Les journalistes de Public Sénat, Jonathan Dupriez et Quentin Calmet ont pu filmer en exclusivité dans le Palais du Luxembourg pendant les deux mois de la crise du coronavirus. Pendant le confinement, le Parlement a tenté de maintenir son pouvoir de contrôle du gouvernement.
Coronavirus : Parlement sous ordonnance
Les journalistes de Public Sénat, Jonathan Dupriez et Quentin Calmet ont pu filmer en exclusivité dans le Palais du Luxembourg pendant les deux mois de la crise du coronavirus. Pendant le confinement, le Parlement a tenté de maintenir son pouvoir de contrôle du gouvernement.
Par Public Sénat
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La décision a été prise mi-mars. La situation sanitaire du pays est alors critique. Le Sénat s’applique alors le même régime que tous les Français, il se confine.
Comme dans de nombreuses entreprises ou collectivités, l’organisation normale du Sénat est bouleversée : mise en place du télétravail par visioconférence, limitation au strict minimum du nombre de sénateurs dans l’hémicycle et dans les locaux.
Une centaine de fonctionnaires et collaborateurs sont présents dans les murs du palais du Luxembourg, contre 1600 habituellement. Malgré cette dématérialisation, le parlement tourne à plein régime à distance, un moment inédit dans l’histoire de la Chambre haute, presque uniquement réduite à son pouvoir de contrôle du gouvernement.
La distanciation physique a limité à 48 le nombre de sénateurs présents dans l’hémicycle.
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Une atmosphère étrange
Du jour au lendemain, le 17 mars, l’ambiance change du tout au tout au palais du Luxembourg...
Les visiteurs habitués à fréquenter quotidiennement ces lieux qui, d’ordinaire, grouillent de monde, le racontent dans le documentaire : le lieu est devenu méconnaissable.
Les rares visiteurs ou sénateurs présents sur place racontent avoir été pris d’une sensation étrange où le temps s’était presque figé au Sénat... Un sentiment à l’image de la France confinée ou du Paris endormi.
Patrick Kanner, ancien ministre des Sports de François Hollande, a passé la majeure partie du confinement dans son bureau du Sénat.
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Patrick Kanner, le président des sénateurs socialistes, a passé la majeure partie des huit semaines du confinement au Sénat, dans son bureau. Il parle de cette période comme d’un « flash ». « Il a fallu trouver un nouveau mode de vie pour pouvoir assumer notre métier de parlementaire » explique-t-il depuis son bureau. Ses fenêtres donnent sur le Jardin du Luxembourg devenu figé lui aussi.
Face à face entre ministres et sénateurs
L’un des seuls moments qui s’est tenu physiquement pendant la période, ce sont les Questions d’Actualité au Gouvernement (QAG). Tous les mercredis, les ministres viennent répondre aux parlementaires.
Les séances de Questions d’Actualité au gouvernement ont été maintenue pendant toute la période, mais dans une atmosphère étrange. Ici le 06 mai.
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Mais pendant cette période une polémique se fait jour : avec l’état d’urgence sanitaire, le Parlement a dû mettre entre parenthèses son pouvoir de législateur. Une situation qui devient de plus en plus problématique au fil des semaines. « Ce n’est pas un mode habituel de législation » tonne le président LR de la Chambre haute, Gérard Larcher, interviewé depuis sa « salle de crise » à la présidence du Sénat.
En effet, le 23 mars, Sénat et Assemblée nationale ont délégué leur pouvoir d’écrire la loi au gouvernement grâce aux ordonnances. L’article 38 de la Constitution le permet.
En temps normal, les parlementaires ont horreur de ce système mais, face à l’urgence, ils l’ont accepté pour être réactif face à la crise. Donc par ordonnances, l’exécutif a légiféré sur des pans entiers du droit et sur des sujets qui touchent des millions de Français : décaler le second tour des municipales ou décider de mesures économiques d’urgence...Il y en a eu plus d’une soixantaine...
Contrôle sur place et sur pièces des ordonnances
Les sénateurs, comme les députés, ont la possibilité de contrôler directement sur le terrain et ce, dès le lendemain du lancement du déconfinement, le 12 mai.
Le 12 mai, deux sénateurs réalisent une visite de contrôle à la prison de Fresnes, dans le Val-de-Marne
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Ce jour-là, deux vice-présidents de la commission des Lois, Nathalie Delattre et François-Noël Buffet, décident de se rendre à Fresnes, deuxième prison d’Île-de-France. Ils entendent inspecter le centre pénitentiaire afin de comprendre la gestion de la crise en milieu carcéral et comment le pire a été évité.
« Nous avons voté une loi très générale d’état d’urgence pour la crise, et où nous avons laissé une grande latitude au gouvernement », analyse Nathalie Delattre après sa visite de l’établissement. « Nous sommes là pour contrôler si les mesures ont été les bonnes et comment elles ont pu s’appliquer et donc la visite s’inscrit dans ce cadre de contrôle des ordonnances et du gouvernement », ajoute la sénatrice du Mouvement Radical de Gironde.
Le 26 mai, les deux sénateurs socialistes Patrick Kanner et Eric Kerrouche ajustent leur stratégie avant de dénoncer le recours aux ordonnances.
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Progressivement, avec le déconfinement, cette situation qui doit être l’exception va agacer les sénateurs...Et fin mai, à l’occasion de l’examen d’un nouveau projet de loi du gouvernement demandant le recours à de nouvelles ordonnances, le Sénat décide d’en réduire drastiquement le nombre.
Surtout lorsqu’elles n’avaient plus de rapport avec l’épidémie de covid-19. Pour les sénateurs, il était urgent de tourner la page de ce moment et de voir le Sénat retrouver ses prérogatives.
Muriel Jourda est la rapporteure du projet de loi surnommé « Gloubiboulga ». Elle a participé à réduire le nombre d’ordonnances dans le texte du gouvernement.
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C’est un autre enseignement de cette crise : comment adapter nos institutions à ce type d’épidémie pour éviter de laisser de trop larges pouvoirs à l’exécutif dans notre système démocratique où la séparation des pouvoirs est très importante.
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