EPR: nouveau rapport accablant, l’Etat attend d’EDF un plan d’action

EPR: nouveau rapport accablant, l’Etat attend d’EDF un plan d’action

"Echec pour EDF" et la filière nucléaire française: le gouvernement a exigé lundi d'EDF un "plan d'action" sous un mois, après un rapport d...
Public Sénat

Par Marie HEUCLIN

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

"Echec pour EDF" et la filière nucléaire française: le gouvernement a exigé lundi d'EDF un "plan d'action" sous un mois, après un rapport d'audit sur les déboires de l'EPR de Flamanville (Manche) qui dresse un bilan noir de ce chantier emblématique.

Lancé en 2006, et devant initialement entrer en service en 2012 pour un coût de 3,3 milliards d'euros, la construction à Flamanville du premier réacteur français de troisième génération a multiplié les déboires. Son démarrage est désormais prévu fin 2022 et son coût a été réévalué à 12,4 milliards d'euros.

Ces chiffres parlent d'eux-mêmes: "la construction de l'EPR aura accumulé tant de surcoûts et de délai qu'elle ne peut être considérée que comme un échec pour EDF", écrit l'ex-patron du constructeur automobile PSA Jean-Martin Folz, dans le rapport d'audit d'une trentaine de pages qu'il a remis lundi au gouvernement.

Jugeant que l'audit mettait en lumière "un manque de rigueur inacceptable", le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a sommé EDF de mettre en place un "plan d'action" d'ici un mois pour remettre la filière nucléaire aux "meilleurs niveaux d'exigence". Ce plan devra être présenté au conseil d'administration du groupe, puis "validé par l'Etat", et un point d'étape sera réalisé "fin 2020" sur sa mise en oeuvre, a-t-il précisé.

Mandaté cet été pour effectuer l'audit, M. Folz a égrainé devant la presse "l'irréalisme" des estimations initiales, une perte de compétences "généralisée", de mauvaises relations entre EDF et ses sous-traitants et partenaires, notamment Areva, puis Framatome (ex-branche réacteur d'Areva revenue sous le giron d'EDF), un manque de "culture de la qualité", ou encore une gouvernance du projet "inappropriée" chez EDF.

EPR de Flamanville
Représentation schématique de l'EPR de Flamanville montrant les soudures défectueuses que EDF doit réparer avant la mise en service du réacteur
AFP

Autant de critiques déjà régulièrement formulées par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui a demandé à plusieurs reprises à EDF de reprendre certains éléments du chantier.

M. Folz a également pointé les évolutions de la réglementation qui ont compliqué les travaux mais aussi les "défaillances techniques et industrielles"? en particulier en matière de soudage. C'est une anomalie détectée sur des soudures qui est à l'origine d'une des dernières péripéties de l'EPR, conduisant EDF à repousser encore sa mise en service et à revoir son coût à la hausse.

- nouveaux EPR? -

Le plan d'action réclamé lundi à EDF devra se pencher en particulier sur la gouvernance des grands projets du groupe, l'amélioration de la coordination entre EDF et Framatome et du dialogue entre l'ASN et EDF, et "l'établissement des responsabilités" avec une possible "réorganisation des équipes", a détaillé Bruno Le Maire.

L'EPR de Flamanville? le 16 août 2019
L'EPR de Flamanville? le 16 août 2019
AFP/Archives

Le gouvernement souhaite également qu'EDF, qui a nommé il y a deux semaines un nouveau directeur du projet de l'EPR, lance "un plan de compétence de la filière nucléaire", alors que 16 ans se sont écoulés entre la construction du dernier réacteur français, à Civeaux (Vienne), et celle de l'EPR de Flamanville.

L'Etat et EDF ont en ligne de mire l'avenir du nucléaire français et la décision future sur la construction éventuelle de nouveaux réacteurs. Pour le gouvernement, la condition reste toujours d'attendre la mise en service de Flamanville, a rappelé lundi la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne.

EDF doit aussi remettre d'ici la mi-2021 au gouvernement l'ensemble des études sur l'amélioration du design et du coût de construction de l'EPR.

Également présent à cette conférence de presse, le PDG d'EDF Jean-Bernard Lévy a affirmé partager le "constat d'échec" du rapport, et a assuré que son groupe allait "redoubler d'efforts" pour retrouver le meilleur niveau de compétences d'ici à ce que le gouvernement décide de construire ou non de nouveaux EPR.

Il a rappelé qu'EDF avait déjà pris des "mesures structurelles" pour redresser la barre, notamment en matière de coordination avec les équipes de Framatome, progrès soulignés par le rapport de M. Folz.

"J'entends porter la qualité industrielle au même niveau d'exigence" que celle affichée en terme de sûreté nucléaire, a promis M. Lévy, qui espère convaincre l'Etat de lancer de nouveaux EPR.

Sur ce point, le rapport va plutôt dans son sens: l'EPR a "démontré la pertinence" de sa conception, a jugé M. Folz. Selon lui, pour redresser la qualité de la filière, il faut qu'EDF fasse un effort d'investissement et de recrutement, ce qui ne sera possible que si l'État affiche "des programmes stables à long terme de construction de nouveaux réacteurs et d'entretien du parc existant".

Dans la même thématique

EPR: nouveau rapport accablant, l’Etat attend d’EDF un plan d’action
3min

Politique

Revalorisation du barème de l’impôt : « On peut imaginer plusieurs scenarii », selon Claude Raynal

Après avoir été présenté en conseil des ministres ce mercredi 11 décembre, le projet de loi spéciale sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 16 décembre et au Sénat en milieu de semaine prochaine. Cet après-midi, les ministres démissionnaires de l’Economie et du budget ont été entendus à ce sujet par les sénateurs. « La Constitution prévoit des formules pour enjamber la fin d’année », s’est réjoui le président de la commission des Finances du Palais du Luxembourg à la sortie de l’audition.

Le

Paris: Emmanuel Macron Receives President Of Guinea-Bissau Umaro Sissoco Embalo
4min

Politique

« Réguler les égos » : comment Emmanuel Macron conçoit son rôle dans son camp

Au moment où le chef de l’Etat s’apprête à nommer un nouveau premier ministre, Emmanuel Macron a reçu ce mercredi à déjeuner les sénateurs Renaissance, à l’Elysée. Une rencontre prévue de longue date. L’occasion d’évoquer les collectivités, mais aussi les « 30 mois à venir » et les appétits pour 2027…

Le

EPR: nouveau rapport accablant, l’Etat attend d’EDF un plan d’action
4min

Politique

Gouvernement : « On ne peut pas simplement trépigner et attendre que le Président veuille démissionner », tacle Olivier Faure

Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS, réclame un Premier ministre de gauche, alors que LFI refuse de se mettre autour de la table pour travailler sur la mise en place d’un gouvernement, préférant pousser pour une démission du chef de l’Etat. Ce mercredi, députés et sénateurs PS se sont réunis alors que le nom du nouveau chef de gouvernement pourrait tomber d’un instant à l’autre.

Le