Affaire Ferrand: un juge ouvre une enquête pour “prise illégale d’intérêts”

Affaire Ferrand: un juge ouvre une enquête pour “prise illégale d’intérêts”

Classé sans suite à Brest, le dossier Richard Ferrand rebondit à Paris: un juge d'instruction financier va mener les...
Public Sénat

Par Nathalie ALONSO et Benjamin LEGENDRE

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Classé sans suite à Brest, le dossier Richard Ferrand rebondit à Paris: un juge d'instruction financier va mener les investigations dans l'affaire immobilière qui avait coûté à l'actuel patron des députés LREM sa place au gouvernement.

Le juge d'instruction du pôle financier de Paris Renaud Van Ruymbeke, saisi par l'association anticorruption Anticor, a ouvert le 12 janvier une information judiciaire pour "prise illégale d'intérêts", recel et complicité de ce délit, a indiqué une source judiciaire, après des informations du Canard enchaîné.

"C'est agaçant, pas très agréable", a réagi sur BFMTV Richard Ferrand, soutien de la première heure d'Emmanuel Macron.

"Je sais que je n'ai rien commis qui soit répréhensible mais je sais aussi que nous sommes dans un Etat de droit et (...) je suis un républicain qui fait confiance à la justice de son pays", a-t-il ajouté, critiquant la démarche d'une association "qui a souhaité poursuivre et s'acharner" contre lui.

Révélée par l'hebdomadaire satirique le 24 mai dernier, l'affaire porte sur le bien immobilier acquis par la compagne de Richard Ferrand et loué aux Mutuelles de Bretagne, dont il était alors le directeur général (1998-2012). Avec cette question: Richard Ferrand a-t-il profité de ces fonctions pour permettre à sa compagne de rembourser son investissement avec les deniers des Mutuelles?

Le 13 octobre, le parquet de Brest avait classé sans suite son enquête préliminaire notamment pour des questions de prescription, conduisant Anticor à déposer quelques semaines plus tard une plainte avec constitution de partie civile. Dans ce cas de figure, cette procédure permet de passer outre le refus du parquet d'entamer des poursuites pénales, en obtenant la désignation directe d'un juge d'instruction, ce qui est quasi-automatique sous certaines conditions.

"Il était important que dans ce dossier une réponse judiciaire soit donnée aux faits reprochés à M. Ferrand, et un juge indépendant va pouvoir étudier les suites à donner à l'affaire", a indiqué à l'AFP Jérôme Karsenti, avocat d'Anticor. Au moment du dépôt de sa plainte, en novembre, l'association s'était tournée vers le pôle financier de Paris en raison de sa compétence nationale concernant les affaires "d'une grande complexité".

- "Tombé de l'armoire" -

M. Ferrand était devenu chef du groupe La République en marche à l'Assemblée nationale après avoir dû quitter son poste de ministre de la Cohésion des territoires en juin.

Les faits visés remontent à 2011. A l'époque, les Mutuelles de Bretagne, qui cherchaient à louer des locaux pour installer un centre de soins à Brest, avaient choisi parmi trois offres la proposition d'une société civile immobilière (SCI) appartenant à 99% à sa compagne, l'avocate Sandrine Doucen. Ce bien acquis pour un prix de 375.000 euros a été financé par les loyers versés par les Mutuelles de Bretagne.

Le procureur de Brest reconnaissait avoir pu "envisager l'ouverture d'une information judiciaire" sur des soupçons de prise illégale d'intérêts. Mais il s'est avéré que "l'infraction éventuelle" était "prescrite" depuis le 19 juin 2015, selon les règles de prescription (trois ans) alors en vigueur, avait-il expliqué.

Selon la plainte d'Anticor, M. Ferrand a "volontairement dissimulé l'infraction" aux yeux du commissaire aux comptes et de six des neuf administrateurs qui n'auraient pas été informés que la future propriétaire du bien était sa compagne. Le président des Mutuelles à l'époque a affirmé ne l'avoir appris que fin 2013 ou début 2014, selon la plainte. "Je suis tombé de l'armoire. Je pense que M. Ferrand aurait pu me le dire", a-t-il déclaré aux enquêteurs.

Après les révélations, le parquet national financier s'était déclaré incompétent pour ouvrir une enquête, finalement lancée à Brest. Mais, après la plainte d'Anticor, il ne s'est pas opposé à l'ouverture de cette instruction, selon l'avocat de l'association. "Le parquet national financier, en requérant l'ouverture d'une information judiciaire, accrédite la thèse d'Anticor selon laquelle les faits ne sont pas prescrits", a estimé l'avocat.

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