Après le remaniement, Macron consent l’autocritique mais reste ferme sur son cap
Aucun changement de cap mais la promesse d'améliorer le quotidien des Français, de rassembler plus largement et de moins "choquer" : Emmanuel...
Par Jérôme RIVET, Laurence BENHAMOU
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Aucun changement de cap mais la promesse d'améliorer le quotidien des Français, de rassembler plus largement et de moins "choquer" : Emmanuel Macron a solennellement assuré mardi soir qu'il poursuivrait ses réformes, dans un effort visible de pédagogie peu après le remaniement du gouvernement.
Dans une déclaration face caméra, au style traditionnel rarement vue depuis son arrivée au pouvoir, Emmanuel Macron a expliqué vouloir redonner le "sens profond" de son action, appelant à résister au repli, en France comme en Europe, en vue des prochaines élections européennes de mai.
"J'entends les critiques", a-t-il assuré, en réponse aux polémiques sur son style, reconnaissant que "son parler vrai avait pu choquer". Une autocritique après les critiques visant ses phrases à l'emporte-pièce, comme le "pognon de dingue" des aides sociales ou l'ironie sur les "Gaulois réfractaires au changement" ou encore l'appel à un chômeur à "traverser la rue" pour trouver du travail ou aux retraités à ne plus "se plaindre".
Edouard Philippe et Christophe Castaner, le nouveau ministre de l'Intérieur (g), le 16 octobre 2018 Place Beauvau
AFP
Mais il souligne "une volonté d'action plus forte encore". Son ambition est de "ne pas se soumettre", une périphrase dont il a ponctué son discours. "Ne pas se soumettre aux inégalités de destin et aux injustices" et que la France "conserve la maîtrise de son destin".
"Progressivement, votre quotidien va s'améliorer", a-t-il aussi promis aux Français, dont il dit avoir entendu "l'impatience", mais "le temps que nous prenons et celui de nos institutions", a-t-il plaidé, alors que la croissance et la baisse du chômage ne sont toujours pas au rendez-vous.
Le nouveau ministre de l'Intérieur Christophe Castaner rencontre des policiers aux Lilas, en Seine-Saint-Denis, le 16 octobre 2018
AFP
Il a mis en garde contre un monde qui "se fracture. De nouveaux désordres apparaissent, et l'Europe bascule presque partout vers les extrêmes et, à nouveau, cède au nationalisme".
Le président de la République a aussi souhaité un "rassemblement le plus large" en promettant de "s'appuyer sur toutes les forces du progrès et de la réforme, les associations, les élus locaux", autant de corps intermédiaires qui se sont sentis négligés.
- "Mecano" -
Le chef de l'Etat a voulu faire comprendre le "sens profond" de son action, après avoir procédé mardi au premier remaniement d'ampleur du quinquennat, en nommant au gouvernement huit nouveaux membres et un proche, Christophe Castaner, à l'Intérieur, sans véritable coup d'éclat.
Le gouvernement d'Edouard Philippe après le remaniement
AFP
L'opposition a immédiatement fustigé sur Twitter un discours coupé de la réalité. "Intervention complètement surréaliste ! Un discours pompeux totalement coupé des réalités que vivent les Français. À quand le prochain #remaniement !?", a tweeté l'ancien allié de Marine Le Pen à la présidentielle, Nicolas Dupont-Aignan.
"Allocution du Président de la République totalement creuse et étrangement crépusculaire...", a jugé la cheffe d'extrême droite Marine Le Pen.
Emmanuel Macron "bavarde sur un mode paroissial et parle de tout sauf du nouveau gouvernement qu'il a mis 15 jours à constituer. La fin s'avance", a relevé pour sa part le chef de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon (gauche radicale).
- "A bout de souffle" -
Et pour le chef du PS Olivier Faure, "un pseudo mea culpa, des grands principes sans aucun contenu opérationnel... un clivage artificiel pour les Européennes... Un replâtrage ministériel. C'est +à bout de souffle+ sans la nouvelle vague!".
Le nouveau ministre de la Culture, Franck Riester, devant l'Assemblée nationale le 16 octobre 2018
AFP
Après 15 jours d'attente depuis la démission fracassante du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, cette équipe doit donner un nouvel élan après un été et une rentrée chaotiques, marqués par l'affaire Benalla et le départ surprise de Nicolas Hulot.
Ce "mecano gouvernemental" ne "marque pas vraiment un rééquilibrage à gauche", souligne Bruno Cautrès, du Cevipof. "Permettra-t-il à Emmanuel Macron de combattre l'impopularité? Je n'en suis pas sûr".
Sans nouvelle personnalité connue, le principal changement est la nomination de Christophe Castaner au ministère de l'Intérieur. Ce fidèle des fidèles du président, qui va quitter la tête de La République en Marche (LREM), sera épaulé par un expert de la sécurité, Laurent Nuñez, actuel directeur de la DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure).
Signe d'une recherche d'équilibres politique, Françoise Nyssen quitte le ministère de la Culture, remplacée par le centre-droit Franck Riester, Stéphane Travert laisse le portefeuille de l'Agriculture à l'ex-sénateur PS Didier Guillaume et Marc Fesneau, un proche de François Bayrou, devient ministre chargé des Relations avec le Parlement.
La création d'un ministère des Territoire et plusieurs secrétariats d'Etat traduisent des priorités de l'exécutif : le secrétariat à l'Egalité entre les femmes et les hommes de Marlène Schiappa est étendu à la lutte contre les discriminations. Gabriel Attal, 29 ans, jeune garde de la macronie, est chargé de mettre en place le Service national universel. Christelle Dubos, députée LREM et ex-travailleuse sociale, est chargée de la lutte contre la pauvreté, au côté d'Agnès Buzyn.
Dans l'opposition, ce remaniement "ressemble plus à une baudruche en train de se dégonfler", a ironisé Christian Jacob (LR).
Jean-Luc Mélenchon a pour sa part accusé le Premier ministre d'avoir orchestré une "énorme opération de police politique" avec des perquisitions mardi matin à son domicile ainsi qu'au siège de La France insoumise et chez plusieurs de ses collaborateurs.
La réunion de la dernière chance autour de Michel Barnier aurait abouti à un accord entre les différentes forces politiques prêtes à soutenir le nouveau premier ministre. Les LR aurait accepté de lâcher du lest au profit des macronistes. Michel Barnier rencontre Emmanuel Macron en début de soirée.
Une nouvelle formation de gauche européenne va se former d'ici quelques semaines. Pour s'émanciper des communistes au sein du Parti de la gauche européenne (PGE), Manon Aubry et La France Insoumise (LFI) travaillent à la création d'une nouvelle structure à l'intérieur du groupe The Left. Pour la fonder, ils s'appuient sur une alliance déjà formée avec les mouvements de gauches radicales espagnols, finlandais, danois ou suédois.
Les groupes parlementaires écologistes et communistes tenaient, ce jeudi, une journée de travail en prévision de l’examen du Budget. L’occasion de définir une ligne vis-à-vis de la proposition de résolution visant à destituer le chef de l’Etat validé cette semaine par le Bureau et sur la proposition du RN visant à revenir à la retraite à 62 ans.
Alors que deux personnes ont été tuées par les forces de l’ordre, le sénateur LR de l’île, Georges Naturel, pointe les conséquences du blocage par les autorités de la route de Saint-Louis, pour raison de sécurité, qui touche 10.000 personnes. Globalement, « on a une crise sociale et humanitaire qui se prépare d’ici la fin de l’année », alerte l’élu de Nouvelle-Calédonie.