Code du travail : le Sénat de droite pourrait dire «banco» à Macron

Code du travail : le Sénat de droite pourrait dire «banco» à Macron

Alors qu’Emmanuel Macron a commencé ses consultations sur la réforme du code du travail, la majorité LR et UDI du Sénat ne devrait pas être dans une opposition systématique aux futures ordonnances. Beaucoup de points de convergences existent. « On ne va pas se déjuger, on avait fait des propositions qui allaient en ce sens là » souligne le sénateur UDI Vincent Capo-Canellas.
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Les premiers chantiers du quinquennat Macron commence. Le nouveau chef de l’Etat a débuté mardi matin les consultations des partenaires sociaux en vue de la réforme du code du travail qu’Emmanuel Macron veut faire par ordonnances. Si le calendrier précis reste encore flou, l’exécutif compte bien avancer dès cet été.

Les ordonnances permettent de contourner la procédure législative normale. Mais il faut néanmoins passer par le vote d’une loi d’habilitation des ordonnances puis une loi de ratification. L’occasion d’un débat général à l’Assemblée et au Sénat, sans pour autant pouvoir modifier le texte par voie d’amendement.

On connaît les grandes lignes du projet d’Emmanuel Macron : accords d’entreprise, plafonnement des indemnités prud’homales, référendum à l’initiative de l’employeur, etc… Autant de sujets sur lesquels la droite peut être d’accord. De quoi compliquer l’attitude des tenants d’une ligne dure, chez les LR, vis-à-vis du nouvel exécutif.

Au Sénat, quelle sera l’attitude des LR et UDI qui détiennent la majorité ? S’il est encore un peu tôt – on ne sait pas encore quand les ordonnances passeront devant le Sénat – on peut, sans se risquer, affirmer que la droite sénatoriale pourra difficilement s’opposer frontalement au projet. Au contraire, elle pourrait accueillir la réforme d’un œil clément. « L’opposition constructive », chère au président LR du Sénat, Gérard Larcher, devrait être de mise.

Larcher : «  Pourquoi pas imaginer de se mettre d’accord sur un certain nombre de projets ? »

« J’avais été élu il y a 3 ans sur le thème de l'opposition constructive. Je suis toujours dans un esprit constructif » a assuré mercredi matin Gérard Larcher, invité de France Inter. Sur la question de l’emploi, « c’est un sujet dans lequel on ne peut être que dans un esprit positif et de construction » assure le sénateur des Yvelines, qui énumère les points importants à ses yeux : « Accords d’entreprise et de branche », « plafonnement des indemnités prud’homales », « simplification des organes du personnel », « la question des seuils ». Quant aux ordonnances, il n’y est pas opposé. Et pour cause : « C’est un secret de polichinelle. J’avais préparé pour le candidat LR (François Fillon, ndlr) un texte d’ordonnance. Donc je n’ai pas de difficultés à débattre autour de l’ordonnance, même si ce n’est pas la panacée pour le Parlement ».

Gérard Larcher : "Il faut une opposition qui ne soit pas cantonnée dans les populismes."
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Plus globalement, Gérard Larcher se montre ouvert à des accords au cas par cas avec Emmanuel Macron, parlant de « partenariat ». « Il y a un certain nombre de pays ou on parle de coalition ou de cohabitation. Pourquoi pas imaginer de se mettre d’accord sur un certain nombre de projets ? (…) Ça veut dire travailler ensemble pour le bien du pays » explique le président du Sénat.

Keller : « Je n’imagine pas un LR être contre ces dispositions »

Des propos qui plairont aux sénateurs LR Macron-compatibles, comme Fabienne Keller. Elle soutient les ordonnances. La sénatrice du Bas-Rhin a signé l’appel d’élus de droite pour répondre à la main tendue du Président. « La simplification du code du travail et son adaptation sont clairement inscrites dans notre projet chez les LR. Moi, comme beaucoup d’amis, nous soutiendrons cette réforme tant attendue du code du travail qui sur certains aspects bloque les recrutements » affirme Fabienne Keller à publicsenat.fr, qui appelle ses amis à la cohérence : « Ce qui affaiblirait Les Républicains, c’est d’être contre ces mesures que nous avons nous-même proposées. Je n’imagine pas un LR être contre ces dispositions. Sur le principe, on ne peut être qu’en soutien » affirme la sénatrice, pour qui « Emmanuel Macron doit s’appuyer sur une majorité large, de centre droit et de centre gauche, pour qu’elle soit solide ».

