Agriculture : les programmes des candidats à la présidentielle

Agriculture : les programmes des candidats à la présidentielle

Un mois après le salon de l’agriculture, les douze candidats à l’élection Présidentielle étaient invités mercredi 30 mars à passer un grand oral lors du congrès de la FNSEA à Besançon. L’occasion pour nous, de vous détailler les programmes des prétendants à l’Elysée concernant le monde agricole.
Public Sénat

Par Klara Durand

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Devant 1500 agriculteurs réunis à Besançon, six candidats se sont succédé dont Fabien Roussel, Valérie Pécresse, Marine Le Pen, Eric Zemmour, Jean Lassalle et Emmanuel Macron via une vidéo, les six autres étaient absents notamment à gauche.

« Je suis le seul candidat de gauche à venir, c’est un honneur pour moi d’être devant vous », déclare le communiste Fabien Roussel, en ouverture du congrès de la FNSEA. Largement applaudi, le premier candidat à passer le grand oral a réaffirmé les points clefs de son programme concernant l’agriculture : l’objectif de la souveraineté alimentaire avec au moins 500 000 agriculteurs en 2030 via l’installation de 20 à 25 000 agriculteurs par an. Afin d’y parvenir, Fabien Roussel prévoit de « doubler les moyens à l’installation des jeunes et à l’accompagnement des nouveaux installés ». Il a réitéré sa volonté de produire français avec la création d’un fonds alimentaire national, doté de 10 milliards d’euros par an ciblé sur la restauration collective. Enfin, il souhaite protéger l’agriculture française en taxant les productions importées qui ne respectent pas les normes du pays et faire intervenir l’Etat pour encadrer les prix.

Si les autres candidats de gauche n’étaient pas présents au grand oral, plusieurs soutiennent l’idée de recruter plus de jeunes agriculteurs, à l’instar du candidat de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon. Le candidat propose la formation et l’installation de nouveaux paysans couplées à une réorientation des aides vers les exploitations à taille humaine et les productions respectueuses de l’environnement. La question de la production alimentaire fait également partie du programme agricole de l’insoumis, il envisage notamment l’éradication de la faim dans le pays en garantissant à toutes et tous l’accès à une alimentation de qualité. Une proposition qui passe par le blocage et l’encadrement de certains prix, par la hausse massive du pouvoir d’achat populaire, mais aussi une lutte résolue contre la malbouffe. Jean-Luc Mélenchon lie sa politique agricole à la protection de l’environnement et la santé humaine, avec pour objectif d’interdire les pesticides dangereux et de généraliser progressivement l’agriculture biologique et paysanne.

L’enjeu du renouvellement des générations d’agriculteurs

L’écologiste Yannick Jadot fait, lui aussi, plusieurs propositions visant à transformer durablement l’agriculture française et garantir une alimentation saine à un prix juste et abordable pour tous. Tout comme les deux autres candidats, il souhaite augmenter le nombre d’agriculteurs : 100 000 nouveaux paysans et paysannes. Le candidat vert veut également remplacer l’élevage industriel par un élevage agroécologique en 10 ans. Pour ce faire, il souhaite diviser par deux l’usage des engrais et des pesticides de synthèse d’ici 2027 et supprimer des pesticides en Europe en 2030. Une transformation qui passe aussi par une réforme de la PAC. Yannick Jadot prévoit, entre autres, de sortir de la logique de substitution pour rémunérer les agriculteurs et agricultrices qui mettent en place des pratiques favorables à l’environnement ou encore en exigeant que les denrées agricoles entrant sur le marché européen, respectent les standards de la production européenne.

Comme le candidat écologiste, la socialiste Anne Hidalgo est favorable à une transition vers une agroécologie. Celle-ci doit permettre la sortie des pesticides, un meilleur revenu des producteurs et une plus grande autonomie des exploitations. La candidate souhaite interdire l’usage les néonicotinoïdes — insecticides tueurs d’abeille — dans les 100 premiers jours du quinquennat. Elle prévoit également un plan pour améliorer l’autonomie européenne en protéines végétales dès 2030, et une gouvernance scientifique et démocratique renouvelée dans l’encadrement des produits phytosanitaires. La socialiste veut aussi investir dans la formation des jeunes agriculteurs par un triplement des moyens de formation sur 5 ans, en lien avec les régions.

Le candidat et président sortant Emmanuel Macron était, lui aussi, absent à Besançon mais il était le second à présenter son projet via une interview réalisée au préalable par la FNSEA. « Le pays vous doit beaucoup, c’est grâce à vous que nous avons pu continuer à nourrir le peuple français », note le candidat en saluant les efforts des agriculteurs pendant la crise sanitaire. Jusqu’ici favori dans les intentions de vote des agriculteurs selon le sondage Ifpop réalisé pour le syndicat, il ajoute que « l’indépendance alimentaire de notre pays est non négociable. Au moment où, on le voit bien, des puissances comme la Russie se servent de l’agriculture et notamment du blé comme d’une arme ». Ainsi, le président sortant a développé ce qu’il appelle « la 3e révolution agricole » : renforcer le renouvellement des générations, en passant à 20 000 nouveaux agriculteurs par an et en facilitant l’accès aux fonciers pour les nouveaux installés. Dans le cadre de France 2030, le candidat promet également d’investir dans l’agro numérique. Il conclut par la mise en place d’un chèque alimentaire pour lutter contre la précarité alimentaire.

