La bataille pour le perchoir se complique pour Richard Ferrand
Les députés marcheurs sont en ébullition: la course au perchoir laissé vacant par François de Rugy s'annonce plus compliquée que prévu pour le...
Par Anne Pascale REBOUL
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Les députés marcheurs sont en ébullition: la course au perchoir laissé vacant par François de Rugy s'annonce plus compliquée que prévu pour le favori Richard Ferrand, le chef de leur groupe, confronté à trois autres candidats dont l'ex-secrétaire d'Etat Barbara Pompili.
Mardi lors de la nomination de François de Rugy pour succéder à Nicolas Hulot au gouvernement, "il y avait une sorte d'alignement des planètes" et Richard Ferrand, très proche d'Emmanuel Macron, pouvait déjà se voir à l'Hôtel de Lassay, résidence des présidents de l'Assemblée, relate une figure du groupe majoritaire.
Mais le jour même, la présidente de la commission des Lois Yaël Braun-Pivet (qui s'est retirée depuis) et la députée de l'Isère Cendra Motin, deux novices en politique jusqu'en 2017, entrent en lice pour l'investiture LREM.
Le lendemain, c'est la présidente de la commission du Développement durable Barbara Pompili, ex-écologiste et ancienne ministre, qui se déclare, en faisant valoir qu'une femme présidente de l'Assemblée serait un symbole "fort". Enfin, l'élu du Tarn Philippe Folliot (ex-UDI) se lance aussi in extremis, comme il l'avait fait l'an dernier.
"Une élection n’est jamais gagnée par avance", a reconnu l'actuel président de groupe, mercredi auprès de Ouest France. "Il y a de la fébrilité" dans son camp, observe un élu LREM, avant le vote lundi à Tours lors d'un séminaire interne.
Plusieurs députés ont envoyé à leurs collègues des mails de soutien à Richard Ferrand, ce qui a provoqué en retour des accusations de "pression" ou "infantilisation" par certains.
Pourquoi tant de concurrence, au risque de fissurer le collectif? Les uns avancent "l'aspiration à un rééquilibrage de la place des femmes", dans un groupe LREM de 312 élus quasi paritaire mais moins aux postes de pouvoir; les autres évoquent des ambitions après 14 mois de mise en jambe, sans fronde pour autant.
Mais revient aussi l'affaire immobilière des Mutuelles de Bretagne, "caillou dans la chaussure" de l'ex-ministre, alors qu'une information judiciaire pour "prise illégale d'intérêts" a été ouverte - sans mise en examen jusqu'alors.
Et les reproches quant à un président de groupe "pas assez présent" ou "pas bon manager" refont surface chez certains.
- pas de "ticket féminin" -
En coulisses, chaque prétendant s'active et engrange des voix. Barbara Pompili a pour elle son expérience, au Parlement et au gouvernement, mais elle n'est pas une "marcheuse" historique. L'appui du député Matthieu Orphelin, proche de Nicolas Hulot, lui est précieux.
La députée LREM Barbara Pompili, le 29 août 2018 à Chaillol (Hautes-Alpes)
AFP/Archives
Décidée à aller "jusqu'au bout", Cendra Motin se fait fort d'incarner le "renouveau" et propose de remettre en jeu dans deux ans la fonction de président de l'Assemblée. Philippe Folliot se voit comme un président "pas au-dessus, mais à côté de ses collègues".
Quant à Yaël Braun-Pivet, elle a rallié jeudi Richard Ferrand au nom d'un refus de "la division", éloignant l'idée d'un "ticket féminin". Ses soutiens ne reportent pas forcément leur voix sur le même, telle Olga Givernet qui votera pour Barbara Pompili.
Richard Ferrand reste favori en vue du scrutin de lundi, à bulletins secrets et à deux tours.
Les députés de tous bords s'en mêlent naturellement: Jean-Christophe Lagarde (UDI-Agir) l'a soutenu sur Sud Radio pour sa "capacité à discuter avec les autres groupes", Sébastien Chenu (RN) l'a rejeté sur Public Sénat car il est "mêlé à des affaires qui risquent de le rattraper".
Au gouvernement, si Marlène Schiappa ne veut pas se prononcer, Gérard Collomb a suggéré: "Et pourquoi pas une femme présidente de groupe?"
Ce sera le prochain enjeu, en cas de victoire de Richard Ferrand. En cas d'échec, certains députés avancent aussi que ce serait un tel "désaveu" qu'il pourrait ne pas vouloir continuer dans ses fonctions présentes.
"Pas indispensable de rajouter ce séisme" à une rentrée déjà compliquée pour le pouvoir, glisse un partisan de M. Ferrand.
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