Affaire Benalla: Macron rompt le silence et se pose comme “seul responsable”

Affaire Benalla: Macron rompt le silence et se pose comme “seul responsable”

"Le seul responsable de cette affaire, c'est moi et moi seul!". Emmanuel Macron est sorti avec fracas de son silence dans l'affaire Benalla...
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Par Jérémy MAROT

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"Le seul responsable de cette affaire, c'est moi et moi seul!". Emmanuel Macron est sorti avec fracas de son silence dans l'affaire Benalla mardi au terme d'une journée électrique au Parlement qui a vu l'exécutif mener une offensive concertée et les auditions se poursuivre.

"S'ils veulent un responsable, il est devant vous, qu'ils viennent le chercher", a lancé, bravache, le chef de l'Etat mardi soir devant son gouvernement et sa majorité parlementaire quasiment au grand complet.

Alors qu'il restait mutique après plusieurs jours de désordre, blocages et tensions, et que la pression s'intensifiait pour qu'il donne sa vision d'une affaire le touchant au plus près, Emmanuel Macron a choisi un cadre et un moment inattendus - un pot de fin de session parlementaire à la Maison de l'Amérique latine de Paris - pour s'exprimer. Une façon de montrer qu'il restait malgré tout maître des horloges et capitaine du navire.

"On ne peut pas être chef par beau temps et se soustraire lorsque le temps est difficile", a-t-il lancé dans un discours d'une demi-heure environ, consacré pour partie au tumulte né de la diffusion de vidéos montrant Alexandre Benalla, son proche collaborateur, frappant des manifestants le 1er mai.

"Celui qui a fait confiance à Alexandre Benalla, c'est moi, le président de la République. Celui qui a été au courant et a validé l'ordre, la sanction de mes subordonnées, c'est moi et personne d'autre", a notamment martelé le chef de l'Etat, affirmant que "personne n'a jamais été protégé".

Les protagonistes de l'affaire Benalla
Galaxie des personnes supposément impliquées dans l'affaire Benalla, du nom de l'ex-collaborateur de l'Elysée qui a frappé un manifestant lors du 1er mai
AFP

Ironique, il avait entamé son intervention en affirmant qu'"Alexandre Benalla n'a jamais détenu les codes nucléaires, Alexandre Benalla n'a jamais occupé un appartement de 300 m2 à l'Alma, Alexandre Benalla n'a jamais gagné 10.000 euros, Alexandre Benalla lui non plus n'a jamais été mon amant".

Dénonçant "la République des fusibles, la République de la haine, celle où l'on fait trinquer un fonctionnaire ici, un collaborateur là", M. Macron a aussi soutenu ses "équipes à l'Elysée" qui "ont fait ce qu'elles devaient faire". La simple mise à pied de 15 jours de M. Benalla était "proportionnée à ce moment-là et je l'assume", s'est-il défendu.

Mais le président a aussi évoqué son sentiment de "déception" et de "trahison" après les actes d'Alexandre Benalla, décrits par la macronie comme "une dérive individuelle" et non "une affaire d'Etat" depuis deux jours.

"Si tel est le cas pourquoi avoir attendu la semaine dernière pour le licencier? Pourquoi l’avoir dans les faits maintenu dans ses fonctions? Pourquoi l’avoir couvert? Le storytelling ne fonctionne plus...", a fustigé sur Twitter le premier secrétaire du PS Olivier Faure, pour lequel "le vrai courage c’est de prendre ses responsabilités avant que la presse ne révèle le scandale".

Emmanuel Macron "doit toujours parler aux Français", a-t-on cinglé dans l'entourage du patron des Républicains (LR) Laurent Wauquiez.

"+Qu’ils viennent me chercher+ (#Macron)... : pas très fair play quand la Constitution (ce que nous ne contestons pas) le protège précisément de toute obligation de rendre des comptes", a tweeté pour sa part la présidente du Rassemblement National (RN, ex-FN), Marine Le Pen.

De leur côté, des s députés LREM ont salué mardi soir un discours "bienvenu" d'un président de la République qui "assume".

Le  directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, à Ajaccio, le 6 février 2018
Le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, à Ajaccio, le 6 février 2018
POOL/AFP/Archives

Avant l'intervention surprise de M. Macron, Edouard Philippe était monté au créneau au Parlement en répondant à 17 des 26 questions au gouvernement du jour entre l'Assemblée et le Sénat, liées à l'affaire.

Face au feu roulant de questions des chefs de groupe, de Christian Jacob (LR) à Valérie Rabault (PS) en passant par André Chassaigne (PCF) ou Jean-Luc Mélenchon (LFI), le Premier ministre a répété à l'Assemblée, sous les ovations de la majorité et les quolibets de l'opposition, que "rien n'a été masqué, rien n'a été omis".

M. Philippe a admis des "questions" sur la "proportionnalité" de la sanction infligée début mai à M. Benalla, mais jugé "la célérité" de la réponse "pas contestable".

Dans le même temps à l'Assemblée, le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, planchait à son tour devant la Commission des lois de l'Assemblée, toujours en formation de commission d'enquête.

M. Strzoda a notamment expliqué pourquoi il n'avait pas signalé les faits commis par M. Benalla à la justice, soulignant notamment que les spécialistes de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) avaient analysé la scène, et qu'"aucune information de cette analyse" allant dans le sens d'un signalement ne lui avait été communiquée.

Le secrétaire général de l'Elysée Alexis Kohler, bras droit du chef de l’État, répondra lui jeudi aux sénateurs. Enfin, Gérard Collomb, premier auditionné par les députés lundi, a été de nouveau entendu par les sénateurs mardi durant plus de deux heures.

La sortie de M. Macron fera-t-elle retomber la tension au parlement, alors que l'examen du projet de loi constitutionnel à l'Assemblée a été renvoyé à la rentrée ? Le président du groupe LR Christian Jacob avait en tout cas annoncé à midi le prochain dépôt d'une motion de censure contre le gouvernement afin qu'il "s'explique".

Elle a peu de chance d'être votée, mais annonce la perspective d'un long débat pour Édouard Philippe. La France insoumise, qui cherche à déposer sa propre motion avec l'appui des communistes et des socialistes, n'a pas exclu de voter le texte LR.

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