A l’inverse, la candidate du Rassemblement National, Marine Le Pen, a dénoncé « le sacrifice de l’immense majorité des agriculteurs français » sous les quinquennats précédents et s’est dite « opposée à la volonté de transformer les agriculteurs en jardiniers ». Elle propose de créer un ministère chargé de la lutte contre les fraudes après avoir mentionné un rapport du Sénat qui ferait état de https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/agriculture-un-quart-des-produits-importes-ne-respecteraient-pas-les-normes25 % de fraudes dans les importations. Elle base également son programme agricole sur la lutte contre la stratégie européenne « de la ferme à la fourchette » (Farm to Fork) qui, selon la candidate, menace la souveraineté alimentaire des pays. Elle veut également exclure l’agriculture des traités multilatéraux de libre-échange. La candidate souhaite aussi valoriser le travail des agriculteurs en complétant les aides européennes par des aides nationales. Elle propose également un plan de soutien pour lutter contre le suicide dans la profession avec la mise en place à l’échelon local de mesures nécessaires pour accompagner les agriculteurs en difficulté.

La candidate de Les Républicains qui lui a succédé, Valérie Pécresse, a de son côté résumé son plan pour l’agriculture par quatre points clefs : « Des prix justes et rémunérateurs, la libération des énergies, la modernisation par l’investissement dans l’outil de production, dans les filières ainsi que la recherche et le renouvellement des générations », a-t-elle détaillé. La candidate LR prévoit d’augmenter le revenu des agriculteurs en baissant d’un tiers dès 2022 les cotisations vieillesse, de soutenir l’emploi agricole en pérennisant l’allègement des charges patronales « Tode » pour les employeurs de travailleurs saisonniers. Concernant le renouvellement des générations, elle souhaite soutenir l’apprentissage en exonérant totalement de charges patronales les exploitations de moins de 10 salariés qui prennent un jeune en apprentissage. Enfin, elle a réaffirmé sa volonté de féminiser les métiers agricoles en élargissant les aides au remplacement pour les futures mamans et en développant les services de garde en milieu rural.

Favoriser les circuits courts

« L’Etat a fait de vos existences les plus dures qu’elles soient, il vous a malmené, menti, manipulé », assène, à peine arrivé sur scène, le candidat de Reconquête ! Éric Zemmour. Il fustige « l’idéologie européenne » dans laquelle les paysans sont « piégés ». Pour y remédier, le candidat d’extrême-droite propose de favoriser les circuits courts, d’arrêter de signer des accords de libre-échange et de renouveler les générations d’agriculteurs avec l’augmentation de la dotation « jeune agriculteur », notamment en exonérant de droit de donation et succession toute transmission familiale d’une exploitation agricole.

Des propositions qui rejoignent, pour certaines, celle du candidat de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan. Le candidat qui n’était pas présent au grand oral, souhaite lui aussi privilégier les circuits courts dans le domaine agricole tout en incitant les collectivités publiques à se fournir chez les producteurs locaux et à privilégier le bio français. Il propose également de réformer la PAC autour de 3 volets : une préférence communautaire, des prix garantis et la mise en œuvre d’une politique agricole nationale. Il souhaite également instaurer et maintenir un tunnel « maximum minimum » des prix garantis pour les grandes productions agricoles comme les céréales, le lait ou les viandes.

Absent lui aussi, Philippe Poutou, le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste, voudrait lui aussi favoriser les circuits courts tout en allant vers le tout biologique d’ici 10 ans. Il souhaite interdire les intrants chimiques et végétaliser l’alimentation. Le candidat envisage également de mettre en place un fonds public d’acquisition de foncier pour l’installation en coopérative de jeunes agriculteurs. Tout comme le chef de file du NPA, Nathalie Arthaud de Lutte Ouvrière propose d’en finir avec l’élevage industriel. Son programme présente des mesures en faveur du bien-être animal : en interdisant la chasse à courre et en mettant fin à l’élevage et à l’abattage intensifs.

« Mesdames et messieurs, je voudrais presque dire mes frangins », entame, de son côté, Jean Lassalle du mouvement Résistons !. Dernier candidat présent lors de la conférence, il met l’agriculture au cœur de son programme : « Je veux reconstruire une organisation territoriale et relancer ce qui a marché par le passé », ajoute-t-il. Expliquant qu’il veut affecter 3 milliards d’euros par an aux campagnes et en faire « une grande cause nationale ». Le candidat souhaite revoir la distribution de la PAC pour que les aides aillent aux paysans et non plus à « la spéculation foncière ». Enfin, il propose la mise en place d’un « ticket paysan » pour soutenir les circuits courts, sur le modèle des « tickets-restaurants », en faveur des agriculteurs locaux et régionaux.

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