Invités à débattre du budget 2025 sur Parlement hebdo, le rapporteur LR de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, et le député PS Arthur Delaporte, s’opposent sur le sujet. « Il faudra bien faire des efforts », défend le sénateur LR, quand le socialiste dénonce « un effort incommensurable ».
Budget de l’Elysée : « Forte hausse des dépenses » de 3,7 millions d’euros, dénonce le sénateur Jean-Pierre Sueur
Par Public Sénat
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C’est une goutte d’eau dans le budget de l’Etat. Mais elle n’en reste pas moins symbolique. Le budget de l’Elysée est en hausse en 2020, après avoir déjà augmenté en 2018. C’est ce que pointe le sénateur PS Jean-Pierre Sueur, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2020. Il est chargé d’un rapport sur la mission « pouvoirs publics », qui inclut le Palais présidentiel.
Interrogé par publicsenat.fr, le sénateur du Loiret dénonce « la forte hausse des dépenses de l’Elysée ». Et pour cause : en 2020, les dépenses du Palais vont ainsi passer de 106.780.000 euros à 110.516.000 euros, soit une augmentation +3,5 % avec 3,7 millions d’euros en plus.
« Sous François Hollande, la dotation de l’Etat était passée à 100 millions d’euros »
La dotation de l’Etat à l’Elysée augmente elle de 2,3 millions d’euros, passant de 103 millions à 105,3 millions d’euros, soit +2,25 %. L’Elysée doit donc utiliser ses réserves pour assurer la totalité de ses dépenses. « Il puise 4 millions d’euros. Or ces disponibilités étaient de 17,1 millions d’euros fin 2018. Ce n’est pas tenable à terme » souligne Jean-Pierre Sueur. En 2020, la présidence avait déjà prélevé 5,6 millions d’euros dans ses réserves.
A noter que l’Assemblée et le Sénat font la même chose et se retrouvent aussi à puiser, comme les années précédentes, dans leurs « disponibilités », c’est-à-dire leurs réserves : 48,5 millions d’euros en 2020 pour le Palais Bourbon et 30,6 millions d’euros pour le Palais de Marie de Médicis.
Le socialiste ne peut s’empêcher de faire la comparaison avec le quinquennat précédent. « Sous François Hollande, la dotation de l’Etat était passée à 100 millions d’euros en 2015, 2016 et 2017. Et dès qu’Emmanuel Macron arrive, ça augmente. Et là, à nouveau » constate Jean-Pierre Sueur. Soit depuis l’élection d’Emmanuel Macron une hausse de 5 millions d’euros (+5%) de la dotation de l’Etat à l’Elysée, quand celles de l’Assemblée nationale (517 millions) et du Sénat (323 millions) sont stables en 2020 et que le Président demande aux ministères de faire des économies.
Patrick Strzoda a refusé de recevoir Jean-Pierre Sueur
A noter que ce rapport s’est fait dans « des conditions pour le moins particulières », peut-on lire. « Pour la première fois, la présidence de la République a refusé de donner suite à des demandes réitérées d’audition de votre rapporteur auprès des services de la présidence de la République qui n’ont finalement consenti qu’à des réponses écrites laconiques » regrette Jean-Pierre Sueur dans son rapport. « J’ai demandé à être reçu par Patrick Strzoda, le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron. Il n’a pas voulu. J’ai pourtant été reçu tous les ans » précise à publicsenat.fr Jean-Pierre Sueur, qui regrette « un geste peu républicain ».
La commission d’enquête du Sénat sur l’affaire Benalla, dont Jean-Pierre Sueur était co-rapporteur, a visiblement laissé des traces. Pour rappel, le bureau de la Haute assemblée avait transmis au procureur le cas de Patrick Strzoda pour possible « faux témoignage », dossier classé sans suite par la justice.
« Augmentation du coût des déplacements présidentiels »
Dans le détail, qu’on se rassure, on est loin du « barbecue de l’Elysée » avec des « bains de champagne », « Madonna » et « Eminem », comme l’avait imaginé avec humour le chanteur Philippe Katerine (écouter la chanson ici). Le garden-party n’existe d’ailleurs plus depuis 2010.
La hausse des dépenses l’année prochaine s’explique plutôt « par l’augmentation substantielle des « moyens généraux » (+ 3 millions d’euros en autorisations d’engagement) et par l’augmentation du coût des déplacements présidentiels » précise le rapport, qui passe de 14,3 millions d’euros à 15,6 millions d’euros en 2020. Le socialiste souligne qu’il y a « deux avions, à disposition du chef de l’Etat, un Airbus A 330, dont l’usage coûte beaucoup plus cher que l’autre, un Falcon ». De quoi peut-être réduire un peu la facture.
« La "réduction du train de vie" mise en avant dans le bleu budgétaire pour 2020 est donc très relative »
Les frais de fonctionnement sont en augmentation, notamment pour la sécurité. « S’il a logiquement pesé sur les frais de personnel, le renforcement des moyens de sécurité de la présidence de la République depuis 2018, auquel votre rapporteur souscrit dans le contexte que nous connaissons, n’a pas eu d’effet démesuré sur les frais de fonctionnement » note le rapport.
Au total, les frais de fonctionnement augmenteront « en 2020 de presque 1 million d’euros. La "réduction du train de vie" mise en avant dans le bleu budgétaire pour 2020 est donc très relative » souligne le rapport, qui salue cependant « les efforts consentis s’agissant de la gestion des véhicules et des chauffeurs. Depuis 2011, l’effectif des chauffeurs a diminué de 12 équivalents temps plein travaillé ».
Autre satisfecit : « Les dépenses de personnel devraient être contenues en 2020 » salue le rapport. En juillet 2019, l’Elysée comptait 795 postes pourvus, soit 17 de moins qu’en juillet 2018.
A noter que « la présidence de la République a accru, à partir de 2014, le montant de ses recettes propres en facturant davantage que par le passé les services dont bénéficie une partie de son personnel ou de ses invités ». Autre source de recettes : la vente de produits dérivés, qui « connaissent un certain succès sur le plan commercial ». Il existe maintenant une boutique en ligne de l’Elysée.
Une hausse justifiée, selon l’Elysée
Interrogé par Le Parisien sur cette hausse de son budget, l’Elysée explique en partie l’augmentation par un mouvement de ligne budgétaire. « Jusqu'ici, une ligne de 1,7 million d'euros attribuée à la sécurité présidentielle était prise en charge par le ministère de l'Intérieur. Nous l'avons juste déplacée pour plus de cohérence » explique le Palais. Devant les députés, le ministre chargé des Relations avec le Parlement, Marc Fesneau, a aussi évoqué des investissements « en termes de télécommunication, de sécurité et de numérique ».
Si on prend en compte l’ensemble des dépenses portées par d’autres ministères pour le compte de l’Elysée, le budget serait en réalité un peu gonflé. « Au total, c’est un ensemble de dépenses de l’ordre de 4 à 5 millions d’euros qui sont concernées » écrit dans son livre Frais de Palais (ed. L’Observatoire, octobre 2019) l’ex-député PS René Dosière, qui s’était fait une spécialité d’éplucher les comptes de l’Elysée. Les inclure dans le budget serait « sans incidence financière pour les finances publiques », précise l’ancien député. Mais ce serait un progrès, en termes de transparence.