Glyphosate : le cri d’alarme de Générations futures

Glyphosate : le cri d’alarme de Générations futures

Ce matin, l’association Générations futures présentait son nouveau rapport sur l’exposition des Français au glyphosate, après avoir mené une étude auprès de trente personnes pour rechercher si l’herbicide était présent dans leur organisme. Les résultats sont sans appel : 100% des échantillons d’urine analysés contenaient du glyphosate.
Public Sénat

Par Alice Bardo

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« Monsanto devrait être condamné pour avoir contaminé toute la planète », s’insurge Arnaud Apoteker, coordinateur du Tribunal Monsanto, juridiction citoyenne et informelle dont la mission est de condamner symboliquement le géant de la biochimie pour crime contre l’humanité et écocide.

Le militant anti-OGM fait partie des trente personnes ayant accepté de prendre part à l’étude diligentée par l’association Générations futures. Comme les autres participants, il a remis un échantillon d’urine au laboratoire allemand Biocheck, chargé de l’analyser pour identifier la présence ou non dans son organisme de glyphosate, substance active du Roundup, le puissant désherbant produit par Monsanto. L’objectif poursuivi par l’association et ses soutiens est d’empêcher le renouvellement de l’autorisation de mise sur le marché européen de l’herbicide, en faisant état du niveau d’exposition de la population à ce produit et à ses potentiels effets néfastes sur l’organisme. « Il faut être précautionneux dans l’attente de connaissances complètes, recommande François Veillerette, directeur de Générations Futures. Le doute doit bénéficier à la santé publique. »

Le glyphosate « probablement cancérogène »

En mars 2015, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a classé le glyphosate comme « probablement cancérogène » pour les humains. Une position que ne partage pas l’Autorité européenne de sécurité sanitaire des aliments (EFSA). En s’appuyant sur les conclusions de ces deux organismes, la Commission européenne a dans un premier temps envisagé de prolonger de 14 ans l’autorisation à la vente du glyphosate, avant de se raviser faute du soutien des Etats membres. L’institution a donc été contrainte de se limiter à 18 mois.

Le 15 mars dernier, ce fut au tour de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) de se prononcer sur la dangerosité de l’herbicide. Comme l’EFSA avant elle, elle écarte le risque cancérogène. François Veillerette regrette que ces agences sanitaires « utilisent les études fournies par les firmes agrochimiques en premier lieu pour étayer leur opinion ». « Elles se basent sur des études menées sur des animaux ! », renchérit le directeur de Générations futures. Il leur oppose deux études du laboratoire Biocheck, l’une conduite auprès de 2000 Allemands il y a deux ans et l’autre sur 48 députés européens l’année dernière. Là encore, 100% des échantillons analysés contenaient du glyphosate, souvent à une concentration particulièrement élevée, comme c’est le cas dans les résultats de l’étude menée en France, dévoilée aujourd’hui.

« C’est particulièrement inquiétant »

Guillaume Meurice, Charline Vanhoenacker et Alex Vizorek font partie des personnalités qui ont participé à l’étude. La chanteuse Emily Loizeau aussi. Elle se souvient de sa réaction en découvrant le résultat de son analyse d’urine, la semaine dernière. « Je m’attendais forcément à ce qu’il y ait du glyphosate, mais pas à ce que je sois dans la fourchette haute car je fais particulièrement attention à mon alimentation et j’ai un mode de vie plutôt sain, confie l’artiste. C’est particulièrement inquiétant car cela signifie que l’ensemble de notre environnement est contaminé. » La concentration de glyphosate dans son urine est de 2,07ng/ml. Bien au-dessus de la concentration maximale admissible pour un pesticide dans l’eau, à savoir 0,1ng/ml.

Emily Loiseau à propos du glyphosate : "C'est assez inquiétant"
01:50

Dans son rapport sur « L’exposition des Français au glyphosate » sorti ce jour, Générations futures indique qu’au-delà des potentiels effets cancérogènes, des phénomènes de perturbation endocrinienne, de stress oxydatif ou encore des effets tératogènes (malformations) ou hépatoxiques (destruction des cellules du foie) pourraient apparaitre, d’après les recherches de l’équipe du professeur Gilles Eric Seralini.

« L’Europe est sous la pression des lobbies »

« C’est pas normal que je trouve du glyphosate dans mon organisme ! » s’indigne François Veillerette, qui a également transmis son urine au laboratoire allemand. Lui aussi est dans « la fourchette haute », avec 1,27ng/ml. Mais cela reste bien inférieur aux 2,4ng/ml de l’ancienne ministre de l’Ecologie Delphine Batho, qui estime que l’ « Europe s’obstine à ne pas reconnaitre sa toxicité pour la santé humaine, sous la pression des lobbies ».

C’est justement pour contrer cette influence que des milliers d’Européens ont signé l’Initiative citoyenne européenne (ICE) contre le glyphosate. 60 ONG se sont engagées dans cette initiative, dont Générations futures. A ce jour, 630 000 signatures ont été recueillies, sur le million nécessaire pour interpeller la Commission européenne. Or le temps presse : l’institution doit prendre une décision sur la ré-homologation du glyphosate début 2018.

« Un Etat membre peut toujours ne pas autoriser un produit homologué au niveau européen, précise François Veillerette. Mais ce serait politiquement intenable » dans la mesure où d’autres pays de l’UE l’autoriseraient encore. « Avant d’en arriver à des solutions de repli au niveau national, il faut essayer d’agir au niveau communautaire », ajoute le président de Générations futures.

Royal « est montée au front »

L’engagement de personnalités politiques françaises reste toutefois un soutien non négligeable pour continuer à mener ce combat de longue haleine. « Ségolène Royal est montée au front, elle s’est même mouillée personnellement », se réjouit le directeur de Générations futures. Il rappelle que la ministre de l’Environnement a toujours marqué son opposition au glyphosate, même lorsque cela impliquait de s’opposer à Stéphane Le Foll, en charge de l’Agriculture.

Ce soutien, les membres de Générations Futures et les militants anti-glyphosate le cherchent désormais auprès des candidats à l’élection présidentielle. Emily Loizeau et François Veillerette saluent le positionnement de Jean-Luc Mélenchon et de Benoît Hamon. Le candidat PS veut en effet interdire les perturbateurs endocriniens et proposer des alternatives aux pesticides. Quant au leader de La France insoumise, il prévoit de refuser les OGM et de bannir les pesticides nuisibles, dont le glyphosate.  « Deux candidats ce n’est pas rien, car il y a quelques années on n’en parlait pas du tout », se réjouit le président de l’association engagée dans la lutte contre les pesticides. « Macron a soutenu la productivité agricole au congrès de la FNSEA, Fillon veut simplifier les normes pour l’agriculture et le FN… » Le résultat de l’élection prochaine va être déterminante pour ces combattants du glyphosate.

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