Emmanuel Macron veut réviser les traités européens et se prononce pour une Europe à plusieurs vitesses

Emmanuel Macron veut réviser les traités européens et se prononce pour une Europe à plusieurs vitesses

Pour son premier grand discours depuis sa réélection, au Parlement européen, à Strasbourg, Emmanuel Macron s’est prononcé pour la « convocation d’une convention de révision des traités » européens, avec l’idée d’une « différentiation » entre Etats, gage selon lui « d’efficacité ». Il propose de créer « une communauté politique européenne », un nouvel échelon moins intégré et moins contraignant que l’adhésion à l’Union européenne, où l’Ukraine pourrait avoir sa place.
François Vignal

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C’est en fervent Européen qu’Emmanuel Macron s’est fait réélire le 24 avril. Une orientation que le chef de l’Etat a pu défendre, ce lundi 9 mai, lors d’un discours devant le Parlement européen, à Strasbourg, pour la journée de l’Europe, avant de se rendre dans la foulée à Berlin, réservant sa première visite officielle depuis sa réélection au chancelier allemand Olaf Scholz. Alors que la France occupe la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne (UE) jusqu’à fin juin, les Européens ont aussi conclu la Conférence sur l’avenir de l’Europe, une large consultation de citoyens européens sur le projet de l’UE des dix ans à venir.

Treize pays de l’Union européenne se prononcent contre la révision des traités

Pour son premier grand discours depuis son investiture, Emmanuel Macron a choisi le Parlement européen de Strasbourg. Pas seulement un symbole, puisque le chef de l’Etat a mis des propositions sur la table. Insistant sur « l’indépendance », la « souveraineté » et « l’efficacité » de l’Europe, Emmanuel Macron s’est surtout prononcé pour une révision des traités.

Une proposition qui résonne avec les débats intérieurs, au moment où la gauche, unie autour de Jean-Luc Mélenchon, se dit prête à désobéir ou à ne pas respecter les traités pour mener une politique moins libérale. Emmanuel Macron préfère, lui, les réviser. Mais on connaît la difficulté – très grande – de trouver un accord à 27 pays. Treize pays de l’UE, dont la Suède, la Finlande, le Danemark, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie et les Etats baltes, ont d’ailleurs déjà, dès ce lundi, exprimé leur opposition à toute révision des traités…

Macron va prendre son « bâton de pèlerin » pour convaincre

Mais pour Emmanuel Macron, c’est le moment. Pour pouvoir « décider vite », comme l’Europe l’a fait durant la crise du covid-19 ou lors de la guerre en Ukraine, Emmanuel Macron se dit « favorable à une réforme institutionnelle » et à la « convocation d’une convention de révision des traités » européens, « comme le propose le Parlement européen » et la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen. Tout en en définissant bien « le cadre » et les « objectifs », il souhaite que le sujet soit mis sur la table « dès le Conseil européen du mois de juin ».

Emmanuel Macron compte « clarifier » les « objectifs de nos institutions », avec « la croissance, le plein-emploi, nos objectifs climatiques », alors « que les règles ont été pensées il y a des décennies ». Tout comme il faudra se pencher sur « les règles d’élection, les règles de contrôle et le droit d’initiative au Parlement européen ».

« Cette proposition est maintenant à travailler. Je vais prendre mon bâton de pèlerin » pour « essayer de convaincre les gouvernements intéressés », a précisé ensuite Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse.

« Il ne faut pas craindre la différentiation »

Autre proposition, en lien avec la première : Emmanuel Macron se prononce pour une Europe à plusieurs vitesses. « Il ne faut pas craindre la différentiation », ni « les avant-gardes » qui permettront d’être « plus ambitieux » sur certains sujets, soutient le chef de l’Etat, pointant du doigt « la volonté de nous tenir à 27 (qui) nous a interdit d’être plus ambitieux ». Il ajoute :

Ces cercles d’avant-garde n’excluent pas. C’est permettre à ceux qui veulent avancer un peu plus loin, d’entraîner les autres et rendre l’ambition désirable.

« Je sais les craintes qu’il y a d’une Europe à plusieurs vitesses. Elle existe déjà », rétorque-t-il. Pour Emmanuel Macron, « cette différentiation […] est une condition de l’efficacité ». Une idée qu’il avait déjà avancée, en juin 2017, lors de son discours de La Sorbonne. « L’Europe est déjà à plusieurs vitesses, alors n’ayons pas peur de le dire ou de le faire ! Allons vers cette différenciation », avait avancé le chef de l’Etat fraîchement élu.

« Une communauté politique européenne » ouverte à l’Ukraine ou « à ceux qui ont quitté » l’Union

Comment dès lors réorganiser cette Europe ? Pour Emmanuel Macron, « face au contexte géopolitique », un « devoir historique » impose de réfléchir à « l’organisation de notre continent ». Il propose pour cela de créer « une communauté politique européenne ». Cette nouvelle structure « permettrait aux Nations européennes, démocratiques, adhérant à notre socle de valeurs, de trouver un nouvel espace de coopération en matière de politique de sécurité, en matière énergétique, de transports, d’infrastructures, de circulation des personnes, en particulier de la jeunesse ». Ce club pourrait être un espace pour de nouveaux pays non membres de l’Union européenne, comme l’Ukraine. D’autant que pour Kiev, « nous savons tous que le processus prendrait plusieurs années, et sans doute plusieurs décennies, sauf si nous décidions de baisser les standards de cette adhésion ».

Cette communauté politique européenne « ne serait pas fermée à ceux qui ont quitté » l’Union européenne, glisse au passage Emmanuel Macron, sans citer directement la Grande-Bretagne.

« C’est ça l’Europe : ce sont des rêves fous, des ambitions inédites »

Pour Emmanuel Macron, « c’est ça l’Europe : ce sont des rêves fous, des ambitions inédites. Et ensuite la capacité collective à construire des compromis qui sont parfois laborieux, mais qui sont la langue de l’Europe ». « Agir fort, rêver vite, aller grand. Ces mots ne sont pas seulement l’apanage de la Chine ou des Etats-Unis. Ces ambitions, nous les faisons nôtre », ajoute encore Emmanuel Macron, qui conclut sur « la langue universelle qui est la nôtre : la musique. Nos hymnes européens ». Il faudra encore néanmoins beaucoup de répétitions aux Européens pour réussir à accorder leurs violons sur tout et jouer à l’unisson.

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