Le rapport du sénateur LR Bruno Belin, en vue de l’examen de la mission sécurité du budget 2025, pointe l’impact financier des JO de Paris 2024 et de la crise en Nouvelle-Calédonie sur les finances de la gendarmerie et de la police. Conséquence : la police a renoncé à remplacer plus de 2.000 voitures et la gendarmerie n’a pas payé ses loyers à de nombreuses communes. Les budgets de la police et de la gendarmerie sont en revanche en hausse en 2025.
Déploiement de vaccinodromes : « On fonctionne à grands coups de com’ ! », dénoncent des sénateurs
Par Pierre Maurer
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Le gouvernement avait fait le choix de ne pas en déployer, a contrario de son voisin allemand. Plutôt que des grands « vaccinodromes », la France misait au mois de janvier sur les petites structures, et les soignants de proximité et leur lien de confiance tissé avec les patients. En décembre dernier lors d’une audition au Sénat, le ministre de la Santé Olivier Véran assurait ainsi ne pas croire aux « vaccinodromes », mais plutôt à des « petits centres de vaccination ». Le 4 janvier dernier, il confirmait encore sa réticence face aux vaccinodromes : « Je ne suis pas du tout certain que ça doive prendre, c’est mon opinion, la forme de grands stades », disait-il devant l’Hôtel-Dieu, dont il visitait le centre de vaccination
Près de quatre mois plus tard, le discours a changé, dans les rangs du ministère, comme au Sénat. Ce lundi 22 mars, le ministre a annoncé que l’armée et les pompiers vont déployer « au moins 35 » grands centres de vaccination contre le covid-19, « pour pouvoir être capables d’utiliser » toutes les doses qui seront livrées à la France « à partir du mois d’avril ». Selon les Echos, qui avaient révélé l’information, ces grands centres pourraient piquer entre 1000 et 2000 personnes par jour, sur le modèle de ce qu’il se fait en Allemagne. L’Etat et l’Assurance maladie seront également sollicités pour faire en sorte que chaque département dispose d’un « vaccinodrome ». Si les sénateurs en pointe sur la question sont plutôt favorables à la mise en place de ces structures, ils n’en soulignent pas moins plusieurs contradictions.
« Un revirement de nécessité »
Présidente LR de la commission des Affaires sociales du Sénat, Catherine Deroche n’est pas « hostile aux vaccinodromes », à condition qu’ils fonctionnent en parallèle de la vaccination par les personnels de santé. « L’essentiel c’est qu’on puisse vacciner le maximum de personnes. Il y a des endroits où ce sera utile à condition d’amplitudes très larges », estime la médecin de formation. Selon elle, la réticence initiale d’Olivier Véran est à chercher du côté du fiasco de la grippe H1N1. « Mais il n’y a pas de comparaison à faire. On n’était pas du tout dans les mêmes conditions », argue-t-elle.
Médecin en activité et président de la mission covid-19 du Sénat, Bernard Jomier est lui aussi « favorable » aux « vaccinodromes ». « Il y a probablement une utilité à ouvrir d’autres lieux de vaccination pour toucher plus largement la population », fait valoir le sénateur socialiste. « C’est une course contre la montre. Tout ce qui contribue à élargir la vaccination est positif », abonde Sonia de La Provôté, sénatrice centriste, chargée du rapport de l’Office parlementaire sur la vaccination contre la covid-19, publié à la mi-décembre. Le 15 décembre dernier, lors du compte rendu de ses premières conclusions sur la stratégie vaccinale, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) du Sénat recommandait que la vaccination s’appuie sur les professionnels de santé de ville, qui ont une relation privilégiée de connaissance et de confiance avec leurs patients.
