Après un discours particulièrement scruté à la Sorbonne, Emmanuel Macron a répété sa volonté « d’ouvrir le débat » sur la mutualisation des armes nucléaires françaises avec les autres Etats de l’Union européenne. Si le président de la République est resté flou sur ses propositions, ces déclarations ont suscité un rejet quasi unanime au sein de la classe politique française.
Les camps Jadot et Hidalgo prêts à « discuter », tout en laissant « les candidatures maturer »
Par Public Sénat
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Une campagne se termine, une autre commence. La victoire, même de justesse, de Yannick Jadot à la primaire écologiste, face à Sandrine Rousseau, clarifie la donne à gauche. On connaît maintenant à gauche les forces en présence sur la ligne de départ. Du moins à cet instant.
Mais à peine Yannick Jadot désigné, ses soutiens chez EELV, à commencer par le numéro 1 du parti, Julien Bayou, ne cachaient pas qu’ils verraient bien la candidate socialiste, Anne Hidalgo, se retirer au profit de l’écolo. Un peu comme un certain Yannick Jadot, qui s’était retiré en 2017 au profit de Benoît Hamon. Chacun son tour en somme. « Il y a des candidatures qui se déclarent et qui n’iront pas au bout », glissait mardi soir, à Pantins, Julien Bayou. Et d’ajouter au sujet de la maire de Paris : « Si elle dit que l’écologie c’est fondamental, prolongeons l’idée, et qu’elle soutienne l’écologie ». Autrement dit Yannick Jadot, qui entend capitaliser sur la dynamique de la primaire.
« Super maladroit »
Tant de délicates attentions ne laissent pas de marbre les socialistes. Le sénateur PS Rémi Féraud, proche soutien d’Anne Hidalgo, s’étonne des déclarations des écolos. « C’est super maladroit de leur part, il ne reste plus qu’une seule femme candidate dans le camp républicain, si Pécresse n’est pas désignée, et ils lui demandent de se retirer… » souligne le socialiste. A l’éventualité du retrait de la maire de Paris, un soutien s’étrangle : « Ce n’est même pas envisageable ».
Selon le PS, la primaire n’aurait en réalité pas donné la dynamique escomptée par EELV. « La vraie surprise de cette primaire, c’est que Jadot a eu un mal fou à être désigné, de justesse. Je ne suis pas sûr que ça lui donne un élan », corrige Rémi Féraud. Patrick Kanner, à la tête des sénateurs PS, salue le processus de la primaire écolo. Mais il souligne au passage que les plus de 100.000 électeurs ne représentent que « 0,2 % du corps électoral… » L’ancien ministre entend aussi rappeler aux écologistes sa vision des rapports de force à gauche :
On peut sauter sur sa chaise comme un cabri, en disant "c’est nous la force motrice". Non, la force motrice, telle que sortie des élections régionales, ce sont les socialistes, qui ont gardé leur région et en ont pris.
Reste que la candidature Jadot, qui revendique une écologie de gouvernement, risque de compliquer le jeu pour Anne Hidalgo, en marchant sur ses plats de bande. Celui qui dès hier soir, appelait à rassembler « les humanistes, les progressistes », parle en partie aux mêmes électeurs que ceux de la maire de Paris. Un électorat notamment urbain. Le risque pour les deux candidats, jusqu’ici au coude à coude dans les sondages : se neutraliser l’un et l’autre.
« C’est dommage que les Verts aient pour priorité, dès la désignation, de taper sur les socialistes »
Mais dans le camp socialiste, on tire une autre conclusion. « Les électeurs de la primaire ont choisi une écologie beaucoup plus compatible avec notre propre projet socialiste, qui est aussi écologique », souligne Patrick Kanner. Autrement dit, il serait plus facile de discuter avec Yannick Jadot que Sandrine Rousseau.
Au PS, on entend se présenter comme rassembleur et pas hégémonique, ce que leur reprochaient les Verts pendant longtemps… « Il ne faut pas perdre de vue la possibilité et la nécessité d’une coalition. C’est pour ça qu’Anne Hidalgo va faire une campagne dans un esprit de rassemblement. C’est dommage que les Verts aient pour priorité, dès la désignation, de taper sur les socialistes. Ce n’est pas une stratégie gagnante », pointe Rémi Féraud, qui pense que « c’est Anne Hidalgo qui pourra rassembler la gauche et les écologistes à la fin ». Il ajoute que « ce n’est pas forcément par les retraits de candidats que ça se passe. Quand Hollande a été élu, le candidat écolo ne s’est pas retiré ».
Hidalgo « est un peu isolée et on attend toujours un réel programme »
Du côté des écolos, on maintient l’idée d’un retrait, sous forme de main tendue. « C’est possible et souhaitable », selon le président du groupe écologiste du Sénat, Guillaume Gontard. Il soutient que Yannick Jadot « sort renforcé » par « une dynamique » qui « rassemble », à la différence d’Anne Hidalgo, « une candidate qui, pour le coup, est un peu isolée, et pour laquelle on attend toujours un réel programme ». Chaque camp affiche en réalité sa main tendue. Guillaume Gontard :
Il faut maintenant que Yannick Jadot et le pôle écologiste tendent la main pour être dans cette dynamique de rassemblement. Anne Hidalgo, et bien d’autres, ont toute leur place dans cette aventure collective.
Le sénateur de l’Isère y va de son allégorie : « Pour réussir un plat, il faut plusieurs ingrédients : un peu d’épices, mais surtout l’unité et un cuisinier qui met en forme tout ça. On a trouvé un grand chef avec Yannick Jadot ».
« A partir de la fin de l’année, début janvier, il va falloir une stratégie, ça suppose un rassemblement »
Pour l’heure, « des discussions vont avoir lieu », assure le sénateur. « On s’appelle et on discute », a lancé hier soir sur LCP-AN Julien Bayou à Olivier Faure, numéro 1 du PS. Invitée de la matinale de Public Sénat ce mardi, Valérie Rabault, présidente du groupe PS de l’Assemblée, a défendu aussi ce dialogue. Mais dans son esprit, il doit profiter à Anne Hidalgo. « Le dialogue a toujours existé, je souhaite qu’il continue. […] On est dans une phase, jusqu’en décembre, où toute l’offre politique va pouvoir être présentée, être débattue, chacun va pouvoir poser ses idées. Evidemment, à partir de la fin de l’année, début janvier, il va falloir une stratégie, ça suppose un rassemblement pour que la candidate de la gauche puisse arriver au second tour de la présidentielle », affirme Valérie Rabaud. Ne reste plus qu’à créer la dynamique d’ici Noël.
« Il faudra que cette discussion reprenne sérieusement. Mais laissons d’abord les candidatures maturer », dit autrement Rémi Féraud. « A ce stade on va se toiser, on est dans une phase de précampagne. Mais les pièces sont maintenant connues sur l’échiquier à gauche », conclut Patrick Kanner. Attention, en jouant aux échecs, on sacrifie parfois sa dame… comme on peut perdre son roi.