Macron, Larcher, de Rugy : trois hommes et une Constitution

Macron, Larcher, de Rugy : trois hommes et une Constitution

Emmanuel Macron a reçu à l’Elysée les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale, Gérard Larcher et François de Rugy. Au menu, la réforme constitutionnelle. Un accord est possible, mais il y a encore du chemin à faire.
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Rencontre au sommet… de l’Etat. A quatre jours d’une réunion du Congrès à Versailles, Emmanuel Macron s’est entretenu jeudi après-midi avec François de Rugy et Gérard Larcher à l’Elysée. La réforme constitutionnelle était à nouveau au programme de cette nouvelle rencontre. C’était il y a un an, déjà devant le Congrès, que le chef de l’Etat avait annoncé sa volonté de réformer le texte de 1958.

Après des mois de discussions sur les principes, le sujet n’a jamais été aussi concret. Les députés viennent de terminer l’examen en commission du projet de loi constitutionnelle, le premier des trois volets de la réforme institutionnelle. La baisse du nombre de parlementaires et la proportionnelle viendront dans un second temps, à la rentrée.

Points de blocages

Avant de passer au crible le texte, « il y aura une introduction de Gérard Larcher sur les trois thèmes importants » a-t-on expliqué avant la rencontre, du côté du Petit Luxembourg, qui abrite les bureaux du deuxième personnage de l’Etat. Si on n’emploie pas le terme de ligne rouge, Gérard Larcher attend des garanties. Elles sont connues : pas d’affaiblissement du Parlement, la prise en compte des territoires dans le cadre de la baisse du nombre de parlementaires – 30%, c’est un peu trop pour Gérard Larcher – et « pas de tripatouillage pour les sénatoriales », que l’exécutif imagine organiser en une seule fois, en 2021.

Richard Ferrand, président du groupe LREM de l’Assemblée, affiche son optimisme. « Le Sénat partage avec nous la défense et la promotion des droits du Parlement et la meilleure prise en compte des territoires », deux enjeux « très fortement pris en compte », assure ce jeudi le député, rapporteur général du texte. Il ajoute : « Sur la base de ces deux objectifs et sauf à être de mauvaise foi – ce que je ne prête pas aux sénateurs – nous devrions aboutir ».

« Signaux » et « preuves d’amour »

Dans le détail, le compte n’y est pourtant pas encore pour le Sénat, sans qui toute réforme de la loi fondamentale est impossible. Le président du Sénat va rappeler au chef de l’Etat ses exigences. « Ce sont des rendez-vous que nous préparons énormément. Le Président Larcher vient avec des propositions à chaque fois. Il va donner son avis sur ce qui a été adopté en commission » précise-t-on dans son entourage. Comme l’expliquait la semaine dernière à publicsenat.fr Philippe Bas, président LR de la commission des lois, les sénateurs attendent « de l’Assemblée nationale qu’elle nous donne des preuves d’amour… Et on pourra en donner aussi ». Mais pour l’heure, à part « quelques » amendements qui pourraient satisfaire les sénateurs, on estime du côté de la présidence que les députés « n’ont pas fait de pas ».

Si le texte constitutionnel comporte des sujets consensuels, il reste le gros point dur de la révision de la procédure parlementaire. Les députés LREM et Modem ont déjà mis un peu d’huile dans les rouages en proposant de maintenir les amendements qui ont un lien indirect avec les textes. « Ça fait partie des signaux qu’on attend » explique Philippe Bas. De quoi rapprocher tout le monde. Marc Fesneau, président du groupe Modem de l’Assemblée et co-rapporteur du texte, explique néanmoins que les députés n’ont pas cherché spécialement à brosser dans le sens du poil les sénateurs. « Ça plaît à tous les parlementaires en général, et donc aux sénateurs » précise-t-il à publicsenat.fr.

Les députés vont aussi présenter un amendement en séance – sur un projet de loi constitutionnelle, on part du texte du gouvernement et non de celui de la commission – pour revoir la question de l’ordre du jour. Dans son texte, le gouvernement peut davantage imposer son calendrier. Les députés veulent limiter cette possibilité « à deux textes par an » explique Marc Fesneau. « L’idée, c’est que le temps du gouvernement soit sanctuarisé, mais aussi celui du Parlement, pour éviter que le gouvernement ait la fâcheuse tendance à écraser le temps réservé à l’Assemblée avec ses textes » précise le député du Loir-et-Cher. De quoi, là aussi, se rapprocher de la volonté des sénateurs.

« Atteinte au bicamérisme »

Les députés défendent également une idée à laquelle ils tiennent : imposer au gouvernement de communiquer, sur une période de 6 mois, le calendrier législatif à venir, « et à 3 mois, ce serait un calendrier plus précis. L’idée, c’est d’avoir suffisamment en amont les textes » souhaite Marc Fesneau. Les députés veulent aussi se doter d’une capacité renforcée de contrôle et d’évaluation, « avec notre propre outil de contrôle », qui reste à définir.

Mais reste la question de la commission mixte paritaire, où députés et sénateurs cherchent à se mettre d’accord sur un projet de loi. Dans le texte du gouvernement, en cas de désaccord, les sénateurs examineraient directement le dernier texte de l’Assemblée, oubliant le travail du Sénat, qui pourra cependant toujours amender le texte. « C’est une atteinte au bicamérisme » dénonce Bruno Retailleau. « Totalement inacceptable pour le Sénat » prévient-on du côté du président de la Haute assemblée.

« Gérard Larcher veut toujours discuter »

Reste que depuis le début, Gérard Larcher ne ferme pas la porte. « Il veut toujours discuter » dans un état d’esprit « constructif » explique-t-on. Sur France Inter, le président du Sénat a souligné que « la synthèse » avait été « trouvée sur un certain nombre de sujets ». « Mais je crois plus raisonnable de dire que nous pourrions aboutir ou ne pas aboutir au printemps prochain », a-t-il ajouté, prudent. D’autant que les sénateurs ne veulent pas d’une réforme à la découpe. Pour eux, c’est un tout. La prise en compte de leurs points de vue sur les projets de loi organique et ordinaire va en partie conditionner leur attitude sur la révision constitutionnelle.

Philippe Bas semble malgré tout plutôt confiant sur la bonne issue des discussions. D’autant qu’il pense qu’Emmanuel Macron comme le Sénat ont intérêt à trouver un accord. Un référendum sur la baisse du nombre de parlementaires serait risqué pour l’exécutif, surtout s’il arrive avant les élections européennes, calculent les sénateurs. Mais le sénateur de la Manche sait que tout peut se retourner. « J’ai vu des guerres se déclencher alors que la diplomatie avait poussé à un accord » glisse le président de la commission des lois. Les sénateurs écouteront attentivement le discours d’Emmanuel Macron, lundi, à Versailles. Ils guetteront une éventuelle ouverture

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