Régionales : premier débat entre les candidats en Ile-de-France, sans le RN

Régionales : premier débat entre les candidats en Ile-de-France, sans le RN

La Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (Cress) organisait le tout premier débat entre les principaux candidats aux régionales en Ile-de-France, sans Jordan Bardella, la tête de liste du RN. L’occasion pour chacun de dérouler son programme, sans manquer d’attaquer le bilan de la présidente sortante, Valérie Pécresse.
Public Sénat

Par Pierre Maurer

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Un premier débat aux allures de répétition générale. Marqué par deux grands absents, la tête de liste du RN Jordan Bardella et la présidente de région sortante Valérie Pécresse (Libres !), ce rendez-vous opposaient les candidats aux élections régionales en Ile-de-France, qui ont engagé le fer sur l’économie sociale et solidaire. La rencontre, enregistrée mardi après-midi, était organisée par La Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (Cress) et diffusée jeudi à 19 heures. À bonne distance sanitaire, Clémentine Autain (LFI), Julien Bayou (EELV), Alexandra Dublanche (remplaçante de Valérie Pécresse - elle s’est déclarée officiellement candidate mercredi soir dans le Parisien), Audrey Pulvar (Ile-de-France en commun) et Laurent Saint-Martin (LREM) ont déroulé leurs programmes en distillant quelques piques préfigurant les grands thèmes de la campagne. Attaque en règle du bilan de Valérie Pécresse par la gauche et LREM, échanges tendus entre candidat macroniste et écologiste… Les prétendants ont dialogué pendant près de deux heures lors de ce « Grand Oral ».

Pour rappel, Valérie Pécresse (ex-LR) fait la course en tête au premier comme au second tour pour les prochaines élections régionales, selon un sondage Ipsos pour Le Parisien et France Info diffusé samedi 10 avril. Au premier tour, l’ancienne ministre de Nicolas Sarkozy est créditée de 34 % des voix, devant Jordan Bardella (17 %). Quatre candidats arrivent ensuite dans un mouchoir de poche : Audrey Pulvar (PS) avec 12 %, suivie par Clémentine Autain (LFI/PCF), Julien Bayou (EELV-Génération. s) et Laurent Saint-Martin (LREM) ex aequo à 11 %. Nathalie Arthaud (LO) et Alexis Villepelet (DLF) complètent la liste avec 2 % chacun. Au second tour, dans tous les cas de figure, Valérie Pécresse conserverait sa région.

Bataille de chiffres sur la culture et « tartufferie » du candidat LREM

Pour aborder les hostilités, les hôtes ont choisi la culture, secteur à l’arrêt depuis de long mois. La pécressiste Alexandra Dublanche ouvre le bal et défend le bilan de sa présidente. « On a augmenté de 45 % le budget de la culture même si d’autres essayent de faire croire le contraire. Les dispositifs nationaux ont eu des trous dans la raquette qu’on a essayé de combler. Ça a permis de sauver 30 000 emplois. On a également mis en place un fonds d’urgence de 20 millions d’euros », fait-elle valoir. Haro des candidats de la gauche. L’insoumise Clémentine Autain dénonce le « carnage du monde culturel » et une « augmentation irréelle de 45 % », arguant d’une baisse de « 7 % » du budget pourrit l’année 2021. La députée de la Seine-Saint-Denis tance les choix de Valérie Pécresse, veut créer un « Samu culturel », investir dans l’éducation culturelle et simplifier les démarches des acteurs du secteur.

Régulièrement présent sur les marches du théâtre de l’Odéon, occupé par des intermittents, le patron des Verts Julien Bayou dévoile, lui, son « plan de sauvegarde dès cet été pour le monde de la culture » avec calendrier de reprise et mise à disposition de salles. Une fois la crise passée, l’écolo veut organiser des « Assises de la culture », investir 5 millions par an dans l’éducation artistique et rétablir les emplois « tremplins ». Et « décrocher les fonds européens ». L’hidalguiste Audrey Pulvar observe quant à elle que les aides « semblent mal ciblées », défend ceux qui pratiquent la culture en « amateurs » et propose entre autres, « la création dun orchestre et dune troupe de théâtre dans chaque lycée francilien ».

