Climat tendu au PS : Olivier Faure en tête… suivi de Nicolas Mayer-Rossignol, qui s’imagine l’emporter

Climat tendu au PS : Olivier Faure en tête… suivi de Nicolas Mayer-Rossignol, qui s’imagine l’emporter

Le premier secrétaire sortant, Olivier Faure, est arrivé largement en tête du scrutin interne au PS jeudi, juste sous la barre des 50 %, avec 49,15 %. Mais Nicolas Mayer-Rossignol, arrivé second avec 30,51 %, caresse quelques espoirs. Hélène Geoffroy, la plus critique vis-à-vis de la Nupes, fait 20,34 %. Les résultats, qui ont été recomptés toute la journée de vendredi, avec des points parfois sensibles, montrent un PS divisé.
François Vignal

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A croire que les socialistes aiment ça. Au lendemain du vote sur les textes d’orientation, en vue de l’élection, jeudi prochain, du premier secrétaire, une certaine tension planait au parti à la rose. Dans la soirée de jeudi, le texte d’orientation d’Olivier Faure, numéro 1 sortant du PS et l’un des artisans de la Nupes, avec LFI, est arrivé largement en tête, avec près de 50 % des voix, suivi de celui représenté par le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, soutenu par Anne Hidalgo et Carole Delga, et celui de la maire de Vaulx-en-Velin, Hélène Geoffroy. Le premier ne rejette pas l’union de la gauche mais veut y rééquilibrer le poids en faveur du PS. La seconde, soutenue par Stéphane Le Foll, fidèle hollandais, sortirait bien de l’alliance avec LFI.

« Ils peuvent être à 48,5 % maximum »

Seulement voilà. Selon la direction ou ses rivaux, les chiffres diffèrent. Jeudi soir, le parti donnait 50,5 % des voix à Olivier Faure, contre 30,5 % pour Nicolas Mayer-Rossignol et 19 % pour Hélène Geoffroy. Mais ces chiffres sont contestés par celui qui tentera de ravir le poste de premier secrétaire la semaine prochaine. Ce matin, les partisans du maire de Rouen avaient fait leurs calculs : 48,17 % pour Olivier Faure, 31,36 % pour le texte de Nicolas Mayer Rossignol et 20,47 % pour Hélène Geoffroy. « La Guadeloupe n’est pas encore tombée, mais ça ne change rien. Ils peuvent être à 48,5 % maximum », selon un supporteur du maire de Rouen. Dans le camp d’Hélène Geoffroy, on dénonce le « coup de pression, le coup de bluff de la direction, avec les messages passés cette nuit ».

L’enjeu, en partie symbolique, est important pour créer la dynamique pour le second tour. Car même avec plus de 50 % des voix, Olivier Faure ne sera pas élu aujourd’hui. Les 41.000 adhérents affichés votaient hier sur les textes d’orientation (les anciennes motions), qui composeront les instances du parti. C’est jeudi prochain, 19 janvier, que les militants désigneront cette fois bel et bien leur premier secrétaire, entre les premiers signataires des deux textes arrivés en tête, Olivier Faure ou Nicolas Mayer Rossignol.

« Système poutiniste » et « COCOE »

Ce matin, la nuit avait été courte pour certains socialistes. « On est parti à 4 heures du matin, on n’avait toujours de procès-verbaux (sur les résultats définitifs). Le parti n’a jamais donné de pv, c’est incroyable ! » s’étrangle Patrick Mennucci, soutien d’Hélène Geoffroy. « Là, on attend. On est en train de tomber dans le système poutiniste », lâche le Marseillais, avant le début de la réunion où les résultats sont consolidés. Elle répond au doux nom de commission de récolement, que les habitués de feu Solférino connaissent bien. L’ex-député PS des Bouches-du-Rhône y est le représentant d’Hélène Geoffroy. Le sénateur PS David Assouline porte lui la voix de Nicolas Mayor-Rossignol et Pierre Jouvet, porte-parole du PS, représente la motion d’Olivier Faure. Dans le passé, les points sensibles se discutaient lors de la commission des résolutions, toute la nuit parfois. Les acteurs du congrès du Reims, en 2008, celui où les socialistes se sont déchirés, s’accusant mutuellement de tricherie, s’en souviennent encore.

Aujourd’hui, il y a du progrès. La commission de récolement se déroule de jour… Elle a duré d’ailleurs toute la journée. Les points qui ne font pas débat ont d’abord été listés. Avant d’examiner en détail les situations plus litigieuses. Des « problèmes » sont soulevés dans plusieurs départements. Avant que le cénacle socialiste ne commence, un soutien de l’un des deux textes arrivés derrière craignait un possible scenario. « Depuis hier, leur dilemme, c’est qu’ils veulent atteindre les 50 %. Ils compilent ce qu’ils vont nous dire pour y arriver. Si on fait ça, c’est la COCOE ! C’est la crise majeure », prévient cet opposant à Olivier Faure, en référence ici à la crise au sein de l’UMP, quand François Fillon et Jean-François Copé accusaient l’autre de lui voler l’élection.

