Air France : la distanciation sociale ne sera « pas faisable » à bord des avions
Quatre dirigeants d’Air France-KLM ont été auditionnés mercredi 22 avril par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. Favorables à un port du masque obligatoire, ils jugent en revanche infaisables des mesures de distanciation sociale dans les avions.

Air France : la distanciation sociale ne sera « pas faisable » à bord des avions

Quatre dirigeants d’Air France-KLM ont été auditionnés mercredi 22 avril par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. Favorables à un port du masque obligatoire, ils jugent en revanche infaisables des mesures de distanciation sociale dans les avions.
Public Sénat

Par Samia Dechir

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3 min

Publié le

Avec un trafic inférieur à 5 % du niveau habituel, les avions d’Air France-KLM sont aujourd’hui peu remplis. Le taux d’occupation des appareils - 40 % en moyenne - permet pour l’instant de respecter des mesures de distanciation sociale, destinées à limiter les risques de contamination du coronavirus. Mais au moment du déconfinement, impossible pour la compagnie de continuer à laisser des sièges vacants, ont assuré ses dirigeants devant les sénateurs.

« Notre marge tomberait à moins 25 % »

S’ils n’embarquent pas assez de passagers, les vols ne sont pas rentables pour Air France. En 2019, un taux moyen de remplissage de 85 % assurait à la compagnie une marge de 1,7 %. Pour assurer une distanciation sociale à bord, « il faudrait limiter à deux tiers les cabines d’avion, et notre marge tomberait à moins 25 % » a estimé Anne Rigal, directrice générale d’Air France. Pour elle, ce n’est tout simplement « pas faisable », car pas rentable.

Filtres à haute sécurité

D’autres mesures seraient cependant suffisantes pour garantir la sécurité sanitaire des vols, assurent les dirigeants. Car les cabines seraient des espaces à faible risque de contamination. « L’air est renouvelé toutes les trois minutes, avec des filtres à haute efficacité, les filtres HEPA, qui sont identiques à ceux utilisés dans les blocs opératoires, et donc qui retiennent les plus petits virus, dont le covid » a détaillé Anne Rigail.

Port du masque obligatoire

La directrice générale est cependant favorable à l’obligation du port du masque à bord. Air France l’a déjà systématisé pour son personnel navigant et ses passagers. Les cabines sont également désinfectées à l’aide de produits virucides. Toutes ces mesures combinées seraient donc suffisantes pour faire voler les avions à plein au moment du déconfinement. Mais encore faudra-t-il des passagers pour acheter des billets.

Une concurrence faussée

« La reprise sera lente » a prévenu Benjamin Smith, directeur général d’Air France-KLM. Et pour attirer les clients, certaines compagnies low cost annoncent déjà une guerre des prix, avec des vols à moins de 1 euro. Impossible, pour Air France, de rivaliser avec les concurrents qui usent de dumping social pour arriver à de tels tarifs.

« C’est très difficile de se battre quand on est confronté à des situations anormales de concurrence » a dénoncé Anne Couderc. La présidente non exécutive d’Air France voit dans cette crise l’occasion de réguler davantage le secteur aérien. « Dans un moment comme celui-là où les États apportent leur soutien de manière vraiment importante auprès des compagnies aériennes, je pense qu’ils doivent aussi être très vigilants aux règles de concurrence ».

La guerre des prix nuit à l’environnement

Pour sauver l’entreprise de la faillite, l’État français s’apprête à débloquer plusieurs milliards d’euros sous forme de prêts directs à la compagnie, ou de garanties de prêts bancaires. De nombreux parlementaires réclament en contrepartie des engagements environnementaux de l’entreprise. Devant les sénateurs, les quatre dirigeants ont assuré que malgré la crise, tous les objectifs de lutte contre le changement climatique seraient maintenus. Mais impossible de les atteindre dans un contexte de guerre des prix, a prévenu Anne Rigail. Le verdissement de la flotte, l’investissement dans les biocarburants et la réduction des émissions de CO2 par passager ont un coût. Impossible à couvrir avec des vols à 1 euro.

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