Conférence des territoires : ce qu’il faut retenir du discours d’Emmanuel Macron

Conférence des territoires : ce qu’il faut retenir du discours d’Emmanuel Macron

En clôture de la première conférence nationale des territoires qui se tenait ce lundi au Sénat, Emmanuel Macron a détaillé son projet pour les collectivités territoriales.
Public Sénat

Par Alice Bardo

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Dès son introduction, Emmanuel Macron a insisté sur la « pluralité de situations » territoriales, qui implique un défi : « Préserver à la fois l’unité de la République et la diversité des territoires. »

« Les tentations des extrêmes sont alimentées par le sentiment que notre approche est monolithique, unilatérale, univoque », a-t-il poursuivi. Le Président entend ainsi apporter une « attention toute particulière à l’égalité des chances des territoires ».

Parmi ses projets, « faire aboutir la réflexion déjà avancée sur le statut d’élu local », mais également « repenser en profondeur l’interaction entre l’État et les collectivités ».

Une conférence des territoires tous les six mois

Emmanuel Macron a précisé que la conférence nationale des territoires, qui se réunira tous les six mois, a vocation à être une « instance d’échanges, de concertation et de décision ». 

Des assises de l’outre-mer à l’automne prochain

Il a ensuite énuméré les défis de chaque territoire : des régions désindustrialisées, « qui ont besoin de l’État, d’aides, de redistribution », aux métropoles « gagnantes de cette mondialisation mais qui font face à des problèmes de pollution et de congestion de l’espace », en passant par les villes moyennes, qui ont à « réinventer un nouveau modèle de croissance », sans oublier les territoires d’outre-mer, « confrontés au cumul de nombre de difficultés mais avec une extrême diversité ». Concernant les TOM, il a rappelé que  des « assises des outre-mer » seraient organisées à l’automne  afin de « conduire à des actions concrètes ».

La possibilité d’une « part d’impôt national » pour compenser la suppression de la taxe d’habitation

Le président de la République a ensuite répondu aux critiques contre la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des foyers. « C’est un impôt qui ne regarde pas les capacités contributives des citoyens. Il est donc injuste socialement et il est injuste territorialement car il est plus élevé dans les villes périphériques ou les centres bourgs de province que dans les grandes villes » insiste Emmanuel Macron.

 « Dès la rentrée prochaine, il y aura en tranches successives, une suppression de la taxe d’habitation pour 80% de nos concitoyens, sur 3 ans avec un mécanisme d’exonération, qui permet la compensation financière pour les collectivités, sans leur faire perdre la liberté de taux. Ces conférences permettront de partager l’information financière tous les 6 mois et de bien s’assurer que les évolutions dans cette période de la base et donc les habitants nouveaux que vous auriez sont bien compensés dans ladite évolution. » 

« Mon souhait, c’est que nous allions plus loin » ajoute le Président de la République. « En même temps que nous faisons ça, je souhaite que nous ouvrions dans le cadre d’une commission de travail (…) une réflexion profonde de la refonte de la fiscalité locale et en particulier en substitution de la taxe d’habitation. » Le président de la République a ainsi évoqué la possibilité d’une « part d’impôt national qui pourrait être attribuée aux communes, une part de CSG ou CRDS. »

« Donnons-nous jusqu’au printemps prochain pour mener cet exercice en profondeur » a-t-il conclu.

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04:21

 « Il n’y aura pas de grand soir institutionnel »

Par ailleurs, Emmanuel Macron souhaite renforcer la déconcentration et donner aux représentants locaux « plus de marges de manœuvre, notamment en matière budgétaire et de ressources humaines, mais aussi dans le dialogue quotidien avec les collectivités ». « Nous avons progressivement dépossédé les fonctionnaires de terrain du pouvoir légitime qui doit être le leur », regrette-t-il. Il veut ainsi leur donner « un pouvoir d’appréciation, de dialogue avec les élus locaux ». « Les préfets pourront disposer d’un pouvoir d’adaptation locale des réglementations », mesure prévue dans le projet de loi « simplification et droit à l’erreur », qui sera présenté dans les prochaines semaines par le gouvernement.

Le chef de l’État a également assuré qu’ « il n’y aura pas de grand soir institutionnel », mais dit être « ouvert aux adaptations législatives qui permettront de corriger les éléments d’aberration qui remontent du terrain ».

