Rencontre des syndicalistes de Whirlpool puis meeting à Amiens où le souvenir de délocalisations est encore frais: le trio Jean-Luc Mélenchon, François Ruffin et Manon Aubry a sommé les électeurs de "rendre les coups" contre une UE jugée antisociale.
En envoyant sur le thème social ses deux fers de lance médiatiques - le leader Mélenchon et l'électron libre Ruffin -, La France insoumise espère remédier à la stagnation de ses intentions de vote pour les élections européennes du 26 mai, autour de 8%.
Tous les trois, chacun dans son style, ont durement attaqué l'UE. D'abord dans l'après-midi face à des syndicalistes de l'ex-usine Whirlpool, symbole politico-social en France depuis la passe d'armes entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen sur le site amiénois dans l'entre-deux tours de l'élection présidentielle de 2017.
En mai 2018 l'usine de sèche-linges d'Amiens, qui employait 246 salariés, a fermé, et sa production a été délocalisée à Lodz en Pologne. La société WN du Picard Nicolas Decayeux a toutefois repris 186 salariés.
Devant les syndicalistes attablés, Jean-Luc Mélenchon a enchaîné les attaques, conclues par un appel au vote: "Ils se foutent de vous en disant que l'Europe vous protège", les délocalisations "c'est délibéré, ils ont tout organisé", l'Union européenne "n'est pas une union, mais une cage", "rendez les coups, ils ne comprennent que ça, et nous on veut les rendre le 26 mai".
François Ruffin, animant le débat en député "local de l'étape", a ironisé sur l'augmentation du trafic de camions résultant selon lui des délocalisations: "Au milieu du drapeau de l'UE et de ses étoiles, il faudrait un camion qui fume bien!"
François Gorlia, délégué CGT, qui a plusieurs fois rencontré M. Ruffin, s'est dit convaincu auprès de l'AFP: "On se sent soutenus, ils se battent pour défendre les petits salaires". Il choisira donc LFI pour les Européennes, alors que le vote ouvrier se dirige principalement, au vu des enquêtes, vers le Rassemblement national et l'abstention.
- "Quand on perd les patates" -
Le trio insoumis a ensuite insisté devant un public électrisé de 900 personnes, où des invectives résonnaient à chaque évocation du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et d'Emmanuel Macron.
Très acclamé mercredi soir, François Ruffin a moqué le Parlement européen: "Des grandes dalles de béton, des bâtiments de fer, c'est complètement déshumanisé". A cause de l'UE selon lui, ont été délocalisés de Picardie "le lave-linge en Slovaquie, les canapés en Roumanie, les pneus de Goodyear, même les chips... Quand on perd les patates en Picardie qu'est-ce qui va nous rester?"
"L'Europe est colonisée de l'intérieur par les intérêts privés", a-t-il ajouté, se lançant ensuite dans un rôle de rabatteur inhabituel pour cet électron libre: "Pourquoi voter pour la liste LFI? D'abord pour que nous surveillions ce qui se passe sur le secret des affaires, sur le glyphosate, la fiscalité. Et aussi parce que l'objectif c'est de dire non à l'Europe des Macron. Toute abstention est un vote Macron, et il compte sur l'éloignement des classes populaires".
"6.600 emplois détruits chaque année, à cause de leur politique de libre-échange, dont la moitié à l'intérieur de l'UE, combien de vies détruites, c'est ça l'Europe qui protège?", a questionné Manon Aubry.
Jean-Luc Mélenchon a conclu le meeting en moquant en Emmanuel Macron un "petit galopin se précipitant derrière Mme Merkel pour dire + Où est-ce qu'on signe?+"
Semblant vouloir conjurer les faibles sondages, il a souligné: "Dans tous les autres pays, ce sont les forces adverses qui l'emportent, mais il faut voir à quel point c'est un événement magnifique que les +gilets jaunes+, dans lesquels les autres voient briller l'éternel idéal révolutionnaire de la France... Voilà la langue universelle!"