Institutions : « La discussion parlementaire peut faire bouger un certain nombre de choses » assure Gérard Collomb

Institutions : « La discussion parlementaire peut faire bouger un certain nombre de choses » assure Gérard Collomb

Baisse du nombre de parlementaires, non-cumul des mandats dans le temps et dose de proportionnelle : le gouvernement s’attaque à la suite de la réforme institutionnelle. L’exécutif souffle le chaud et le froid avec le Sénat, qui bloque sur plusieurs points. Emmanuel Macron est « extrêmement optimiste » sur les discussions, selon Gérard Collomb.
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La réforme institutionnelle, la suite. Les projets de loi organique et ordinaire de la réforme des institutions ont été présentés ce mercredi matin en Conseil des ministres. Le projet de loi constitutionnelle a déjà été officiellement dévoilé il y a deux semaines par Edouard Philippe. C’est un texte fourre-tout qui renforce l’exécutif au détriment du Parlement. Il mêle sujets consensuels, comme la suppression de la Cour de justice de la République et questions qui hérissent les sénateurs, avec un droit d’amendement plus encadré et une modification de la navette parlementaire en défaveur de la Haute assemblée.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que la réforme tend les relations entre l’exécutif et le Sénat, sans qui le volet constitutionnel ne peut être adopté. Le président LR du Sénat, Gérard Larcher, a montré les muscles à plusieurs reprises. Mais en réalité, la porte d’un accord n’a jamais été fermée, même dans les moments les plus difficiles. Des deux côtés, la tonalité varie. C’est un peu la guerre froide, avec ses périodes d’extrême tension et ses moments de réchauffement. Ce midi, en présentant la réforme, lors du compte rendu du Conseil des ministres, Gérard Collomb a joué le « good cop ».

« Le Président et le premier ministre sont extrêmement optimistes »

« Le Président et le premier ministre sont extrêmement optimistes sur la capacité à pouvoir trouver une majorité, et à s’entendre en particulier avec le président du Sénat et de l’Assemblée nationale » a assuré le ministre de l’Intérieur. L’ancien sénateur du Rhône va même plus loin : « Je ne doute pas, que dans l’intérêt de notre pays, on puisse parvenir dans les semaines et mois qui viennent à un accord ».

Reste que les points de blocage et autres lignes rouges sont encore nombreux. Le gouvernement en a même ajouté, comme s’il voulait compliquer la tâche, avec l’organisation des sénatoriales en 2021 et la question de l’ancrage départemental des parlementaires (voir ci-après). De là à y voir un chiffon rouge que l’exécutif pourra retirer lors de la discussion parlementaire, pour montrer son bon vouloir… Interrogé par publicsenat.fr sur ces questions, Gérard Collomb se montre d’ailleurs confiant et ne ferme pas la porte à des modifications lors de l’examen des textes au Parlement. « Le projet de loi est celui que je vous ai indiqué. Mais évidemment, comme sur tout projet de loi, la discussion parlementaire peut faire bouger un certain nombre de choses. C’est au premier ministre qu’il appartiendra, en correspondance avec le président du Sénat, et de l’Assemblée nationale, de voir quelles lignes on peut éventuellement faire bouger. Notre but étant évidemment d’essayer, toujours, de trouver l’accord le plus large ».

Niveau de la dose de proportionnelle, nombre de parlementaires… Les sujets de discussion seront nombreux. Voici les points principaux des textes présentés au Conseil des ministres.

Baisse de 30 % du nombre de parlementaires et non-cumul des mandats dans le temps

Les promesses de campagne d’Emmanuel Macron sur les institutions se concentrent dans les projets de loi organique et ordinaire. Le texte prévoit la baisse de 30 % du nombre de parlementaires. Soit 404 députés contre 577 aujourd’hui. Et 244 sénateurs contre 348. La baisse du nombre de parlementaires ne nécessite pas de révision de la Constitution. Une loi organique suffit. Elle n’est pas considérée comme une loi organique relative au Sénat, ce qui impliquerait un vote dans les mêmes termes des deux assemblées, car les députés sont aussi  concernés. L’Assemblée peut donc avoir le dernier mot sur ce texte. Le Sénat a obtenu que chaque département conserve au moins un parlementaire, donc un sénateur.

