification des pass scannera un QR code, elle verra s’afficher le nom, le prénom et la date de naissance de la personne, ainsi qu’un signalement vert ou rouge pour accorder ou non l’accès, comme l’a détaillé Cédric O, le secrétaire d’État en charge du Numérique.

Ce fameux QR code est distribué à toute personne qui se fait vacciner ou réalise un test de dépistage qui se révèle négatif. Et pour les personnes qui se seraient fait vacciner avant la distribution de ces QR codes, il est possible de le récupérer à l’adresse attestation-vaccin.ameli.fr. Une plateforme similaire est disponible pour récupérer facilement les résultats des tests de dépistages réalisés les trois derniers mois : https://sidep.gouv.fr/cyberlab/patientviewer.jsp.

Pour ceux ne souhaitant pas le conserver sous format papier, il est possible de l’ajouter sous format numérique au sein de la fonctionnalité « Carnet » de l’application mobile TousAntiCovid. Pour ce faire, il suffit de prendre en photo le QR code présent à droite de votre attestation quand l’application vous y invite. Votre pass vaccinal sera alors automatiquement ajouté à votre téléphone mobile.

Où sera-t-il nécessaire ?

La liste des lieux où le pass sanitaire sera demandé a été précisée par le gouvernement. À noter que les enfants de moins de 11 ans en sont exemptés. Sont concernés tous les lieux recevant plus de 1 000 personnes, comme l’avait indiqué Olivier Véran en audition au Sénat, à retrouver dans la liste suivante :

- Les salles d’auditions, de conférences, de réunions, de spectacles

- Les chapiteaux, tentes et structures,

- Les établissements d’enseignement artistique, lorsqu’ils accueillent des spectateurs,

- Les salles de jeux,

- Les établissements à vocation commerciale destinés à des expositions, des foires-expositions ou des salons ayant un caractère temporaire,

- Les établissements sportifs de plein air autres que les parcs zoologiques, d’attractions et à thème,

- Les établissements sportifs couverts,

- Les événements culturels, sportifs, ludiques ou festifs organisés dans l’espace public ou dans un lieu ouvert au public et susceptibles de donner lieu à un contrôle de l’accès des personnes.

Le gouvernement a également annoncé qu’à partir du 9 juin, le pass sanitaire sera nécessaire pour toutes les personnes voyageant vers ou depuis la Corse et l’Outre-Mer. Le pass sanitaire européen, qui doit lui rentrer en vigueur au 1er juillet, viendra compléter le pass sanitaire actuel et permettra de voyager librement dans tous les pays de l’Union Européenne.

Qui pourra l’obtenir ?

Comme indiqué, le pass sanitaire sera accessible à toute personne pouvant prouver d’un parcours vaccinal complet, d’un test de dépistage négatif au covid-19 ou d’une rémission de la maladie.

Attention, le pass n’est pas disponible immédiatement après l’injection de la deuxième dose. Il est en effet nécessaire que deux semaines se soient écoulées après la deuxième injection des vaccins Pfizer, Moderna et AstraZeneca, quatre semaines après l’injection unique du vaccin Johnson & Johnson, et deux semaines également pour les personnes s’étant fait vacciner et ayant eu un antécédent de covid-19, pour qu’il soit valide.

Concernant les tests, antigéniques ou PCR, ils doivent être de moins de 48 heures pour donner l’accès aux événements de plus de 1 000 personnes, et 72 heures pour les contrôles lors des déplacements, vers la Corse par exemple. Enfin, pour prouver un rétablissement au covid-19, il est également possible de présenter un test de dépistage positif datant d’au moins 15 jours et de moins de six mois. Là aussi, pour récupérer ses anciens tests de moins de trois mois, il est possible de se rendre sur la plateforme : https://sidep.gouv.fr/cyberlab/patientviewer.jsp.

Est-il appelé à se généraliser ?

Pour l’instant, non. La loi votée par le Parlement le 27 mai dernier prévoit d’ailleurs que le pass sanitaire s’arrête au 30 septembre. « C’est le dispositif d’un été », avait d’ailleurs expliqué Philippe Bas, sénateur LR et rapporteur du texte à la Haute Assemblée. Le gouvernement a d’ailleurs réaffirmé son opposition à le généraliser aux activités de la vie courante, tout en refusant d’inscrire dans la loi la limite des 1 000 personnes, comme le demandaient les sénateurs socialistes.

Mais pour Loïc Hervé, sénateur centriste de Haute-Savoie et membre de la CNIL, très sceptique vis-à-vis du dispositif, il y a un risque de le voir se généraliser, si quatrième vague il y a. « La crainte que j’aie, c’est qu’on le généralise car on n’aura pas les moyens d’un nouveau confinement. Jean-François Delfraissy parle d’une quatrième vague à l’automne. Moi je pose la question, si quatrième vague il y a, aura-t-on besoin du pass pour aller au restaurant ou au théâtre ? ».

Pass sanitaire : "ce n'est pas un outil d'émancipation" juge Loïc Hervé
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Quid de la protection des données ?

Un autre problème soulevé avec ce pass est celui de la protection des données des utilisateurs. Loïc Hervé le rappelle, le nom, le prénom, la date de naissance et le statut vaccinal par exemple « sont des données qui ne sont pas cryptées ».

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Lors de l’examen du texte au Palais du Luxembourg, les sénateurs ont tenu à intégrer un amendement qui vise à ce que les personnes en charge de la vérification des pass soient spécialement habilitées.

Le gouvernement a lui mis en place une application destinée aux professionnels, TousAntiCovid Vérif, en charge de la vérification des QR codes et qui ne donnent accès qu’aux informations substantielles, c’est-à-dire le nom, le prénom, l’âge et si le pass est valide ou non.

Mais pour les compagnies aériennes, une autre version va être déployée, permettant d’avoir accès à de plus amples informations, notamment le type de vaccin, plusieurs pays ne reconnaissant pas certains d’entre eux.

La présidente de la CNIL, Marie-Laure Denis, s’est dit au micro de France Info rassurée sur certains points, notamment sur la non-divulgation des données précises de santé lors des contrôles. « Nous avons demandé et nous avons été entendus, qu’il y ait simplement un bouton vert ou un bouton rouge qui indique à la personne qui va contrôler votre pass sanitaire que vous pouvez rentrer ou ne pas rentrer » a-t-elle indiqué. Tout en mettant en garde. « Il ne faut pas banaliser ces dispositifs ».

Et pour ceux qui seraient tentés de voir l’arrivée de ce pass comme la possibilité d’un retour à une vie plus normale, Loïc Hervé répond, « j’ai énormément de mal à concevoir que ce pass donne une liberté nouvelle, alors que pour ma part, il en retranche. Ce n’est pas un outil d’émancipation, c’est une contrainte nouvelle ».

 

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