Hervé Marseille (UC) veut revenir sur le non-cumul des mandats

Hervé Marseille (UC) veut revenir sur le non-cumul des mandats

Le président du groupe centriste au Sénat dépose une proposition de loi visant à revenir sur le non-cumul des mandats instauré en 2014. Objectif affiché : favoriser l’implantation locale des parlementaires. Son texte prévoit une interdiction du cumul des indemnités et limite ce cumul aux communes de moins de 10 000 habitants. Interview.
Public Sénat

Par Héléna Berkaoui

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« Cumulard », le mot résonne comme une insulte et a longtemps servi à qualifier les élus qui empilaient les fonctions électives. Sous François Hollande, une loi est venue encadrer le cumul des mandats en interdisant strictement aux parlementaires (sénateurs, députés ou eurodéputés) d’être élus maire ou même adjoint au maire.

Déjà en 2014, l’opposition de droite alertait contre une réforme qui allait couper les élus de la réalité du terrain. Depuis, la crise des Gilets Jaunes ou l’abstention record aux dernières élections sont vues par certains comme autant de signes traduisant le sentiment d’une déconnexion des élus, spécialement des parlementaires.

« Sénateurs, députés et députés européens sont souvent accusés d’être « déconnectés du réel », « hors-sol » », constate le sénateur des Hauts-de-Seine, Hervé Marseille, qui a été maire de Meudon durant dix-huit ans. Le chef du groupe centriste veut y remédier en revenant sur la loi interdisant l’exercice de fonctions exécutives locales par un député ou un sénateur.

Sa proposition de loi, déposée mercredi 27 juillet, vise ainsi à permettre à un parlementaire national et européen d’être également maire (ou adjoint au maire) d’une commune de moins de 10 000 habitants. Cette proposition de loi qui devrait être débattue à l'automne interdit le cumul des rémunérations liées à ces mandats. Interview. 

Pourquoi voulez-vous revenir sur l’interdiction du cumul des mandats ?

Il est apparu à la faveur des élections départementales et régionales qu’il y a eu beaucoup d’abstention, ce n’est pas nouveau. Beaucoup se sont penchés sur cette situation pour savoir quelle était la raison de cette abstention qui perdure et comment y remédier.

La raison, quand on y regarde de près, c’est surtout qu’il y a un éloignement de la parole publique vis-à-vis de l’électeur. Il y a une distanciation, un éloignement des centres de décisions. On a fait des grandes régions qui ne correspondent pas à grand-chose, on a éloigné les centres de décisions des citoyens et la parole publique elle-même s’est distanciée.

« Il faut permettre aux parlementaires de pouvoir renouer avec un mandat exécutif dans les communes de moins de 10 000 habitants »

Alors comment rapprocher les électeurs des élus ? Il y a certainement plusieurs choses à faire mais une des petites choses qui peut favoriser le retour à la confiance est de rapprocher les élus et en particulier les parlementaires des territoires. Il faut permettre aux parlementaires de pouvoir renouer avec un mandat exécutif dans les communes de moins de 10 000 habitants.

C’est une façon de rapprocher à nouveau les parlementaires des territoires et de veiller à ce qu’il y ait un suivi, un accompagnement. Cela permet aussi au parlementaire de transmettre les préoccupations au niveau du Parlement.

Les parlementaires vous paraissent-ils réellement déconnecter ? Diriez-vous que c’est particulièrement le cas à l’Assemblée nationale où beaucoup d’élus n’ont jamais exercé de mandats locaux ?

Oui, c’est moins le cas au Sénat parce qu’il y a une tradition de travail territorial qui est encore très vivace. A l’Assemblée nationale, vous avez beaucoup de jeunes parlementaires qui n’ont jamais occupé de mandats locaux donc évidemment il y a une méconnaissance et un désintérêt pour les affaires locales.

C’est indispensable qu’il y ait des parlementaires avec des racines dans les territoires. Quand les jeunes députés En marche ont été élus ont leur a dit qu’ils étaient là avant tout pour faire la loi. Mais ils ne font même pas la loi parce qu’elle est portée par la majorité. C’est la volonté de l’exécutif qui prime.

« On voit bien la difficulté d’avoir d’un côté une espèce de caste politique parlementaire et gouvernementale et de l’autre côté une communauté d’élus territoriaux »

L’expérience a montré les limites de la loi sur le non-cumul, on l’a vu avec les Gilets Jaunes. D’ailleurs, le président de la République avait dit, au moment du grand débat, qu’il allait falloir réfléchir à la possibilité pour les parlementaires de cumuler avec les fonctions exécutives locales.

Aujourd’hui, on voit bien la difficulté d’avoir d’un côté une espèce de caste politique parlementaire et gouvernementale et de l’autre côté une communauté d’élus territoriaux, les élus d’en bas et les élus d’en haut.

Vous dites que ce qui pose problème reste le cumul des rémunérations mais le cumul des fonctions ne peut-il apparaître comme un accaparement des pouvoirs ?

Je ne crois pas. Il y avait un courant dans l’opinion assez fort qui était contre le cumul des indemnités. C’est la raison pour laquelle ma proposition de loi interdit le cumul des indemnités. L’expérience a montré que ce qui était vrai en 2014 ne l’est plus aujourd’hui, il faut recréer du lien et redonner du crédit à la parole publique.

Pourquoi établir une distinction entre les villes de moins de 10 000 habitants et les autres ?

Premièrement, mener de front un mandat parlementaire avec les fonctions exécutives d’une commune de moins de 10 000 habitants, ça peut se faire sans difficulté. Deuxièmement, nous avons commandé un sondage IFOP et 57 % des personnes sont favorables à la possibilité du cumul d’un mandat national et d’un mandat de maire d’une ville de moins de 10 000 habitants. Aussi, il faut noter que les villes de moins de 10 000 habitants représentent 97 % des communes de France !

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