Réforme des institutions : Philippe Bas met en garde le gouvernement contre « une régression » de la démocratie

Réforme des institutions : Philippe Bas met en garde le gouvernement contre « une régression » de la démocratie

Philippe Bas, président de la Commission des lois, et sénateur LR de la Manche, était l’invité de Territoire d’Infos ce jeudi matin, sur Public Sénat. Interrogé sur la réforme des institutions, il appelle le gouvernement à ne pas tomber dans le populisme.
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La deuxième et dernière partie de la réforme des institutions, concernant les projets de loi organique et ordinaire, ont été présentés en Conseil des ministres, mercredi. Nombre de sénateurs de l’opposition dénoncent un passage en force. « Je ne dirais pas ça. Parce que le Président de la République et le gouvernement proposent. Mais c’est le Parlement qui décide. Et je ne me sens nullement sous la pression » déclare Philippe Bas, président de la Commission des lois, et sénateur LR de la Manche.

« Nous sommes le pays, je crois, parmi les démocraties, ou le Parlement est le moins fort. C’est la Vème République. Nous avons voulu un gouvernement stable, qui puisse réformer. Je pense que c’est une bonne chose, mais je pense que c’est une mauvaise chose, que le Parlement ne soit pas le lieu de la délibération. Au fond, le gouvernement ne peut pas exprimer à lui seul la démocratie » estime-t-il.

« Plus le lien est fort entre l’élu et les citoyens, plus la démocratie a de la vitalité » 

Le sénateur rappelle l’importance de son métier, au sein de la vie publique. « Nous sommes élus. Et les élus ont un avantage, c’est qu’ils sont au contact des Français. Nous sommes des élus des territoires. Nous sommes en contact avec les maires, avec les Français, nous connaissons les réalités ».

Éloigner les sénateurs des territoires ne permettrait-il pas d’éviter une sorte de clientélisme ? « Je ne crois pas du tout qu’il y ait une forme de clientélisme » s’indigne Philippe Bas. Au contraire, selon lui, « plus le lien est fort entre l’élu et les citoyens, plus la démocratie a de la vitalité ». « Ce qui est important, c’est de renforcer ce lien. Vous imaginez une démocratie où le lien serait complètement distendu entre le maire et les citoyens ? ».

Le sénateur prend l’exemple de son département pour aborder sur la question de la réduction du nombre de parlementaires, prévue dans la réforme : « Regardez, la Manche, il y a quatre députés. Un grand territoire. Il n’y en aura plus que deux. Est-ce que vous croyez que les Français pourront parler facilement à leurs députés, leur dire ce qu’il ne va pas ? Et est-ce que vous croyez que les députés sauront bien ce qu’il y a dans la tête, dans le cœur, dans les tripes des Français ? Ce sera, au contraire, une grande régression de la démocratie ».

Entre une mesure « populaire et populiste, il y a un glissement que je ne veux surtout pas franchir »

Philippe Bas rappelle qu’il n’est pas strictement opposé à la réduction du nombre de parlementaires, mais que ce point devra être négocié avec le gouvernement. « J’ai bien entendu que c’était une mesure populaire. Mais entre populaire et populiste, il y a un glissement que je ne veux surtout pas franchir ».

L’élu met en garde le Président : « Je crois qu’en tout cas, il doit être attentif à ce problème. Il ne peut pas à lui seul, incarner et représenter la démocratie française ! ». « Au fond le Président de la République est élu par une majorité (…). Le Parlement, lui, représente tous les Français, et pas seulement ceux de la majorité » relève-t-il.

Sur le sujet de la proportionnelle, le président de la Commission des lois est clair : « Moi je suis contre en général ». « La proportionnelle pour élire des députés de la nation, sur une liste nationale, alors cette liste c’est la cooptation par les partis politiques de gens qui n’ont jamais rencontré un Français, qui n’ont pas de bases locales, et qui sont tout à fait aériens ». « Je ne veux pas d’élus qui soient de purs apparatchiks » tranche-t-il.  

Le sénat entièrement renouvelé en 2021 ?

Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur, a confirmé son souhait de voir le Sénat entièrement renouvelé en 2021. Philippe Bas informe que ses collègues et lui n’ont appris cette volonté que tardivement. « On ne peut pas dire, puisqu’à juste titre, le Président de la République   souhaite mettre en œuvre son programme, que ça fasse partie de son programme. Alors pourquoi avoir sorti ça du chapeau à la dernière minute ?» interpelle-t-il.

Le sénateur a déjà son avis : «  Le Sénat c’est la continuité, (…) c’est une chambre de sagesse, de réflexion qui défend les libertés, c’est un contre-pouvoir, mais qui ne fait pas de l’obstruction ». Il rappelle que même sous le gouvernement socialiste, le Palais du Luxembourg a voté 75% des textes. « Si ça marche comme ça, c’est parce que le Sénat est renouvelé par moitié, pas d‘un seul coup ». « Il n’y a pas d’autres raisons, à cette proposition, que de faire des élections sénatoriales permettant de remplacer tout le Sénat, après les élections municipales, et on sait que les élections municipales déterminent la composition du Sénat. L’idée au fond que je vois (…), c’est qu’il [Macron] lui reste dans la République, un contre-pouvoir, et il voudrait le mettre à la botte ».

« C’est de la politique politicienne, et il faut le dénoncer » conclut-il. Il souligne cependant que cette décision ne pourra entrer en vigueur que par une décision du Sénat lui-même.

 

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