Marine Le Pen en quête de voix dans la Manche et les villages des “oubliés”
"On est mal barrés" avec Emmanuel Macron, lâche Nicole Dupont devant un PMU dans la Manche, où Marine Le Pen a tenu un meeting samedi. Sur ces...
Par Anne RENAUT
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"On est mal barrés" avec Emmanuel Macron, lâche Nicole Dupont devant un PMU dans la Manche, où Marine Le Pen a tenu un meeting samedi. Sur ces terres touchées par la désertification, la cheffe du RN espère récolter des voix pour les européennes. Mais certains ne la jugent "pas crédible".
"C'est le bordel" et l'ancienne candidate à la présidentielle doit "remettre de l'ordre dans tout ça", estime Nicole Dupont, auxiliaire de vie à domicile de 50 ans, qui a mis un "gilet jaune" sous son pare-brise et voit tous les jours "la misère".
Emmanuel Macron, "il ne veut rien entendre. Le mieux, c'est qu'il parte", ajoute cette habitante de Saint-Martin-de-Bonfossé, qui a voté pour François Fillon (LR) au premier tour de la présidentielle, puis pour la candidate RN, mais qui n'a "pas le temps" d'aller au meeting dans la commune voisine de Saint-Ebremont-de-Bonfossé, 700 habitants.
Devant quelque 500 militants réunis dans la salle polyvalente, Jordan Bardella, tête de liste du RN pour les européennes, est venu avec Marine Le Pen "souligner l’importance de remettre de la vie dans nos villes et nos villages" des "oubliés", dont l'"élite se fiche éperdument". "Les gares, les commerces, le dernier bistrot ferment autour de vous (...) ce n'est pas leur problème", a-t-il dénoncé, en faisant applaudir les "gilets jaunes" qui réclament plus de pouvoir d'achat et de services publics.
- "Vide identitaire" -
Prônant "la préférence territoriale, la préférence locale", l'essayiste Hervé Juvin, candidat de la société civile sur la liste RN, a dénoncé "la dissolution de nos identités dans un tout globalisé".
Marine Le Pen a pour sa part fustigé l'Allemagne et le "vide identitaire, politique, économique et social qui s'appelle l'Union européenne", les deux n'ayant pas "le droit de décider pour nous", pendant que des opposants à l'extérieur de la salle faisaient sonner leur trompette.
Loin des bastions du Nord et du Sud du pays, la Manche fait partie des terres de conquête du RN, où Marine Le Pen entend engranger des voix aux prochaines élections, européennes comme municipales. A la présidentielle, elle était arrivée à la 3e place au premier tour dans la Manche, derrière Emmanuel Macron et François Fillon.
Marine Le Pen en meeting à Saint-Ebremond-de-Bonfosse le 9 février 2019
AFP
"Pour dépasser l'étiage de 34% de voix à la présidentielle, rien ne doit être négligé. Même si ces départements ne sont pas dynamiques pour elle", note le politologue Jean-Yves Camus.
Samedi prochain, Marine Le Pen tiendra encore un meeting dans l'Ouest, dans le Maine-et-Loire, où François Fillon était arrivé en 2e position au premier tour. Elle y viendra avec le candidat RN ancien député LR de Gironde Jean-Paul Garraud.
Patrick B., 54 ans, qui habite à Saint-Ebremond, est venu au PMU de Canisy prendre des paris hippiques. Cet ouvrier qualifié ne juge "pas le RN crédible sur l'Europe" depuis que la sortie de l'euro n'est plus la priorité pour le parti.
Il revotera pour Emmanuel Macron qui a permis de "changer, et de sortir du clivage droite-gauche", même s'il est "d'accord avec plusieurs des revendications des +gilets jaunes+".
Au bar-PMU, le seul à plusieurs kilomètres à la ronde, les deux tenancières ne veulent pas parler politique car "ça crée des tensions".
"Air Haine, une balle dans le front", pouvait-on lire samedi tagué sur le mur de la salle du meeting.
Dédé, la cinquantaine et le regard fuyant, ne va pas voir Marine Le Pen. "Les politicards j'y crois plus. Ils sont tous copains pour se voter les mêmes lois et ne penser qu'à leur gueule".
Marine Le Pen en meeting à Saint-Ebremond-de-Bonfosse le 9 février 2019
AFP
Dans cette région rurale, "il y a un sentiment d'abandon, les services publics ferment, des agriculteurs sont en difficulté. Il y a des suppressions de lignes de train. Et des implantations de migrants sont faites de manière autoritaire", dénonce le délégué du RN dans la Manche, Jean-Jacques Noël.
La Manche n'est pourtant pas une terre d'immigration, mais pour cette retraitée qui sort de la boulangerie, "il y a trop d'étrangers. Quand on traverse les trottoirs, on n'entend plus un mot de français. Je ne suis plus chez moi".
Un drapeau tricolore à la main,Sylvie, 67 ans, qui n'a "jamais voté" pour Marine Le Pen ou assisté à un meeting, est venue pour "écouter".
Depuis la nomination de Michel Barnier à Matignon, la ligne du Parti socialiste opposée à Olivier Faure multiplie les prises de parole tenant sa direction pour responsable dans l’échec de la nomination de Bernard Cazeneuve. Une accusation dont elle se défend, alors que le parti à la rose souhaite peser davantage à gauche.
