« Il faut vraiment que le port du masque soit obligatoire », demande le PDG de la SNCF

« Il faut vraiment que le port du masque soit obligatoire », demande le PDG de la SNCF

L’objectif d’un déconfinement progressif à partir du 11 mai va poser un défi d’ampleur à la SNCF. Auditionné au Sénat, le PDG Jean-Pierre Farandou n’anticipe qu’une reprise progressive de la circulation des trains, avec un souci de sécurité sanitaire. « À nous de démontrer que prendre le train n’est pas un danger pour sa santé », a-t-il insisté.
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La SNCF a les yeux rivés sur le « jour d’après ». Deux jours après l’allocution d’Emmanuel Macron et l’annonce d’un possible déconfinement progressif et de la réouverture des établissements scolaires à partir du lundi 11 mai, la commission de l’Aménagement du territoire et du Développement durable au Sénat a voulu savoir comment la compagnie ferroviaire se préparait à relancer son offre de transport, lorsque la pandémie de coronavirus aura baissé en intensité.

Devant la perspective d’une hausse du nombre de voyageurs, la SNCF s’interroge sur la poursuite des règles en vigueur, comme le placement d’un passager sur deux. Dans les trains du quotidien, il sera difficile de maintenir une distance d’un mètre et demi entre les passagers. En appliquant ce principe à l’Île-de-France, la SNCF ne pourrait transporter que 20 % des voyageurs qu’elle achemine en temps normal, même si tous les trains étaient en circulation. « Donc ça ne marchera pas, et on n’y arrivera pas », constate Jean-Pierre Farandou.

Afin de lever ce frein, le PDG en appelle aux pouvoirs publics pour imposer le port obligatoire du masque dans les transports ferroviaires. Emmanuel Macron avait justement clairement évoqué cette éventualité dans son discours dimanche soir. « Il faut vraiment que le port du masque soit obligatoire pour prendre les transports », a insisté Jean-Pierre Farandou.

Interrogé sur la possibilité que la SNCF puisse distribuer elle-même des masques aux voyageurs, le PDG s’est montré extrêmement prudent, pour ne pas dire opposé à l’idée. « Attention, la SNCF ne va pas prendre sur ses épaules la distribution de masques à toute la population française, ce n’est pas possible », a-t-il mis en garde.

Du gel à disposition des voyageurs dans les gares

Le réseau est méconnaissable aujourd’hui : seulement 6 % de TGV en circulation, 15 % des trains TER, et 20 à 25 % des trains en Île-de-France. Dans cette région dense, seulement 100.000 voyageurs empruntent les trains quotidiennement, contre 3,5 millions en temps normal. « À nous de démontrer que prendre le train n’est pas un danger pour sa santé personnelle. On va mettre le paquet là-dessus, c’est vital pour nous », a expliqué le PDG.

Un autre appel est lancé aux pouvoirs publics pour limiter l’engorgement dans les trains. Le PDG de la SNCF « recommande » de conserver une « part significative » de salariés en télétravail. « Il est important que l’on puisse demander à l’ensemble des entreprises de lisser les heures de pointe », a également demandé Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs. La direction de la SNCF a même encouragé le Sénat à « relayer » cet appel auprès du gouvernement.

De son côté, la SNCF s’engage à fournir pour les voyageurs du gel hydroalcoolique et des points de lavage des mains dans les gares, « quand elle le peut ». « L’idéal serait d'en avoir à la sortie du train », selon Jean-Pierre Farandou. La question de distribution de gel à bord des TGV, mais aussi dans les trains de la vie quotidienne, est aussi à l’étude. Le groupe promet également d’ « amplifier » le nettoyage des gares et des trains, « quitte à pénaliser les rotations », a précisé Jean-Pierre Farandou. Le groupe juge aussi qu’il pourrait y avoir « davantage de filtrages » pour pouvoir accéder aux gares, « notamment » les gares parisiennes.

Un objectif d’un TGV sur deux en quelques semaines

Quant au trafic ferroviaire journalier, la reprise ne sera que « progressive ». Pour le moment, la SNCF est suspendue au plan que le gouvernement doit dévoiler d’ici deux semaines. « L’offre cherchera à coller à la demande. On essaye d’estimer la demande, on y verra plus clair sur les consignes sanitaires que le gouvernement veut mettre en place pour le déconfinement partiel », a expliqué Jean-Pierre Farandou.

Pour le TGV, une reprise en trois phases est prévue : assurer 10 à 20 % du trafic à court terme. Actuellement, on ne compte qu’une quarantaine de TGV en circulation chaque jour dans le pays, contre 600 à 700 en temps normal. La circulation des TGV pourrait ensuite atteindre le niveau de 50 % « dans les quelques semaines » suivant le 11 mai, avant de revenir à 100 % pendant l’été, « espoir » de la SNCF.

Pour les trains du quotidien, la SNCF envisage de « redémarrer très vite », en assurant 50 % des trains régionaux comme franciliens, avant d’adapter à la demande, en lien avec les autorités organisatrices de transport.

Le port du masque répond aussi à une préoccupation financière. La SNCF, déjà fragilisée par le manque à gagner pendant le conflit social de la réforme des retraites, subit des pertes d’exploitation « considérables » et « lourdes » pendant le confinement, même s’il est trop tôt pour les chiffres. En effet, en maintenant la règle d’un siège sur deux vide, la compagnie serait en dessous du point de rentabilité, qui se situe à 60 % de remplissage d’un train. « La dimension économique doit commencer à entrer en compte » dans les prochains mois, a indiqué le PDG.

En Chine, la voiture est ressortie « grande gagnante » de la crise sanitaire, a-t-il regretté. « Les personnes se sont précipitées sur les voitures, elles sont moins présentes dans les transports collectifs. »

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