Macroniste de la première heure, rapporteur du Budget à l’Assemblée nationale, Laurent Saint-Martin défend l’action du gouvernement. Celui qui vient de recevoir le renfort de Marlène Schiappa et de trois autres membres du gouvernement sur sa liste met en avant « le soutien massif au secteur » et plaide pour plus « d’agilité » afin d’accompagner les différents acteurs. Il estime comme les autres, Alexandra Dublanche exceptée, que les fonds européens sont « sous captés » et que la région est « totalement en retard » sur le sujet. L’occasion pour Audrey Pulvar d’annoncer sa volonté de créer une vice-présidence de région dédiée à l’économie sociale et solidaire et une autre destinée aux affaires européennes, comme presque tous les autres candidats…

Aux critiques sur les fonds européens, Alexandra Dublanche oppose les « millions perdus » par l’ancien président socialiste de la région, Jean-Paul Huchon. « Un mensonge mille fois répété, nen fait pas une vérité », lance-t-elle. Le ton monte un peu et Julien Bayou passe à l’offensive : « Depuis 2016, Valérie Pécresse a baissé de 40 % le budget de lESS et divisé par deux le budget pour les associations. La Commission européenne vous a épinglé, parmi toutes les régions dEurope comme la pire en termes de gestion avec des dépenses parfois 100 % inéligibles ». Laurent Saint-Martin en prend aussi pour son grade : « Prolongez l’année blanche pour les intermittents ! Toutes les promesses que vous venez de faire, il aurait suffi d’un amendement ! Tout ce que vous nous proposez relève de la tartufferie ! », grogne l’écologiste.

« Un euro sur deux du budget régional va dans la transition écologique »

Le débat se poursuit sur la transition écologique et l’emploi. Bayou estime que la « région est l’échelon pertinent » pour un plan de relance « écologiste », avec sa proposition « phare » en bandoulière : « Critériser les aides économiques, car pour le moment, on arrose aussi là où c’est mouillé ». Il espère ainsi « aller chercher 200 000 emplois » dans la transition écologique. Et surprise, Laurent Saint-Martin converge sur un point avec son adversaire Vert : le macroniste veut lui aussi investir dans les « ressourceries et recycleries ». Commentaire de Bayou : « Cest dommage que vous ne le fassiez pas au niveau national… »

Alexandra Dublanche embraye, un peu chagrinée d’être vilipendée sur le bilan de sa patronne. « On est capables de gérer des Veligo quand certains ne savent pas gérer des Vélib’, donc on n’a pas de leçons à recevoir ! » Elle rappelle aussi le budget « citoyen et solidaire de 500 millions » mis en place par sa région. Audrey Pulvar intervient, en réponse à Bayou et Saint-Martin : « Il y a ceux qui prônent ladaptation, et ceux qui prônent la transformation du système. Les ressourceries, cest gentil, mais la meilleure façon de recycler, cest aussi d’éviter la surconsommation ».

Clémentine Autain met sur la table ses mesures sociales « adossées à la transition écologique ». Au menu : cantines bios à 80 % et gratuites pour les quatre premiers quotients, transports en commun gratuits pour les minima sociaux et les jeunes de moins de 25 ans… Ce qui fait bondir Laurent Saint-Martin : « Attention à la gratuité, à un moment il faut la financer. Et le bio dans les cantines : je ne suis pas contre mais avec quels produits ? Pour quel budget ? ». Julien Bayou lui donne l’exemple de la ville de Trappes, qui a réduit de « 10 centimes le coût pour chaque assiette ». « Vous me démontrerez ladéquation. Je doute de votre chiffre », rétorque le rapporteur du Budget. Là encore, Alexandra Dublanche répond aux invectives : « Un euro sur deux du budget régional va dans la transition écologique. Tout le monde veut du bio. Mais on a récupéré une région dernière en surface en bio. On est pragmatique, sans idéologie. »

« Vous avez des gens qui vous ont passé de la pommade dans le dos »

La discussion se déporte sur l’insertion par l’emploi et les mesures en faveur de la jeunesse. Julien Bayou propose une aide de « 400 euros par mois pour les étudiants les plus en difficultés » et plaide en faveur du RSA jeune. Ce que refuse Alexandra Dublanche qui « assume d’avoir supprimé les emplois tremplins ». Même son de cloche chez Laurent Saint-Martin. « On a beaucoup trop subventionné ces emplois sans se demander si les employeurs privés ne pouvaient pas les financer eux-mêmes », estime-t-il.

Vient l’heure de conclure. Interrogés par le président du Cress, la plupart des candidats se disent favorables aux propositions de la chambre régionale. Julien Bayou ne manque pas de souligner que « vous avez des gens qui vous ont passé de la pommade dans le dos. Moi lESS jen viens, et je me suis battu pendant 10 ans pour la défendre ». Clémentine Autain fait quant à elle la promotion de son livre et annonce un « investissement de plusieurs milliards pour relancer l’économie sur d’autres rails ». Fidèle à lui-même, Laurent Saint-Martin préfère ne retenir que six propositions « budgétées » quand Audrey Pulvar les reprend toutes à son compte. Les régionales en Ile-de-France sont bien lancées.

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