Assurance chômage : ce qu’il faut savoir du projet de loi avant l’examen en séance au Sénat
Refus de CDI, correction du système de bonus-malus visant les entreprises, contrats des intérimaires ou encore attachement au paritarisme : le projet de loi sur le fonctionnement du marché du travail porte désormais la marque de la majorité sénatoriale. Tour d’horizon des évolutions intervenues en commission, avant l’examen dans l’hémicycle cette semaine.

Assurance chômage : ce qu’il faut savoir du projet de loi avant l’examen en séance au Sénat

Refus de CDI, correction du système de bonus-malus visant les entreprises, contrats des intérimaires ou encore attachement au paritarisme : le projet de loi sur le fonctionnement du marché du travail porte désormais la marque de la majorité sénatoriale. Tour d’horizon des évolutions intervenues en commission, avant l’examen dans l’hémicycle cette semaine.
Guillaume Jacquot

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L’assurance chômage est à l’agenda du Sénat cette semaine. Après son adoption en première lecture à l’Assemblée nationale le 12 octobre, le projet de loi « portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein-emploi » va être débattu en séance à partir de ce mardi 25 octobre.

A travers ce texte, le gouvernement veut prolonger les règles issues de la réforme de 2018 et pouvoir fixer temporairement par décret de nouvelles règles d’indemnisation des chômeurs, avec comme objectif d’atteindre le plein-emploi à la fin du quinquennat, soit 5 % de taux de chômage en 2027, contre 7,4 % actuellement. Pour y parvenir, il souhaite introduire un système de modulation des règles de l’assurance chômage en fonction de l’état du marché du travail. Une concertation d’un mois avec les partenaires sociaux s’est ouverte à la mi-octobre. Lors de l’examen en commission des affaires sociales, la majorité sénatoriale de droite et du centre a fait adopter un certain nombre de modifications importantes.

● La commission réduit la période durant laquelle le gouvernement peut agir par décret

Les rapporteurs Frédérique Puissat (Les Républicains) et Olivier Henno (Union centriste) se sont dits « favorables » au système de la modulation des règles de l’assurance chômage en fonction de la conjoncture. Le projet de loi, sortie de la commission, introduit une base législative à ce principe, dans le Code du travail. Au vu du changement, cette précision a été jugée « nécessaire ».

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Ils refusent néanmoins que le gouvernement garde la main pour une « durée excessive », mettant à mal la gestion paritaire du régime de l’assurance chômage, chasse gardée des organisations syndicales et patronales. La fin de l’autorisation pour agir par décret a été ramenée au 31 août 2023, contre le 31 décembre 2023 dans le texte initial.

Dans l’optique d’une nouvelle concertation sur la gouvernance de l’assurance chômage, les sénateurs ont souhaité « redonner la main aux partenaires sociaux ». Leur texte abroge la procédure de la « lettre de cadrage », une contrainte qui avait empêché tout accord des partenaires sociaux en 2018, provoquant la reprise en main du gouvernement. Le texte des sénateurs pose le cadre d’une « lettre d’orientation », qui « ne préempte pas la conclusion ».

● Les refus répétés de CDI pénalisés dans le texte de la commission sénatoriale

La commission des affaires sociales a surtout durci les modalités de l’assurance chômage pour les salariés qui refuseraient un « emploi stable ». Un demandeur d’emploi ayant refusé trois propositions de CDI à l’issue de CDD au cours des douze derniers mois ne pourra pas prétendre à l’assurance chômage.

● La disposition sur l’abandon de poste « sécurisée »

La disposition assimilant l’abandon de poste à une démission, introduite à l’Assemblée nationale par des députés de la majorité présidentielle et des députés LR, a été conservée. Elle a été précisée en commission des affaires sociales, afin de la « sécuriser ».

Une mise en demeure demandera au salarié de reprendre son poste ou de justifier son absence dans un délai fixé par l’employeur. Celui-ci ne pourra être inférieur à un minimum fixé par décret en Conseil d’État.

● Le dispositif du bonus-malus frappant les entreprises a été revu

Le projet de loi prévoit également la prolongation du « bonus-malus » sur les cotisations à l’assurance chômage jusqu’à l’été 2024. Ce mécanisme, incitant les entreprises de sept secteurs à recourir moins souvent aux contrats en court, n’est appliqué que depuis septembre. En 2018, le Sénat s’était opposé à ce système, craignant que des activités saisonnières soient pénalisées.

La commission des affaires sociales s’est donc saisie du présent projet de loi pour « corriger les défauts ». Selon le rapport du Sénat, le bonus-malus « ne s’applique pas aux secteurs qui ont le plus recours aux CDD courts, mais plutôt à ceux qui font fréquemment appel à l’intérim ». Les fins de contrats de mise à disposition d’intérimaires représentent 89 % des fins de contrats, contre 9 % pour les CDD.

Les sénateurs ont fait le choix de limiter le bonus-malus à la prise compte des fins de CDD d’une durée inférieure ou égale à un mois (hors remplacement de salariés absents). Les fins de CDI et les fins de missions d’intérim sont donc exclues. Les sénateurs ont aussi plafonné la majoration des contributions d’assurance chômage.

● Déplafonnement de la durée des missions réalisées dans le cadre d’un CDI intérimaire

Autre ajout intervenu en commission des affaires sociales : la durée maximale de trente-six mois, applicable aux missions d’intérim réalisées dans le cadre d’un CDI intérimaire (contrat conclu entre un salarié et une entreprise de travail temporaire pour la réalisation de missions d’intérim), a été supprimée. Cette disposition limitera, selon les sénateurs, le turnover d’intérimaires et sécurisera leur parcours.

● Élargissement des possibilités de validation des acquis

Moins médiatique, un dernier aspect du projet de loi prévoit d’étendre la validation des acquis de l’expérience aux proches aidants et aidants familiaux (les Français qui s’occupent régulièrement d’une personne handicapée ou âgée ou en perte d’autonomie), afin de faciliter leur accès aux métiers du grand âge. Peu favorables à une approche seulement catégorielle, les sénateurs ont amendé l’article en précisant que cette validation d’acquis serait ouverte à toute personne qui justifie d’une activité en rapport direct avec le contenu de la certification visée.

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