Emmanuel Macron restant résolument mutique dans l'affaire Benalla, Edouard Philippe et son gouvernement seront soumis mardi au nom de l'exécutif au feu roulant des questions des députés et sénateurs
Affaire Benalla: séances musclées d’explications en vue au Parlement
Emmanuel Macron restant résolument mutique dans l'affaire Benalla, Edouard Philippe et son gouvernement seront soumis mardi au nom de l'exécutif au feu roulant des questions des députés et sénateurs
Par Jérémy MAROT
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Emmanuel Macron restant résolument mutique dans l'affaire Benalla, Edouard Philippe et son gouvernement seront soumis mardi au nom de l'exécutif au feu roulant des questions des députés et sénateurs, après plusieurs jours de désordre, blocages et de premières auditions parlementaires lundi.
A 15h00 à l'Assemblée, puis 16h45 au Sénat, les ministres devront faire bloc afin de défendre l'Elysée, traversé par la première grande crise politique du quinquennat Macron après la diffusion de vidéos montrant Alexandre Benalla, un proche collaborateur du chef de l'Etat, en train de frapper et malmener deux manifestants le 1er mai. Dans le même temps, un premier membre de l'Elysée, le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, sera entendu par la Commission d'enquête de l'Assemblée à 16H30.
Le secrétaire général de l'Elysée Alexis Kohler, bras droit du chef de l'Etat, répondra pour sa part jeudi aux questions des sénateurs, signe que l'affaire tutoie bien les sommets.
Les explications de l'exécutif sont d'autant plus attendues qu'elles ont été ardemment réclamées par les oppositions.
Le ministre de l'Intérieur français Gérard Collomb arrive à son audition devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'affaire Benalla, le 23 juillet 2018
AFP
Celles-ci, profitant d'une majorité "au début perdue" selon les mots d'une source gouvernementale, ont provoqué de sérieuses secousses à l'Assemblée. Conséquence: l'étude du projet de loi constitutionnel, au point mort, a fini par être renvoyée à la rentrée.
"Après l'obstruction et la polémique, c'est désormais le temps où le gouvernement va répondre aux parlementaires", souligne-t-on à Matignon, où l'on se félicite d'un "début de retour à la normale" dans l'hémicycle, avec la reprise lundi après-midi des travaux, à savoir l'examen du projet de loi sur la formation professionnelle.
A l'image d'Emmanuel Macron, Edouard Philippe s'est montré jusque-là d'une remarquable réserve, malgré les coups de boutoir de droite et de gauche lui demandant de venir s'expliquer au plus vite dans l'hémicycle. Refusant la pression, le Premier ministre n'a pas souhaité donner d'autre cadre à ses réponses que ces traditionnelles séances de questions au gouvernement où il se rendra "l'esprit combatif", selon son entourage.
"On aurait fait le procès à l'exécutif d'interférer dans une affaire si on avait parlé", souligne auprès de l'AFP le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, en estimant qu'Emmanuel Macron a "fait le choix des institutions".
Galaxie des personnes supposément impliquées dans l'affaire Benalla, du nom de l'ex-collaborateur de l'Elysée qui a frappé un manifestant lors du 1er mai
AFP
"Il n'y aurait donc que des mauvais choix: on parle, on interfère; on ne parle pas, on se cache", ajoute-t-il en appelant dorénavant à "mettre du rationnel dans un débat en proie à beaucoup de passions politiques et qui au fond fait un peu pschitt". Lundi, la macronie est monté crescendo au creneau pour réfuter à l'unisson toute "affaire d'Etat".
Cette ligne sera de nouveau tracée mardi lors de l'habituel petit-déjeuner de la majorité à Matignon, auquel participent les patrons du groupe La République en Marche, Richard Ferrand, et MoDem, Marc Fesneau, ainsi que le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement Christophe Castaner. Le Premier ministre pourrait ensuite se rendre à la réunion du groupe LREM (à partir de 11H00) qui se tiendra à huis clos, sans les collaborateurs, avant une après-midi vigilance orageuse.
- "Ca va être chaud!" -
"Ca va être chaud! Ca va être une audition qui ne dit pas son nom", prévient ainsi le député de la France insoumise Eric Coquerel avant ces +QAG+.
Le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, à Ajaccio, le 6 février 2018
POOL/AFP/Archives
"Que les oppositions veuillent consacrer tout leur temps à une affaire qui n'en est pas une" mais est "une dérive individuelle", "c'est leur droit le plus strict", rétorque M. Griveaux en assurant qu''il y a des sujets qui intéressent plus les Français".
Au Sénat, "les sept premières questions seront réservées à l'affaire", a annoncé lundi à l'AFP le président du groupe socialiste Patrick Kanner.
Cependant, "le Premier ministre n’a aucun pouvoir ni aucune véritable responsabilité dans cette affaire, qui relève exclusivement de l’Élysée", a de son côté critiqué auprès de l'AFP Marine Le Pen.
Une partie de cette attente fébrile a été désamorcée par l'audition lundi du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb devant la commission des Lois de l'Assemblée, dotée pour cette occasion exceptionnelle de prérogatives d'enquête. "Un tribunal politique", a déjà dénoncé sur LCI M. Griveaux, en s'interrogeant sur la "déontologie" de cette commission, notamment du co-rapporteur (LR) Guillaume Larrivé.
Le ministre d'Etat a nié avoir commis une quelconque faute dans la gestion de cette affaire et a imputé les éventuels manquements notamment au préfet de police Michel Delpuech. Qui, dans la foulée, s'est défendu pied à pied et à renvoyé Elysée et place Beauvau à leurs responsabilités.
M. Collomb devra répéter l'exercice mardi devant la commission des Lois du Sénat.
Avant cette explication, l'Elysée a démenti lundi soir que des travaux soient envisagés pour réunir deux appartements afin de loger Alexandre Benalla dans une dépendance du palais, quai Branly à Paris, comme avancé par L'Express.
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Alors qu’Emmanuel Macron se dit prêt à recourir au référendum sur la fin de vie, en cas de blocage au Parlement, Patrick Kanner, à la tête du groupe PS du Sénat, salue cette annonce. « C’est le seul moment où je l’ai trouvé courageux, cohérent, en disant qu’il faut sortir une loi sur la fin de vie », affirme l’ancien ministre.
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