Longuet : « J’ai le souvenir qu’Emmanuel Macron avait dit des choses assez responsables »

Le sénateur LR Gérard Longuet, ne devrait pas poser de problème non plus. Un soutien qui peut d’abord paraître plus surprenant, tant le sénateur a soutenu François Fillon pendant la campagne. En réalité il ne l’est pas. L’ancien ministre de la Défense a toujours défendu en économie plus de libéralisation. « La réforme du droit du travail est une priorité absolue et sur ce terrain, j’ai le souvenir qu’Emmanuel Macron avait dit des choses assez responsables. Et s’il a le courage de les mettre en œuvre je suggérerai aux députés (de le soutenir), et en tant que sénateur, je soutiendrai une telle réforme » a affirmé lundi à l’antenne de Public Sénat Gérard Longuet (voir la première vidéo).

Lors de l’examen de loi Macron, le courant était bien passé entre l’ancien ministre de l’Economie et les sénateurs de droite et du centre. Parfois, une certaine communauté de vues transpirait des débats. Lors d’un échange sur notre plateau, en avril 2015, en plein milieu de l’examen du texte, Bruno Retailleau et Emmanuel Macron ne cachaient pas même une forme de sympathie, du moins de cordialité, l’un envers l’autre. Regardez :

Macron : « Nous passons notre vie ensemble avec Bruno Retailleau »
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Le principe des ordonnances ne devrait pas poser en soi de problèmes aux LR. François Fillon avait prévu d’y avoir recours en cas d’élection. Et sur le fond, les convergences seront là. Emmanuel Macron propose d’ailleurs pour valider un accord d’élargir le recours au référendum d’entreprise à l’initiative de l’employeur, mesure adoptée par les sénateurs lors de la loi Travail mais retoquée ensuite par le gouvernement. « Sur le droit du travail, il est évident qu’il y aura des points de convergence. D’ailleurs, il y avait des dispositions dans la loi Macron qui avaient été reprises par le Sénat sans difficulté » confirme un bon connaisseur du groupe LR.

Estrosi Sassone : « Si les choses sont assez précisées, on pourra dire le moment donné "banco" »

La sénatrice LR Dominique Estrosi Sassone, qui avait été co-rapportrice de la loi Macron au Sénat, attend d’en savoir plus sur « l’objet des ordonnances ». Mais « d’une façon générale, ça ne peut pas être une opposition systématique » reconnaît l’élue des Alpes-Maritimes. « Sur le plafonnement des indemnités, on était favorables » se souvient-elle, tout comme sur le référendum d’entreprise, « c’est un point d’accord ». « Si les choses sont assez précisées, on pourra dire le moment donné "banco" » résume Dominique Estrosi Sassone.

Du côté du groupe UDI-UC, on devrait montrer son ouverture aussi. « Le groupe n’a pas débattu des ordonnances. Pour autant, nous avons eu une discussion il y a plusieurs mois et on n’avait pas écarté l’idée des ordonnances pour un Président nouvellement élu. A titre personnel, je trouve que l’élément central, c’est le contenu » souligne Vincent Capo-Canellas, vice-président du groupe UDI-UC et ancien président de la commission spéciale sur la loi Macron à la Haute assemblée.

Capo-Canellas : « Pour l’essentiel, ça fait partie des choses qu’on avait proposées lors de la loi Macron au Sénat. On avait une communauté de vues sur le fond avec Emmanuel Macron »

Lui aussi ne cache pas voir sous un jour favorable les projets de réformes économiques du Président : « Pour l’essentiel, ça fait partie des choses qu’on avait proposées lors de la loi Macron au Sénat. On avait une communauté de vues sur le fond avec Emmanuel Macron. Il n’y a pas de doute sur le fait que ce soit une réforme nécessaire. On ne va se déjuger, on avait fait des propositions qui allaient en ce sens là. On les avait votées. Le Sénat doit jouer son rôle qui n’est pas de changer de point de vue. Il faudra être au rendez-vous » prévient Vincent Capo-Canellas. Plutôt qu’une opposition constructive, le centriste dirait « que le Sénat doit être constructif, tout court ». Il espère que le mouvement se fera dans les deux sens : « Etre constructif, c’est aussi auparavant savoir associer les groupes à l’écriture du texte ».

Si le chef de l’Etat aura d’abord besoin d’une majorité à l’Assemblée pour faire adopter les ordonnances, on voit que la majorité sénatoriale ne devrait pas lui mettre de bâtons dans les roues et pourrait se montrer ouverte à Macron. Mais jusqu’à quel point ? Selon un sénateur LR, il n’est « pas impossible que de façon sournoise, malgré les élections sénatoriales de septembre favorables à la droite, que le président de la République ait une majorité au Sénat. Si on enlève les centristes et une dizaine ou quinzaine de sénateurs LR, il y a au Sénat une majorité pour le Président». On n’en est pas encore là. Mais en ce moment, les choses bougent, y compris à la Haute assemblée.

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