Concernant les regroupements de collectivités, Emmanuel Macron n’y est pas opposé du moment que cela est « conforme à l’intérêt général ».

Une « agence nationale de la cohésion des territoires »

Selon Emmanuel Macron, « pour l’État le premier enjeu est la lutte contre la fracture territoriale ». Il souhaite ainsi « considérer l’opportunité d’une agence nationale de la cohésion des territoires, qui aura vocation à travailler en lien direct avec les régions » et qui sera placée sous l’autorité du ministre de la Cohésion des territoires. « Il ne s’agit pas de recentraliser ce qui a été donné à certaines collectivités », prévient-il. Et de préciser que cette agence répondra à une « logique de guichet unique et de simplification de projet pour les territoires ruraux et les villes moyennes en difficulté ».

« Pour les villes moyennes, la priorité est de redonner vie aux centres-villes », a-t-il poursuivi pour introduire sa volonté d’impulser une « politique globale d’intervention en lien avec la région ».

Quant aux métropoles, « l’État soutiendra les projets d’innovation et de recherche (..) et les travaux de rénovation indispensables dans toutes les métropoles où il n’y a pas eu d’investissement depuis des années ». 

Concernant la situation particulière du Grand Paris, il a annoncé qu’une « conférence territoriale du Grand Paris » se tiendra prochainement.

 « Le droit à l’expérimentation sera simplifié »

Les élus locaux seront libres « d’expérimenter de nouvelles politiques publiques, de nouvelles organisations des services publics, mais aussi d’innover », a annoncé le chef de l’État. Pour ce faire, « le droit à l’expérimentation sera simplifié ». Ainsi « l’obligation d’une généralisation de ces expérimentations au bout de deux années sera levée ».

Le Président est également « favorable à ce que l’État délègue ses compétences en matière économique et sociale ou d’aménagement si l’intérêt local le justifie ». 

Il a aussi rappelé la nécessité d’une  réduction du nombre d’élus locaux : « Moins d’élus mais plus protégés, plus rémunérés et plus libres de leur action. »

Lutter « contre l’inflation normative »

Emmanuel Macron est « favorable à conduire une  revue générale des normes » pour lutter « contre l’inflation normative ». Il compte appliquer « le principe du deux pour un : « Pour toute nouvelle norme portant sur les collectivités, deux autres devront être supprimées. » Pour ce faire, il souhaite renforcer le rôle du Conseil national d’évaluation des normes.

Comme annoncé par son Premier ministre, les collectivités devront réaliser 13 milliards d’économies, ce qui est « plus élevé qu’anticipé mais qui correspond à la part des collectivités dans l’ensemble de la dépense publique ». « Des économies substantielles en matière de dépenses de fonctionnement qui s’accompagneront d’un plan d’investissement » pour les projets des collectivités, a-t-il garanti. Le Président a également certifié qu’il n’y aura pas de « baisse brutale des dotations ».

Emmanuel Macron veut lutter « contre l’inflation normative »
06:43

 « Différenciation territoriale »

Lors de son allocution, Emmanuel Macron est revenu sur la liberté qu’il entend laisser aux collectivités territoriales en matière de transport, d’école ou encore de réduction de la fracture numérique. Vantant « une méthode participative » et une « différenciation territoriale » assumée, le Président souhaite prendre en compte cette diversité des  territoires car « on ne peut pas promettre des lignes de TGV et des aéroports de proximité à la France entière » a-t-il estimé.

Fin de la fracture numérique d'ici 2020

En ce qui concerne son engagement d’une « couverture intégrale de tous les Français en très haut débit », le chef de l’État a considéré que la fracture numérique «  est la première chose qui nourrit les extrêmes ». Raison pour laquelle il annonce un calendrier accéléré de cette réforme prévue non plus en 2022 mais fin 2020. « Parce que si je vous dis 2022, je ne suis pas sûr d’être en situation parfaite pour pouvoir y répondre. Si je vous dis fin 2020, je sais que j’aurai encore 2021 pour combler les retards » a-t-il précisé. D’ici la fin de l’année, «  des dispositions d’incitation et de contrainte » seront prises à l’égard des opérateurs de téléphonie.

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