L’amertume des écologistes, îlots de résistance au moratoire fiscal

L’amertume des écologistes, îlots de résistance au moratoire fiscal

L'écologie "se prend une balle perdue": amers mardi après le moratoire annoncé par le gouvernement, les écologistes, derniers soutiens de la...
Public Sénat

Par Baptiste BECQUART

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

L'écologie "se prend une balle perdue": amers mardi après le moratoire annoncé par le gouvernement, les écologistes, derniers soutiens de la hausse de la taxe sur les carburants, se disent pourtant convaincus mardi que le "réalisme" social est de leur côté.

Après le renoncement à la taxe poids lourds lors du quinquennat Hollande et de la taxe carbone sous Sarkozy, le recul du gouvernement au coeur de la crise des "gilets jaunes" sonne comme un nouveau coup dur aux oreilles des écologistes, un brin fatalistes mardi.

Englué dans une crise qui a atteint un paroxysme samedi avec des scènes de guérilla urbaine à Paris, l'exécutif a présenté un moratoire de six mois sur la hausse de la taxe carbone, un gel des tarifs du gaz et de l'électricité cet hiver et aucun durcissement du contrôle technique automobile avant l'été.

Autant "annoncer un moratoire sur l'écologie en général", peste Yannick Jadot, tête de liste EELV pour les Européennes de mai, auprès de l'AFP. "Pour le gouvernement la fiscalité écologique a été avant tout une fiscalité de rendement afin de financer la fin de l'ISF."

"Ils ont transformé l'écologie en bouc émissaire et c'est elle qui prend une balle perdue, alors que c'est l'ensemble de la politique qui est contestée" par les "gilets jaunes", lance Julien Bayou, porte-parole du parti.

Celui-ci souhaite la convergence à Paris samedi entre les "gilets jaunes" et la marche pour le climat prévue le même jour à l'occasion de la COP24 en Pologne.

Nicolas Hulot, qui a quitté à grand fracas le gouvernement en septembre, a toutefois estimé: "Ce n'est pas le moment (pour cette marche) car c'est un risque de confrontation supplémentaire et de confusion des messages".

Le ministre de l'Ecologie Nicolas Hulot à Angers, le 7 juin 2017
Le ministre de l'Ecologie Nicolas Hulot à Angers, le 7 juin 2017
AFP/Archives

La Fondation pour la nature et l'homme qu'il a créée n'en a pas moins redouté, à propos du moratoire, un "renoncement à l'écologie". Nicolas Hulot a expliqué: "Il faut, dans le même temps que l'on monte le prix du carbone, mettre à disposition dans les territoires des outils pour permettre à chaque citoyen d'économiser et de réduire leur consommation durablement".

France Nature Environnement voit pour sa part dans le moratoire "une grave erreur", "une régression" qui sacrifie l'écologie sans répondre aux préoccupations sociales.

- "Bataille culturelle" -

EELV est la seule formation politique à avoir décidé de soutenir la mesure jusqu'au bout, avec Génération écologie de la députée Delphine Batho. Une "cohérence et une constance" qui seront portées à leur crédit, jugent les écologistes en choeur.

D'abord parce que, selon Yannick Jadot, les "gilets jaunes" ne sont pas ennemis de l'écologie, mais vivent une "crise de la vie chère, de la fracture territoriale".

"Il n'y a pas fondamentalement de remise en cause de la transition écologique dans le mouvement", constate de son côté Guillaume Sainteny, qui enseigne le développement durable à Agro Paris Tech : "Les +gilets jaunes+ critiquent simplement (le fait) que la transition écologique ne leur bénéficie pas."

"Nos positions sont marquées du sceau du réalisme économique", dit Yannick Jadot, "parce qu'elles peuvent améliorer la vie, par exemple permettre des factures moins lourdes grâce à la rénovation thermique" des logements.

Mais l'idée, classique chez les écologistes, explique Daniel Boy, spécialiste de l'écologie politique au Cevipof, "est très difficile à imposer chez les gens: le problème social se heurte à l'écologie, qui dans un premier temps leur fait payer davantage".

Les écologistes sont pourtant persuadés de gagner "la bataille culturelle", selon l'expression de David Cormand. Et donc la bataille électorale? "Nous sommes en train de gagner du terrain en Europe", se félicite Yannick Jadot, en référence aux succès récents des écologistes en Allemagne et en Belgique.

EELV commence d'ailleurs à infléchir sa stratégie, Yannick Jadot insistant sur l'"écologie du quotidien qui fonctionne" grâce à des paysans ou des entrepreneurs. Ses yeux sont braqués sur les élections européennes de mai prochain, où il espère atteindre 15% de voix.

Dans la même thématique

L’amertume des écologistes, îlots de résistance au moratoire fiscal
3min

Politique

Finances publiques : « Ce qui va être nouveau, c'est l’association que nous allons avoir des parlementaires », assure la ministre des comptes publics 

Invitée de la matinale de Public Sénat, la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin s’est félicitée de l’adoption définitive des textes budgétaires. La ministre promet de poursuivre la trajectoire de réduction du déficit et d'associer plus largement les parlementaires dans le suivi des dépenses.

Le

L’amertume des écologistes, îlots de résistance au moratoire fiscal
5min

Politique

LR : la campagne de Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez pour la présidence du parti officiellement lancée

L’élection du futur président des Républicains se tiendra les 17 et 18 mai. À la fois ministre et candidat, Bruno Retailleau assure que la guerre des chefs « ne viendra pas de lui ». En face, Laurent Wauquiez, qui espérait s’imposer naturellement à la tête du parti, répète que cette fonction n’est pas compatible avec l’agenda d’un ministre.

Le