Radicalisation: Castaner veut “resserrer les mailles du filet”

Radicalisation: Castaner veut “resserrer les mailles du filet”

A la veille d'un hommage aux victimes, Christophe Castaner a promis lundi de "resserrer les mailles du filet" contre la radicalisation islamiste...
Public Sénat

Par Gregory DANEL

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

A la veille d'un hommage aux victimes, Christophe Castaner a promis lundi de "resserrer les mailles du filet" contre la radicalisation islamiste au sein des forces de l'ordre après la tuerie de la préfecture de police, qualifiée de "scandale d'Etat" par une partie de l'opposition.

Le ministre de l'Intérieur a de nouveau tenté de répondre au séisme provoqué par l'attaque meurtrière perpétrée par Mickaël Harpon, l'employé de la préfecture de 45 ans qui a poignardé à mort quatre fonctionnaires jeudi avant d'être abattu.

Quatre jours après cette attaque sans précédent au cœur de l'appareil policier, de nombreuses voix dénoncent l'incurie des autorités et cherchent à comprendre comment Mickaël Harpon a pu passer sous les radars alors qu'il avait donné des signes de radicalisation au sein même de la direction du renseignement de la PP (DRPP) où il était employé.

Durement mis en cause, Christophe Castaner a reconnu lundi sur France Inter un "dysfonctionnement d'Etat" mais a récusé l'accusation de "scandale d’État", portée par ceux qui, à droite et à l'extrême droite, réclament sa démission à cor et à cris.

Selon le ministre, Mickaël Harpon, converti à l'islam depuis une dizaine d'années et fréquentant des membres de la mouvance "salafiste", avait justifié en juillet 2015 l'attentat contre Charlie Hebdo au sein même de la DRPP sans qu'un signalement formel ne soit adressé à la hiérarchie policière.

Photo non datée de Mickael Harpon, l'informaticien qui a assassiné 4 personnes au sein de la préfecture de police de Paris le 3 octobre 2019 avant d'être tué
Photo non datée de Mickael Harpon, l'informaticien qui a assassiné 4 personnes au sein de la préfecture de police de Paris le 3 octobre 2019 avant d'être tué
AFP

Selon un rapport interne révélé dimanche par France Inter, cet agent administratif habilité secret défense aurait déclaré à deux collègues "C'est bien fait" à propos de l'attaque menée en janvier 2015 contre l'hebdomadaire satirique.

"Il n'y a pas eu d'alerte au bon niveau, au bon moment", a accusé le ministre, ajoutant que "les signaux d'alerte auraient dû être suffisants pour déclencher une enquête en profondeur".

Plusieurs collègues de Mickaël Harpon ont indiqué avoir "noté dans le passé des signes de radicalisation" et en avoir "alerté leur hiérarchie", selon le rapport interne.

Pour tenter d'éteindre la polémique, M. Castaner a appelé à ce que toute alerte liée à la radicalisation fasse désormais "l'objet d'un signalement automatique", sans plus de précisions. Deux enquêtes administratives confiées à l'Inspection générale du renseignement ont été ouvertes par le Premier ministre Edouard Philippe.

- Audition mardi -

Pas sûr que cela suffise à faire taire les critiques qui s'abattent sur l'exécutif et Christophe Castaner, accusé d'avoir trop vite déclaré jeudi que l'assaillant n'avait "jamais présenté de difficultés comportementales".

Du RN à LR en passant par LFI, plusieurs responsables l'ont accusé d'avoir "menti délibérément", ont réclamé sa démission et une commission d'enquête parlementaire.

Jugeant les "faits gravissimes", le président LR du Sénat Gérard Larcher a appelé lundi matin sur RTL le ministre de l'Intérieur à "regarder ses responsabilités".

"Notre pays cache un fascisme islamiste", a de son côté affirmé sur Twitter le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan, demandant à ce que les fonctionnaires prêtent désormais un "serment de laïcité et de République".

Les prochains jours s'annoncent encore sous haute tension pour le ministre. Mardi, il doit être entendu à huis clos par la délégation parlementaire au renseignement avant de passer au gril des questions au gouvernement.