Autre réforme importante : le non-cumul des mandats limité à trois mandats successifs pour les maires ou présidents de conseils départementaux et régionaux. Les maires des communes de moins de 9.000 habitants en sont exclus pour répondre à la crise des vocations dans les petites villes ou villages. Seuls « 3 % » des maires seront en réalité concernés, précise le ministre de l’Intérieur. Ce qui limite fortement la portée de la mesure... qui ne sera pas rétroactive. Seul le mandat en cours est pris en compte. Le non-cumul dans le temps s’appliquerait ainsi en 2032 pour un député actuellement élu puis réélu.

Le projet de loi organique fixe – ce n’était pas prévu par le gouvernement à l’origine – les prochaines sénatoriales en 2021. Ce qui réduirait de deux ans le mandat de la moitié de sénateurs… Et l’autre moitié ne serait réélue que pour 3 ans, en 2021. Une nouvelle ligne rouge pour les élus de la Haute assemblée. « C’est une règle constitutionnelle, (…) le Sénat est renouvelé tous les 3 ans » rappelle le président LR de la commission des lois du Sénat, Philippe Bas, sur Public Sénat. Il résume à sa manière ce que serait l’idée d’Emmanuel Macron : « L’idée politicienne, que je récuse, c’est « je remplace d’un seul coup tous les sénateurs après les municipales, que j’espère gagner, pour mettre par terre la majorité sénatoriale car dans la République, il y a un pouvoir qui me résiste, c’est le Sénat. Je ne veux pas de contre-pouvoir (…), je veux que les territoires soient à la botte et je veux que le Sénat s’incline et se soumette ». Regardez :

Réforme institutionnelle « Macron veut que le Sénat s’incline et se soumette » selon Philippe Bas
01:10

17% de proportionnelle à l’Assemblée nationale

C’était une autre promesse de campagne : une dose de proportionnelle pour l’élection des députés. Ce taux a pour le moment été fixé à 15 %, soit 61 députés élus sur une liste nationale. Mais en réalité, ce sera 17 % des députés qui seront élus par ce mode de scrutin. Car les 8 députés représentant les Français établis hors de France seront élus à la proportionnelle. Censé assurer une meilleure représentation, les petits partis, mais aussi les centristes du Modem, membres de la majorité, et de l’UDI, ne sont pas satisfaits de ce niveau de proportionnelle, qu’ils jugent trop faible pour leur être favorable. Ils craignent que les équilibres ne changent pas vraiment.

Avec la réduction du nombre de parlementaires, il faudra redécouper les circonscriptions. Selon les calculs de publicsenat.fr, avec 244 sénateurs, près de la moitié des départements n’auront plus qu’un sénateur. On ne connaît pas encore la nouvelle carte électorale. Une chose est sûre, elle se fera par ordonnances ultérieurement. Leur habilitation sera valable 18 mois. Ce redécoupage sera regardé de près. Les gouvernements qui ont changé la carte électorale ont toujours été accusés de tripatouillage. Gérard Collomb assure que le redécoupage sera fait « en toute transparence ». Il sera soumis à « l’avis public d’une commission indépendante ».

Détail important aux yeux des sénateurs : l’ancrage départemental des parlementaires est simplement inscrit dans la loi ordinaire. Suffisant selon l’exécutif. Mais le président LR du Sénat, Gérard Larcher, veut inscrire noir sur blanc cet ancrage dans la Constitution, pour le rendre plus sûr. Un nouveau sujet de discorde entre le gouvernement et le Sénat.

Le volet constitutionnel sera examiné d’abord à l’Assemblée début juillet en séance publique, puis à la rentrée de septembre au Sénat. Les projets de loi organique et ordinaire suivront à l’automne.

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