Dérèglement climatique, pandémies : « Nous ne pourrons pas tout gérer seuls », alarment les assureurs

Dérèglement climatique, pandémies : « Nous ne pourrons pas tout gérer seuls », alarment les assureurs

Auditionnés par la commission sénatoriale des finances, plusieurs acteurs du monde de l’assurance ont appelé à la création d’un partenariat public privé avec l’État, pour faire face notamment à la recrudescence des catastrophes climatiques.
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« Dans les risques majeurs auxquels notre société est confrontée, il y a bien sûr la transition écologique. Sur les 20 dernières années, le nombre de catastrophes naturelles a augmenté de 75 %. […] Sur l’année 2020, cela représente 126 milliards d’euros de dommages ». Interrogée par le président de la commission des Finances Claude Raynal, Florence Lutsman, présidente de la fédération française de l’assurance, a tenu à tirer la sonnette d’alarme. Les assureurs, de par la recrudescence des risques exceptionnels et leur intensité, se retrouvent dans une situation où ils ne sont parfois plus en mesure d’assurer leurs clients.

« Le système assurantiel traverse une profonde remise en cause, comme l’a illustré le refus du risque pandémique » a estimé Claude Raynal. Une situation qui se justifie, selon Florence Lutsman, par le fait que « l’assurance privée ne peut pas seule gérer ces crises exceptionnelles, car elle repose sur la mutualisation ». À comprendre que le système assurantiel actuel repose sur le postulat que quand un sinistre se déclare, tous les clients de l’assureur ne sont pas touchés. Permettant à la société d’assurance de rester à flot financièrement. Un modèle remis en cause par les « risques systémiques, qui touchent tout le monde et sont par nature non mutualisables ».

Le gel des cultures

Mais comme ont tenu à le rappeler les différentes personnes auditionnées par la commission des finances, en dehors de la crise pandémique, c’est un autre sinistre, climatique cette fois, qui est récemment venu remettre en cause le modèle assurantiel actuel, de par son intensité. À savoir l’épisode de gel des cultures viticoles et arboricoles qui s’est déclaré en avril, entraînant des pertes massives pour les exploitants. Une situation que le sénateur socialiste Sébastien Pla avait caractérisée de « Saint-Barthélemy de l’agriculture ». D’autant qu’une minorité d’exploitants seulement avait pu être indemnisée par leur assurance, les offres proposées ne couvrant pas ce genre de dégâts.

Une situation face à laquelle Florence Lutsman s’est dite consciente. « Le coût des sinistres a été multiplié par cinq dans certains départements, avec l’épisode de gel ». D’où l’appel lancé lors de l’audition par le sénateur centriste Jean-Michel Arnaud. « Il faut un régime de mutualisation des risques pour les agriculteurs, sinon les conséquences pourraient être dramatiques. Avec la recrudescence des phénomènes de gel en Europe continentale, et la floraison plus tardive des cultures ».

La vulnérabilité des TPE PME face aux cyberattaques

Autre risque appelé à se renforcer dans un futur proche, celui des cyberattaques avec rançon, et notamment celles visant les petites et moyennes entreprises. Leur vulnérabilité face à cette problématique avait d’ailleurs déjà été mise en lumière dans un rapport sénatorial de Rémi Cardon et Sébastien Meurant.

« Nous devons aussi faire face aux risques cybers. En 2020, nous avons reçu plus de 800 000 plaintes, avec une progression des plaintes à plus de 79 %. En France, 1 640 plaintes ont été déposées en 2020 », a averti Florence Lutsman. Mettant en garde sur les « efforts à faire en matière de prévention chez les TPE PME ». Même son de cloche chez Stéphanie Pauzat, vice-présidente de la Confédération des petites et moyennes entreprises.

Vers un partenariat « public privé » dans le domaine assurantiel ?

Face à ce constat, quelles solutions ? Pour les assureurs présents, c’est à l’État de venir prendre sa part. « Face à la fréquence et à l’intensité des risques existants, la seule mutualisation ne suffit pas », croit Florence Lutsman. D’où l’idée de mettre en place des « partenariats public privé », c’est-à-dire entre l’État et les assureurs. « C’est la bonne façon de gérer, peut-être la seule qui permettrait d’imaginer une indemnisation qui corresponde aux attentes des clients et des citoyens », a-t-elle continué. D’autant que durant la crise du covid, mais également face à l’épisode de gel, au travers du fonds des calamités agricoles, l’État est déjà intervenu massivement.

Mais Bertrand Labilloy, directeur général de la Caisse centrale de réassurance, a mis en garde face aux écueils que pourrait causer un tel mode opératoire. Bien qu’il ait admis que « le marché de l’assurance privée ne peut pas tout couvrir seul », il a alerté sur le possible « lissage des primes d’assurance » qu’une telle initiative pourrait engendrer, et a appelé à ce que « l’intervention de l’État ne soit que suppléante, n’intervenant pas à la liberté des entreprises ».

Quant à Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des Finances, il a voulu se montrer clair. « L’État ne pourra pas tout ».

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