Des policiers près de la Préfecture de police, le 3 octobre 2019 à Paris, après l'attaque qui a coûté la vie à quatre personnes
Des policiers près de la Préfecture de police, le 3 octobre 2019 à Paris, après l'attaque qui a coûté la vie à quatre personnes
AFP

Jeudi, c'est la commission des lois du Sénat qui l'auditionnera.

Dénonçant des "actes criminels, commis prétendument au nom de l'Islam", le Conseil français du culte musulman (CFCM) s'est à nouveau engagé, dans un communiqué, à "œuvrer aux côtés des responsables de lieux de culte" pour "prévenir toute forme de radicalisation".

Sur le front de l'enquête menée par les services antiterroristes, l'épouse de Mickaël Harpon a été relâchée dimanche soir à l'issue de trois jours de garde à vue, sans être poursuivie à ce stade.

Les enquêteurs cherchaient d'éventuels éléments incriminants cette mère de deux enfants qui s'était inquiétée "du comportement inhabituel et agité" de son époux la veille de l'attaque et avait échangé avec lui 33 SMS le matin des faits.

Outre la recherche d'éventuels complices dans les milieux radicaux, les enquêteurs tentent d'éclaircir la nature des informations auxquelles l'assaillant a pu avoir accès à la préfecture, où il travaillait depuis 2003 comme informaticien.

Le secrétaire d'Etat à l'Intérieur Laurent Nuñez a écarté "à ce stade" l'hypothèse selon laquelle il aurait fait partie d'une cellule jihadiste.

Ebranlée par cette attaque de l'intérieur, la préfecture de police rendra un dernier hommage aux quatre victimes - trois policiers et une fonctionnaire des ressources humaines - mardi matin lors d'une cérémonie à laquelle assistera Emmanuel Macron.

Une messe pour les victimes sera célébrée à 13H00 en l'église Saint-Germain-l'Auxerrois par l'archevêque de Paris.

Les familles des victimes seront ensuite reçues à 18H30 à Beauvau par M. Castaner.

Dans la même thématique

Paris: Weekly session of questions to the government at the Senate
10min

Politique

Nouveau texte immigration : face à une majorité divisée, Bruno Retailleau prêt à jouer l’opinion

Moins d’un an après le précédent projet de loi, le gouvernement va porter un nouveau texte sur l’immigration. L’idée est de reprendre « les articles censurés par le Conseil constitutionnel », selon l’entourage du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Mais chez les députés Renaissance, on prédit un groupe coupé en deux sur le sujet. « On sait qu’aucun texte ne passera sans l’accord du RN », pointe le sénateur écologiste Guy Benarroche.

Le

Paris : Weekly council of ministers
6min

Politique

Immigration : quelles dispositions censurées pourraient revenir dans le nouveau texte ?

Le gouvernement a annoncé l’examen d’un nouveau texte sur l’immigration dès le début de l’année 2025. Il y a à peine un an, la droite sénatoriale menée par Bruno Retailleau avait vu ses amendements au précédent texte largement censurés par le Conseil constitutionnel au motif de cavaliers législatifs. Ces dispositions pourraient réapparaître.

Le

Radicalisation: Castaner veut “resserrer les mailles du filet”
3min

Politique

Nouvelle loi immigration : Jean-Philippe Tanguy (RN) souhaite une « régularisation zéro des clandestins »

Invité de la matinale de Public Sénat, le député de la Somme, Jean-Philippe Tanguy a expliqué la position de son groupe sur la proposition du gouvernement de présenter un nouveau texte sur l’immigration au début de l’année 2025. Le député de la commission des finances a également détaillé la position de son groupe sur le vote du budget, sans évoquer précisément les amendements que son groupe défendra.

Le

Radicalisation: Castaner veut “resserrer les mailles du filet”
5min

Politique

Budget : « C’est un semblant de justice fiscale, mais en réalité, ce sont les plus pauvres qui vont trinquer », selon le député PS Arthur Delaporte

Invités à débattre du budget 2025 sur Parlement hebdo, le rapporteur LR de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, et le député PS Arthur Delaporte, s’opposent sur le sujet. « Il faudra bien faire des efforts », défend le sénateur LR, quand le socialiste dénonce « un effort incommensurable ».

Le