Le nouveau locataire de Matignon consulte en vue de la nomination de son gouvernement. Côté LR, le nom du patron des sénateurs de droite, Bruno Retailleau, revient avec insistance. « Une hypothèse plus que possible », avance un sénateur LR, selon qui « on lui a demandé ». Mais rien n’est encore fait. Si des macronistes seront de la partie, les choses semblent bouchées à gauche.
Cela pourrait être le premier obstacle du gouvernement Barnier, avant même l’adoption du budget 2025 d’ici la fin de l’année. Les députés du Rassemblement national ont confirmé qu’ils entendaient déposer, dans le cadre de leur niche parlementaire prévue le 31 octobre, un texte d’abrogation de la réforme des retraites. Du côté du Nouveau Front populaire, qui proposait le retour de la retraite à 60 ans dans son programme, l’idée de devancer le RN en mettant une proposition similaire à l’ordre du jour dès l’ouverture de la session ordinaire à l’Assemblée fait aussi son chemin. Rien n’assure toutefois que les deux familles politiques joindraient leurs voix pour faire adopter un tel texte. « Nous ne serons pas condamnés à voter la proposition de loi de ces hypocrites, qui sont responsables du fait qu’aujourd’hui nous avons un partisan de la retraite à 65 ans à Matignon », fustigeait le sénateur communiste Ian Brossat, invité de la matinale de Public Sénat ce 9 septembre. Quelques minutes plus tard, sur le même plateau, le député Rassemblement national Sébastien Chenu rétorquait, accusant la gauche de « sectarisme ». Mathématiquement, la réforme des retraites, adoptée dans la douleur au mois de mars 2023, trouve tout de même une majorité contre elle à l’Assemblée. Face à ce constat, le nouveau Premier ministre Michel Barnier a donc tenté d’arrondir les angles en annonçant le 6 septembre, sur le plateau de TF1, son souhait d’ « ouvrir le débat sur l’amélioration de cette loi pour les personnes les plus fragiles », sans pour autant « tout remettre en cause ». « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme » Quelles « améliorations » le gouvernement Barnier pourrait-il apporter au texte ? Au sein de la droite et du bloc central, le retour à la retraite à 62 ans semble en tout cas exclu. « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme. On l’a votée avec beaucoup de difficultés, on garde les acquis », défend un cadre de la majorité sénatoriale. Quelques ajustements du texte ne sont donc pas à exclure, ne serait-ce que pour « répondre », estime-t-il, à l’initiative parlementaire du RN et aux syndicats, qui prévoient une manifestation le 1er octobre. La ligne rouge des 64 ans n’interdit pas, par ailleurs, de rediscuter d’autres points de la réforme. Au Sénat, l’introduction de nouvelles mesures sur l’emploi des seniors semble par exemple faire consensus au sein de la majorité. À l’occasion de l’examen du texte, la chambre haute s’était déjà exprimée en faveur de l’instauration d’un « index seniors », censé pousser les entreprises à davantage de transparence sur l’emploi des salariés en fin de carrière, et sur la création d’un « CDI seniors », nouveau contrat de travail exonéré de certaines cotisations. Les deux amendements avaient finalement été censurés par le Conseil constitutionnel. « Il faut reprendre cet aspect là des choses, pour associer à cette réforme des retraites un véritable changement de politique vis-à-vis de l’emploi des seniors. Il faut sans doute aussi travailler, en lien avec les partenaires sociaux, sur la question de la pénibilité notamment dans les métiers du bâtiment ou de l’aide à la personne », propose la sénatrice centriste Élisabeth Doineau. En revanche, pour la rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale, une remise en cause complète de la réforme serait « suicidaire » : « Il faut être lucide face aux réalités budgétaires du pays, pour ne pas entraîner la France vers de nouvelles dépenses qui seraient un naufrage. » « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans » Les déclarations de Michel Barnier, qui a indiqué que les « améliorations » qu’il entendait proposer respecteraient « le cadre budgétaire », ont donc de quoi rassurer les défenseurs de la réforme. À gauche, l’accueil de l’annonce du nouveau Premier ministre est évidemment beaucoup plus froid. « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans, puisque l’essence même de cette réforme c’est le report de l’âge de départ à la retraite », dénonce la sénatrice Monique Lubin, qui défendait déjà en février dernier une proposition d’abrogation de la réforme. L’élue socialiste doute par ailleurs de la sincérité de l’initiative du nouveau Premier ministre, qui défendait du temps de la primaire des Républicains en 2021 un report de l’âge légal à 65 ans. « Sa déclaration me laisse songeuse. Je pense qu’elle a surtout pour but de donner des gages, de contrebalancer la tendance à droite de ce futur gouvernement, au moment où il cherche des ministres de centre-gauche pour le composer », estime Monique Lubin. Du côté des syndicats, le scepticisme est aussi de mise. Au micro de France Inter le 8 septembre, la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon a réclamé « a minima » une suspension de la réforme, le temps de la réouverture des discussions, pour bloquer l’augmentation progressive de l’âge de départ à la retraite. De son côté, la CGT a fait de l’abrogation de la réforme l’un des mots d’ordre de la journée de mobilisation syndicale du 1er octobre.
Alors que se tiennent mardi et mercredi les journées parlementaires des groupes Ensemble pour la République et Horizons, une incertitude planait sur la venue du Nouveau Premier ministre. Le parti d’Edouard Philippe a envoyé une invitation à Michel Barnier. Du côté du groupe Ensemble pour la République dirigé par Gabriel Attal, on semblait vouloir garder ses distances.