Macron à Las Vegas en 2016: l’enquête pour « favoritisme » confiée à des juges
L'enquête sur le déplacement d'Emmanuel Macron en janvier 2016 à Las Vegas, qui fragilise la ministre du Travail Muriel Pénicaud, s'accélère:...
Par Sophie DEVILLER
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L'enquête sur le déplacement d'Emmanuel Macron en janvier 2016 à Las Vegas, qui fragilise la ministre du Travail Muriel Pénicaud, s'accélère: des juges d'instruction ont été désignés vendredi pour poursuivre les investigations.
"Au vu des premiers éléments de l'enquête préliminaire" ouverte le 13 mars, le parquet de Paris a annoncé l'ouverture vendredi d'une information judiciaire contre X pour "favoritisme et recel de favoritisme".
La ministre du Travail a déclaré dans un communiqué succinct "prendre acte" de l'ouverture de la procédure, maintenant "avec la plus grande fermeté (n'avoir) rien à se reprocher".
Au centre de l'affaire: une soirée le 6 janvier 2016 à Las Vegas, en plein Consumer Electronics Show (CES), grand-messe mondiale de l'innovation technologique, au cours de laquelle Emmanuel Macron, alors ministre de l'Économie, avait rencontré des dirigeants de start-up françaises.
Business France, agence publique dirigée à l'époque par la ministre du Travail Muriel Pénicaud, est soupçonnée d'avoir enfreint la réglementation sur les marchés publics en ne faisant pas d'appel d'offres pour l'organisation de l'événement, confiée au géant de la communication Havas en décembre 2015.
"La mise en concurrence n'a pas eu lieu concomitamment entre les trois prestataires contactés", Apco, Publicis et Havas, écrit le cabinet E&Y dans un audit rendu en juillet 2016, d'après une source proche du dossier.
De son côté, l'agence de communication fait valoir qu'elle a signé avec Business France le 23 juin 2015 un contrat-cadre sur "la promotion de l'attractivité économique de la France" notamment aux États-Unis.
"Nous avons toujours cru opérer dans le cadre de ce contrat-cadre, remporté par Havas à l'issue d'un appel d'offres, et pour nous le marché de Las Vegas ne nécessitait donc pas de mise en concurrence spécifique", a-t-on dit dans l'entourage du groupe publicitaire.
Révélé par Libération, l'audit d'E&Y relève aussi qu'il n'y aurait eu "aucun bon de commande, aucun devis réalisé, aucun contrat signé, aucune facture", une situation susceptible "d'engager la responsabilité pénale des auteurs".
- "Synthèse biaisée" -
Muriel Pénicaud est suspectée d'avoir été informée en amont de dysfonctionnements.
Emmanuel Macron (D) alors ministre de l'Economie et Muriel Penicaud (G) alors directrice générale de Business Franceà Las Vegas le 7 janvier 2016
AFP/Archives
Les enquêteurs de l'office anti-corruption de la police judiciaire ont notamment saisi le 20 juin, lors d'une perquisition chez Havas et Business France, un courriel du 11 décembre 2015 de Fabienne Bothy-Chesneau, à l'époque directrice de la communication de l'organisme, qui peut suggérer que sa patronne a été "briefée" à propos des difficultés rencontrées.
La ministre est aussi soupçonnée de n'avoir informé son conseil d'administration qu'en décembre 2016, six mois après avoir reçu le rapport d'E&Y, et d'en avoir présenté "une synthèse biaisée", d'après Libération.
L'ouverture de l'information judiciaire rend désormais envisageable l'option d'une mise en examen de Muriel Pénicaud sous condition que les juges d'instruction réunissent des "indices graves ou concordants" à son encontre.
"On parle quand même juste d'un dépassement d'un seuil de marché public pour une manifestation internationale qui s'est tenue à Las Vegas, mais s'il y avait une mise en examen de Muriel Pénicaud, elle devrait quitter le gouvernement", a dit mardi le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner.
L'affaire tombe mal pour Muriel Pénicaud, en première ligne dans la réforme du Code du travail, promesse phare d'Emmanuel Macron, qui doit être adoptée par ordonnances en conseil des ministres d'ici le 20 septembre. Une fois cette réforme validée par l'Assemblée nationale, Muriel Pénicaud doit s'atteler à un autre chantier important: la réforme de l'assurance chômage, autre promesse de campagne du président.
L'enquête porte aussi sur le rôle qu'auraient pu jouer certains membres du cabinet d'Emmanuel Macron à Bercy.
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