Convention citoyenne : le Sénat refuse de participer aux travaux

Convention citoyenne : le Sénat refuse de participer aux travaux

Alors que des points de discorde ont émergé ces derniers jours entre la Convention citoyenne et Emmanuel Macron, les premières réunions citoyens-parlementaires ont débuté ce lundi. Officiellement invité, le Sénat n’y participe pas. Dans un courrier adressé au groupe écologiste, Gérard Larcher a expliqué sa position.
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Par Steve Jourdin

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Annoncés le 29 juin par Emmanuel Macron, les « groupes de travail » ont un objectif simple : transformer les propositions de la Convention citoyenne en « règles concrètes ». Les premières réunions ont débuté ce lundi, et doivent déboucher sur l’élaboration d’un texte de loi présenté courant janvier en Conseil des ministres. A l’initiative de son Président, le Sénat pratique la politique de la chaise vide. Les sénateurs ne participent pas formellement aux discussions.

Dans un courrier adressé à Gérard Larcher, le groupe écologiste s’en émeut. « Pourquoi refuser d’être associés à cet espace de débat démocratique ? Au début de l’été, Barbara Pompili a demandé aux députés et aux sénateurs de participer aux réunions. Gérard Larcher a alors répondu qu’il était difficile de l’envisager dans cette période de renouvellement sénatorial (les élections sénatoriales ont eu lieu le 27 septembre dernier, NDLR). Mais les élections sont maintenant derrière nous, et Gérard Larcher ne souhaite toujours pas que le Sénat y participe. C’est un choix politique ! », regrette Guillaume Gontard, chef de file des sénateurs écologistes.

Plusieurs sénateurs voient dans ce refus une occasion manquée pour la démocratie. « Tout ce qui peut permettre aux citoyens d’être associés au processus législatif est une bonne chose », juge le socialiste Jérôme Durain. « La Convention citoyenne a une vraie légitimité, les groupes de travail mis en place s’inscrivent dans le prolongement de leurs travaux. Il est pertinent d’aller à la rencontre de ces citoyens. C’est une façon de puiser à la racine de leurs inspirations » ajoute le sénateur de Saône-et-Loire, membre de la commission des lois.

 

Le gouvernement pointé du doigt par la droite

 

Un avis qui n’est pas partagé par tous. Pour justifier ce refus, la majorité sénatoriale considère que l’élaboration de la loi est une prérogative exclusive du Parlement. A ce titre, les groupes de travail mis en place par le gouvernement sont vus comme une manière de contourner les élus. Dans un courrier en date du 1 er décembre adressé au président du groupe écologiste, Gérard Larcher a expliqué sa position. « Je n’oppose pas la démocratie représentative à la démocratie participative. Je suis convaincu que la démocratie représentative, que nous incarnons, s’enrichit de la participation des citoyens à l’élaboration de la décision […]. En revanche, il me semble primordial de veiller au respect de la séparation des pouvoirs », écrit le Président de la Haute assemblée.

Une position largement partagée par la majorité sénatoriale. « Le Parlement est le Parlement, et les groupes extraparlementaires n’en font, par définition, pas partie », lance Philippe Dallier (LR). « L’élaboration de la loi est une fonction remplie par l’Assemblée nationale et le Sénat. Nous ne sommes pas par principe opposés à ces groupes du travail, mais la Convention citoyenne ne peut pas être considérée comme le nouveau législateur. C’est un étrange mélange des genres », note le sénateur de Seine-Saint-Denis.

« On demande encore une fois aux parlementaires de travailler en dehors du Parlement. Entre les ordonnances, les habilitations, les commissions externes et la Convention citoyenne, la représentation nationale est toujours un peu plus marginalisée par l’exécutif » soupire une élue de la majorité sénatoriale. « Ce gouvernement ferait mieux de s’occuper de lui-même. S’il n’est pas capable d’élaborer une loi convenablement, qu’il s’en aille et laisse la place à des professionnels » pour cet autre élu de droite, chauffé à blanc après les polémiques autour de l’article 24 de la loi « sécurité globale ».

 

Une participation sénatoriale informelle

 

Composés d’une quinzaine de parlementaires, d’une dizaine de citoyens et de différents services du ministère de la Transition écologique, les groupes de travail ont pour mission de discuter des propositions de la Convention citoyenne. Malgré leur absence formelle, les sénateurs ne restent pas complètement à l’écart des discussions.

« Gérard Larcher n’a pas voulu jouer ce jeu-là, c’est dommage. Mais nous avons des échanges réguliers avec les sénateurs. Des réunions ont été organisées avec les socialistes, les écologistes et des élus de La République en marche (groupe RDPI au Sénat, NDLR). C’est important de travailler tous ensemble, au-delà des positions idéologiques » affirme Grégoire Fraty, membre de la Convention pour le climat et coprésident de l’association « Les 150 » chargée d’assurer le suivi des préconisations citoyennes. Par ailleurs, des mesures proposées par la Convention pour le climat ont donné lieu à des amendements adoptés par les sénateurs. C’est notamment le cas de la baisse de la TVA sur les billets de train, à laquelle le gouvernement était opposé.

Le Sénat garde donc un œil sur le travail des conventionnels. Certains élus regardent même par le trou de la serrure. Des sénateurs sont ainsi parvenus à se procurer la première ébauche du projet de loi « climat », dévoilé lors des groupes de travail. Le texte, pour l’heure confidentiel, est divisé en cinq grandes parties (« Consommer », « Produire et travailler », « Se déplacer », « Se loger », « Se nourrir »). Il prévoit des mesures visant à réguler la publicité, à rénover les bâtiments ou encore à encadrer le transport aérien afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre.

 

 

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