« Il manque 250 000 logements », alerte l’Association des résidences étudiantes

« Il manque 250 000 logements », alerte l’Association des résidences étudiantes

La mission d’information du Sénat sur les conditions de vie étudiante a poursuivi ses auditions. Ce lundi 2ç mars, elle a interrogé différents responsables de l’habitat des étudiants. Pour eux, le principal problème réside dans le manque de logements pour ce public. Des améliorations commencent néanmoins à émerger.
Public Sénat

Par Joseph Stein

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Ce n’est plus un secret pour personne, la crise apparue avec la pandémie frappe de plein fouet les étudiants. Les sénateurs de la mission d’information sur les conditions de vie étudiante en ont à nouveau, fait l’expérience lors des auditions, ce lundi 29 mars, de plusieurs organisations en charge du logement des étudiants.

Du point de vue de l’habitat, la crise est la plus dure pour les étudiants qui ont perdu leur emploi, « ce sont eux qui ont le plus de difficulté à payer leur loyer », relève Zoé Chaloin, chargée de mission à la Fédération nationale des agences d’urbanisme. Thierry Bégué, le directeur général du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) de Paris, rappelle que pour aider ce public, une exonération des loyers a été adoptée durant le premier confinement, tout comme leur gel en 2020 et 2021.

Toutefois, comme l’indiquent tous les participants de la table ronde, les problèmes d’accès au logement pour les étudiants existaient déjà avant la crise. « L’offre de logements étudiants n’est structurellement pas suffisante, elle ne permet ni d’accompagner la démocratisation de l’enseignement supérieur, ni de développer les nouvelles mobilités que l’on connaît avec Erasmus ou le développement de l’apprentissage dans le supérieur », affirme Philippe Campinchi, le directeur général de l’Association interprofessionnelle des résidences étudiants et services. Il ajoute qu’il y a « 250 000 logements manquants, d’après certains spécialistes ».

55 % des étudiants logent dans le parc privé

Actuellement, on dénombre 2,7 millions d’étudiants en France. Dans le même temps, il existe 375 000 logements dans les résidences dédiées pour ce public, ce qui permet de loger 12 % des étudiants, d’après l’Observatoire de la vie étudiante (OVE). Face à ce constat, Philippe Campinchi appelle à « redonner aux Crous et les moyens et la mission d’accueillir les étudiants, en particulier les Ultramarins, qui sont dans des situations extrêmement compliquées ».

Reste qu’outre les 33 % d’étudiants logeant chez leurs parents, ce public se loge majoritairement dans le parc locatif privé (cela concerne 55 % d’entre eux, selon l’OVE). Pour Tommy Veyrat, délégué national de l’Union nationale des comités locaux pour le logement autonome des jeunes, on ne peut pas oublier l’habitat privé, « l’éléphant au milieu de la pièce », dans l’équation de l’habitat des étudiants. Il regrette à ce titre que « toutes les politiques de régulation des loyers dans le parc privé ne soient pas à la hauteur ».

« Des règles ni transparentes, ni justes »

En outre, la réforme de l’aide personnalisée au logement (APL) touche directement les étudiants, puisqu’un tiers d’entre eux en sont bénéficiaires. « C’est l’aide la plus efficace dans la réduction de la pauvreté », estime Tommy Veyrat. Au-delà de la diminution des APL de cinq euros, il condamne leur sous-indexation depuis 2018, augmentant ainsi le reste à charge pour les étudiants.

Philippe Campinchi, quant à lui, dénonce les « règles ni transparentes ni justes » du calcul de cette aide : « Sur le site de la CAF (Caisse d’allocations familiales ndlr), à loyer égal, un étudiant qui fait sa demande d’APL n’aura pas le même montant, s’il la fait pour une résidence gérée par le Crous, ou pour une résidence gérée par d’autres associations. »

Vers une modification de la manière dont les étudiants se logent ?

Des solutions sont en cours de mise en œuvre. Tout d’abord, le gouvernement a annoncé la construction de 20 000 logements étudiants durant le quinquennat, dont 10 000 en 2021. Le vice-président d’Action logement groupe, Philippe Lengrand, déclare que 75 millions d’euros de subventions et 35 millions d’euros de prêts sont débloqués pour la réalisation de l’objectif de cette année. Néanmoins, Thierry Bégué considère que « la dynamique de construction est freinée ». Il recommande de la relancer en subventionnant davantage la construction de résidences, pour qu’elles deviennent aussi des lieux d’échange, et en facilitant l’accès au foncier public.

Les intervenants remarquent par ailleurs un développement positif, celui de Visale. Cette garantie gratuite, destinée à faciliter l’accès à la location aux personnes de moins de 30 ans, a bénéficié à 400 000 personnes depuis 2016, parmi lesquelles 55 % d’étudiants, comme le note Philippe Lengrand.

Si les différentes personnes interrogées ont proposé des pistes aux sénateurs pour favoriser l’accès des étudiants au logement, une question reste ouverte : quel va être l’impact du recours accru aux cours en ligne sur les choix des étudiants en matière de logement à l’avenir ?

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