« On aurait dû arriver dans une phase plus intensive de vaccination plus tôt, ça faisait partie des préconisations de l’OPECST », souligne-t-elle, convenant que « c’est un revirement de nécessité dicté par le calendrier du virus ». Olivier Véran a expliqué qu’il s’agissait de « pouvoir être capables d’utiliser tous les vaccins qui nous sont livrés à partir du mois d’avril pour vacciner massivement les Français », réaffirmant l’objectif de « 10 millions de primo-vaccinés à la mi-avril ». Le ministre table ensuite sur une augmentation continue. Dimanche soir, un conseiller ministériel précisait ce changement à Politico : « On est entrés dans une logique différente », ayant estimé « au début qu’il n’était pas pertinent d’envoyer les personnes âgées et fragiles dans des vaccinodromes ». « Aujourd’hui on a une cible plus large et on va avoir un approvisionnement plus large, donc il va falloir écouler », poursuivait-il.
« La solution de départ, c’était de démultiplier les points de vaccinations. Dans la Marne, mon département, on en avait 19 et ça allait bien pour être au plus près de la population. On avait convenu de ne pas faire de grands vaccinodromes », rappelle le sénateur LR René-Paul Savary, un peu interloqué par cette nouvelle décision. Médecin, il se prononce contre, dans l’état actuel des moyens de vaccination et préfère mettre l’accent sur les « personnels soignants locaux ». « Les vaccinodromes peuvent être efficaces quand on aura une vaccination ouverte à toute la population, par exemple dans un an. On pourrait alors imaginer et organiser un jour défini de vaccination massive comme on organise des élections, un week-end », échafaude-t-il, ne manquant pas de souligner que « cela veut dire qu’il faut être proche du terrain ».
« Va-t-on déshabiller l’un pour habiller l’autre ? »
Mais avant d’envisager des grands centres, les sénateurs réclament unanimement des doses. « La première question, c’est d’avoir des vaccins. Et de faire en sorte que dans le système de soin, les acteurs soient assez approvisionnés. Mais il y a 10 jours, on arrêtait d’approvisionner les médecins pour approvisionner les pharmaciens. Il faut une continuité dans l’approvisionnement de chaque chaîne de vaccination et éviter, là aussi, de faire du stop-and-go », dénonce Bernard Jomier. « N’anticipons pas, quand on voit déjà les aléas dans les distributions de vaccins ! », exhorte lui aussi René-Paul Savary qui s’inquiète de voir les « campagnes » encore « défavorisées » par rapport aux villes. « Et puis il faut aussi trouver les médecins pour vacciner dans les vaccinodromes ! », prévient-il.
« Il faudrait que ce qu’il se pratique soit déjà parfait, or, ce n’est pas le cas : cela fait 15 jours qu’on n’a pas d’AstraZeneca », souligne Sonia de La Provôté en référence à la suspension du vaccin britannique quelques jours avant sa réautorisation par l’Agence européenne du médicament. Elle plaide plutôt pour un « état des lieux précis » des centres de vaccination actuellement disponibles. « Il y en a 1500, soit trois fois plus que ce qui était annoncé », assure-t-elle. En bref, « cette annonce pose des questions sur la distribution : Va-t-on déshabiller l’un pour habiller l’autre ? Tout ça reste lié à la réalité des doses qui arrivent et à la façon dont les arbitrages sont faits en matière de distribution », considère-t-elle. Et elle s’interroge : « Qui sera convoqué ? Quid de ceux qui ne pourront pas se déplacer ? »
Le risque, selon elle, est de déstabiliser l’organisation globale. Finalement, elle reproche à l’exécutif sa communication, rudement mise à l’épreuve par de multiples revirements : sur les masques, sur les tests, et dernièrement sur les attestations de sortie. « On fonctionne à grands coups de com’ : on reste sur des choses très ponctuelles alors que ça doit être envisagé comme un ensemble. Il faudrait une communication simple et claire ». Car malgré de nombreux centres à disposition, nombreux sont ceux qui ne savent pas comment trouver - ou n’obtiennent pas, faute de doses - un rendez-vous pour se faire vacciner. Elle souffle : « Il est temps que l’exécutif exprime de façon évidente tout le panel de vaccinations à la portée des publics concernés ».