Cette tension inquiète alors certains. Si les résultats sont contestés, le PS retrouverait ses pires travers. « Ce serait désastreux. Il faut qu’on s’évite ça. Mais je pense que tout le monde sera raisonnable. On ne va pas chipoter à 0,5 point près », glisse un soutien d’Olivier Faure, qui « ne voit pas l’intérêt de se crêper le chignon jusqu’au bout ». Les socialistes n’iront pas jusque-là. En début de soirée, les résultats officiels tombent : 49,15 % pour Olivier Faure, 30,51 % pour Nicolas Mayer-Rossignol et 20,34 % pour Hélène Geoffroy. Soit un premier secrétaire juste sous la barre des 50 %.

« Je ne vois pas comment on passe d’une moitié de militants à moins »

On connaît donc les rapports de force. Mais l’analyse diffère. Et chacun veut y voir une première victoire, avant celle de jeudi prochain. « Merci aux milliers de militantes et militants socialistes qui ont fait le choix de me placer très largement en tête », a salué jeudi soir Olivier Faure, selon qui « le débat stratégique a été tranché » en faveur de la Nupes. « C’est la surprise et l’espoir est permis » s’est félicité de son côté Nicolas Mayer-Rossignol, « les chiffres nous permettent de gagner ».

« Les tendances lourdes sont connues. Ce qui compte, c’est la dynamique. Olivier Faure, dans un contexte compliqué avec trois textes, trouve les moyens d’être autour de la majorité absolue », souligne le sénateur Jérôme Durain, qui a soutenu le premier secrétaire. Il se dit « confiant ». « Je ne vois pas comment on passe d’une moitié de militants à moins ».

« Olivier Faure aura finalement réussi à couper le parti en deux »

De son côté, le président du groupe PS, Patrick Kanner, derrière la motion de Nicolas Mayer-Rossignol, estime qu’« Olivier Faure aura finalement réussi à couper le parti en deux par sa ligne politique. Et c’est le plus mauvais score d’une direction sortante, je crois ». « J’avais dit que le congrès serait ouvert, c’est la confirmation », ajoute le sénateur PS du Nord, qui note que le numéro 1 du PS « fait 5000 voix de moins que la dernière fois ». Pour l’ancien ministre de François Hollande, c’est un vrai choix stratégique qui est en jeu :

Le congrès s’est joué sur la Nupes. On continue ou pas ? Et dans quelles conditions ? C’est l’union à quel prix ?

Un « tout sauf Faure » peut-il se construire pour le vote de la semaine prochaine ? Pour l’heure, Hélène Geoffroy n’a pas appelé à voter pour Nicolas Mayer-Rossignol. Et ce dernier n’a pas demandé de soutien explicite. Mais ce qui n’empêche pas des rapprochements. « On veut être des alliés mais pas des alignés, vis-à-vis des partenaires de gauche. On partage ce même sentiment qui est majeur », selon Patrick Kanner, qui écarte en revanche toute « tambouille » ou « accord d’appareil ». Leurs scores additionnés tournent autour des 50 %. Mais en politique, « 1+1 ne fait pas 2 », rappelle Patrick Kanner. « Sur un certain nombre de points, Nicolas Mayer Rossignol est plus proche de nos positions », constate-t-on aussi dans le camp d’Hélène Geoffroy. Patrick Mennucci, pour sa part, semble avoir déjà choisi. « Ça va être serré mais c’est jouable », prédit l’élu marseillais. Jérôme Durain pointe lui « une ligne composite » qui manquerait de cohérence.

Le résultat d’hier ne sera pas le seul à définir l’orientation des instances nationales. Les deux tiers du conseil national du PS, composé de 300 membres, sont issus du rapport de force qui résulte du vote des militants. Mais un autre tiers vient des premiers secrétaires fédéraux, dont l’élection se fera en février, dans chaque département, après le congrès de Marseille, prévu du 27 au 29 janvier. Autrement dit, si tout est serré, on pourrait théoriquement imaginer un premier secrétaire élu la semaine prochaine, qui serait en minorité au conseil national, sorte de Parlement du parti. « Ce n’est pas impossible. Mais ce n’est jamais arrivé », note Patrick Kanner. « Pour les premiers fédéraux, la dynamique sera quand même alimentée par celui qui a gagné le premier secrétariat », tempère David Assouline, à la tête de la fédération de Paris.

Dans l’immédiat, les regards sont tournés vers le scrutin du 19 janvier, qui va désigner le premier secrétaire. Mais si le PS continue à paraître divisé, ce ne serait pas l’idéal pour se lancer dans la bataille contre la réforme des retraites, que la gauche aborde en revanche unie, Nupes ou pas Nupes.

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