« Je n’exclus pas que nous répondions à la perche que M. Benalla nous a tendue », déclare Philippe Bas
La commission d’enquête du Sénat sur l’affaire Benalla, si elle le décidait, pourrait auditionner l’ancien chargé de mission à l’Élysée dans les prochaines semaines, selon Philippe Bas. Le sénateur se montre par ailleurs mécontent que plusieurs documents demandés manquent à l’appel.

« Je n’exclus pas que nous répondions à la perche que M. Benalla nous a tendue », déclare Philippe Bas

La commission d’enquête du Sénat sur l’affaire Benalla, si elle le décidait, pourrait auditionner l’ancien chargé de mission à l’Élysée dans les prochaines semaines, selon Philippe Bas. Le sénateur se montre par ailleurs mécontent que plusieurs documents demandés manquent à l’appel.
Public Sénat

Par Guillaume Jacquot (Propos recueillis par Tâm Tran Huy)

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C’est la rentrée au Sénat. Les travaux en commission ont repris cette semaine, notamment ceux de la commission des Lois, et de son enquête sur l’affaire Benalla. Après avoir interrompu ses activités début août, le temps d’une coupure estivale, elle s’est remise formellement au travail ce mercredi, après une première réunion entre son président Philippe Bas (LR), et les deux co-rapporteurs, Jean-Pierre Sueur (PS) et Muriel Jourda (LR).

Comme prévu, les auditions de la commission des Lois vont reprendre dès la semaine prochaine, le programme est « déjà établi », selon Philippe Bas, le président de la commission, qui s’est exprimé sur Public Sénat. Selon nos informations, trois auditions auront lieu le mercredi 12 septembre à partir de 09h30.

L’évènement politique de l’été n’a pas été enterré, loin de là. Le président du Sénat, Gérard Larcher, a eu l’occasion de le souligner ce jeudi matin, lors de sa conférence de presse de rentrée. « Beaucoup pensaient – certains espéraient – que la trêve estivale pourrait gommer les effets collatéraux d’une affaire qui avait défrayé la chronique au mois de juillet dernier. »

Une convocation d’Alexandre Benalla possible, avec « beaucoup de précautions »

Dans ce nouveau cycle, un nom pourrait même se rajouter : celui d’Alexandre Benalla. L’ancien chargé de mission à l’Élysée, mis en examen dans le cadre des évènements de la place de la Contrescarpe du 1er mai,  précisait lui-même au JDD avoir« plutôt envie » d’aller témoigner devant une commission d’enquête parlementaire, affirmant avoir des « explications » à leur « donner ». « Je n’exclus pas que nous répondions en quelque sorte à la perche qu’il nous a tendue, mais en y mettant les conditions pour ne pas empiéter sur le travail de la justice », a déclaré Philippe Bas à Public Sénat.

Soucieux de respecter les principes constitutionnels et de séparation des pouvoirs, le sénateur LR de la Manche affirme que ce cas de figure est possible, à condition de « le faire avec beaucoup de précautions », a-t-il insisté. Il s’agit surtout de ne pas empiéter sur les faits qui font l’objet d’une instruction judiciaire. « Qu’il nous explique comment il avait établi des relations avec la préfecture de police, son rôle dans la sécurité du président de la République, ça, c’est intéressant. »

« Nous prendrons la décision le moment venu », s’est ensuite contenté de répondre Philippe Bas. Si la commission prenait une telle décision, la convocation pourrait intervenir rapidement. Ce serait une question de semaines. « On ne va pas attendre six mois », a lâché Philippe Bas, en fin d’interview.

Sur ce point, le président du Sénat ne veut pas interférer, ni donner son opinion. « C’est à la commission de décider », a-t-il balayé ce matin (relire notre article).

Philippe Bas « veut y voir clair »

D’une part, les pouvoirs de commission d’enquête, attribués le 23 juillet, expireront au bout de six mois. D’autre part, Philippe Bas espère que « les faits soient clairement établis ». En parallèle des auditions, les sénateurs ont poursuivi leur collecte de documents et de pièces au dossier, pour nourrir leur travail. « Nous avons déjà obtenu beaucoup de documents », a reconnu Philippe Bas.

Mais plusieurs pièces demandées par la commission des Lois manquent à l’appel. Elles n’ont pas été communiquées, au nom de la séparation des pouvoirs. « J’ai donné l’exemple de documents qui ne me paraissent pas relever du secret d’État le plus absolu : la rémunération de M. Benalla, pour savoir, au fond, comment l’employeur qui était l’Élysée le situait dans une hiérarchie de service public. Je veux y voir clair », s’est expliqué le président de la commission.

Les interrogations sur les fonctions de M. Benalla « interpellent » la commission d’enquête

Plus problématique encore, de son point de vue : l’absence de la fiche de poste d’Alexandre Benalla. « Nous avons entendu les collaborateurs du président de la République qui nous disaient qu’il ne s’occupait pas de la protection rapprochée. Cela nous interpelle. On se demande pourquoi toutes les photos ou vidéos où on le voit accompagner le président de la République le montrent dans une position très typique de celle d’un garde du corps. »

« On a l’impression que la seule chose pour laquelle il est réellement qualifié, ce serait celle qui n’est pas dans sa mission », s’est exclamé le sénateur normand. Car pour lui, la mission de protection de la présidence « est une question essentielle pour la République ».

Interrogé sur l’absence de cette fiche de poste et de l’information sur la rémunération, Gérard Larcher a indiqué qu’il n’avait, à cette heure, pas été saisi par la commission d’enquête, mais que cette dernière en avait bien entendu la possibilité.

« Je ne fais pas un procès », a tenu à rappeler plusieurs fois Philippe Bas, tenant à distinguer le travail de sa commission de celle de l’institution judiciaire. « Notre but ultime c’est de produire un rapport public qui fasse la transparence, autant que possible la vérité des faits, mais qui surtout qui fasse des recommandations pour éviter que ce type de défaillance, de dysfonctionnement ne se reproduise. »

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