Éric Dupond-Moretti et Laurence Rossignol prêts à travailler ensemble sur le délit de non-représentation de l’enfant

Éric Dupond-Moretti et Laurence Rossignol prêts à travailler ensemble sur le délit de non-représentation de l’enfant

Éric Dupond-Moretti était auditionné par la délégation aux droits des femmes du Sénat en ce mercredi 7 juillet. Ce fut l’occasion pour lui de revenir sur l’action de son ministère en termes de lutte contre les violences faites aux femmes et contre la prostitution. L’audition s’est déroulée dans une ambiance cordiale et a même débouché sur une promesse de collaboration entre le garde des Sceaux et la sénatrice socialiste Laurence Rossignol.
Mathilde Nutarelli

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Le garde des Sceaux était auditionné ce mercredi 7 juillet par la délégation aux droits des femmes du Sénat, afin de dresser le bilan de son ministère en termes de lutte contre les violences faites aux femmes et contre la prostitution.

Éric Dupond-Moretti a commencé son intervention en dressant un rapide bilan des mesures mises en place ces dernières années : bracelet anti-rapprochement, ordonnances de protection, téléphones grave danger, … Ces dispositifs, votés dans la loi Pradié et dans celle de juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, avaient été discutés en amont lors du Grenelle des violences conjugales en septembre 2019.

Pour le garde des Sceaux, les nouveaux outils dont disposent les magistrats, comme les bracelets anti-rapprochement ont bien été livrés aux juridictions, mais « ils n’ont pas été attribués comme ils auraient dû l’être » aux victimes. Pour lui, c’est la machine qui se met en marche, lentement mais sûrement. Il compte d’ailleurs encourager les bonnes pratiques des juridictions en créant un site, un « Google à l’intention des magistrats », regroupant toutes les bonnes pratiques qui émergent des territoires.

La création d’un parquet spécialisé dans les violences conjugales en débat

Si l’audition s’est déroulée dans une bonne ambiance, un désaccord de fond subsiste entre les sénateurs et le garde des Sceaux : la création d’un parquet spécialisé dans le traitement des faits de violences conjugales, à l’image de ce qui s’est fait en Espagne et suivant le modèle du parquet national antiterroriste.

Éric Dupond-Moretti se dit opposé à cette création, car « tous les tribunaux du territoire ne peuvent accueillir en raison de leur taille, une telle juridiction », il pointe ainsi le risque d’une inégalité de traitement entre les territoires. Il ajoute que « tous les magistrats sont en mesure de traiter les violences faites aux femmes », en opposition avec les faits de terrorisme, qui selon lui requièrent des compétences bien particulières.

Face à lui, les sénatrices et les sénateurs de la délégation aux droits des femmes du Sénat plaident pour la mise en place d’une telle organisation. C’est le cas de la sénatrice socialiste de l’Oise Laurence Rossignol, pour qui la création de ce parquet permettrait le « décloisonnement de la justice civile et de la justice pénale ». Or, selon elle « il y a une forme de violence institutionnelle qui s’exerce à l’égard des femmes dans la justice civile ». Cette proposition est également appuyée par la présidente de la délégation, la centriste Annick Billon, ou encore par la sénatrice communiste du Val-de-Marne Laurence Cohen.

Éric Dupond-Moretti et Laurence Rossignol prêts à travailler ensemble sur le délit de non-représentation de l’enfant

L’audition du garde des Sceaux a été l’occasion d’un fort échange entre lui et Laurence Rossignol, connue pour ne pas mâcher ses mots lorsqu’il s’agit des sujets concernant les violences faites aux femmes. Lors d’une de ses interventions, la sénatrice a interrogé le ministre sur la possibilité de revoir le devoir de représentation de l’enfant, qui permet de sanctionner la mère si elle ne remet pas l’enfant au père lorsqu’il a un droit de visite. La sénatrice s’inquiète du fait que les mères victimes de violences, si elles ne remettent pas l’enfant au père violent par peur de coups, risque de se retrouver devant le tribunal.

A cela, Éric Dupond-Moretti répond : « La femme qui ne donne pas ses mômes parce qu’elle a peur de recevoir une raclée, elle ne mérite pas d’aller devant le tribunal ». Le ministre se dit prêt à travailler avec la socialiste, afin de remédier à ce problème lors de l’examen prochain d’un projet de loi réformant la justice.

Un rapport sur la lutte contre la prostitution des mineurs

Enfin, cette audition a été l’occasion pour les sénateurs d’interroger le ministre de la Justice sur son action en termes de lutte contre la prostitution, et en particulier contre la prostitution des mineurs. Si Éric Dupond-Moretti salue l’augmentation des condamnations pour traite d’êtres humains et pour faits de proxénétisme, il reconnaît que la lutte contre la prostitution des mineures est plus ardue. « Ces jeunes femmes peuvent refuser toute collaboration avec les forces de l’ordre, les dépôts de plainte sont rarissimes », reconnaît-il.

Face à une recrudescence du phénomène, notamment à cause des nouvelles technologies, le ministre explique qu’un rapport est en cours d’exploitation par son ministère et que les recommandations en seront bientôt communiquées.

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